Cet enfant potentiel était le symbole de l'humanité que j'aurais souhaitée. Une humanité qui soit comme Dievex, mais avec un peu plus encore de Liberté, et même avec un bout de Chesna peut-être. Le compromis qu'on aurait trouvé Loïc et moi. Cet enfant était juste un rêve. Juste une illusion. Une chose qui n'aurait jamais pu exister. Loïc croyait qu'on aurait probablement pu faire l'amour ensemble une centaine de fois, lui et moi, sans que jamais je ne tombe enceinte. Il le croyait, mais pas assez pour retenter l'expérience. Il croyait que lui et moi, Chesna et Dievex, sont devenus deux espèces différentes, incapables de se reproduire ensemble donc. Moi, je ne le crois pas. Moi, je crois qu'on est toujours la même espèce, la même humanité ; je crois que Dievex et Chesna sont juste deux cultures différentes. Deux cultures que j'aurais voulu réconcilier. Parce que j'aurais voulu une humanité unitaire. Une humanité sans cultures ; ou avec tant de sous-cultures que ça ne compterait pas, que çane séparerait pas. Une humanité à l'image de Dievex ; en matière de diversité du moins.
Une culture est toujours un système fermé, enfermant, unitaire, avec tous plein d'éléments tous liés les uns aux autres au point qu'il devient impossible de prendre quoi que ce soit sans devoir embarquer avec tout le reste. Toutes ces valeurs qui font effet domino et toutes ces perceptions qu'on ne peut pas changer sans toucher à tout le reste. Une culture se développe et se développe encore ; jusqu'à ce que ça devienne trop tard trop tard. Peut-être qu'à un moment la réconciliation devient impossible. Peut-être que Dievex et Chesna sont aujourd'hui trop différentes pour qu'on puisse encore former une humanité commune. Mais je ne veux pas y croire. Je crois en ce rêve d'une Humanité unitaire où la diversité existerait entre chaque être, sans que ceux-ci ne forment des sous-groupes homogènes. Une humanité où chacun serait unique et pas deux personne ne seraient identiques ; où chacun aurait des similarités et des différences avec chacun des autres. Des similarités et des différences sur tellement de critères différents qu'on ne pourrait pas dire qu'il y a certains êtres dont nous sommes plus semblables que d'autres. Je voudrais qu'on se sente tous humains dans la même mesure. Qu'on ait conscience que même ceux que l'on ne connaît pas sont tout aussi humains que ceux que l'on connaît.
Et ça me tue de penser que je n'y arrive pas. Je n'y arrive pas avec Chesna. Je n'arrive pas à les considérer comme aussi humain que nous. Je ne peux pas m'empêcher de penser qu'ils sont dans l'erreur. Je ne peux pas accepter leur culture, parce que pour moi elle n'est pas une simple différence, mais une erreur philosophique. Pour moi, ils sont dans l'erreurs, ils s'égarent et ils égarent l'humanité. Je ne crois pas que leur humanité et la nôtre puissent exister côte à côte et qu'on doive s'en tenir à affirmer que pas une n'est meilleure que l'autre. Je crois que le progrès de l'humanité est quelque chose qui a du sens, que l'on ne peut pas s'en tenir au relativisme total. Mais leurs valeurs sont différentes des nôtres et je ne sais pas si je suis en droit de me contenter de les rejeter. Je trouve que les nôtres sont justifiables et les leurs juste arbitraires. Je trouve que les nôtres ont plus de raison d'être. Mais peut-être que je suis juste engluée dans mes préjugés. Après tout, on ne peut jamais se détacher pleinement du prisme de sa culture. J'ai tellement envie de croire qu'une autre solution est possible, que l'acceptation est possible. Mais si même moi je n'y arrive pas, devrais-je vraiment continuer d'y croire ?
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Humains néanmoins
Ciencia FicciónIl est né avec collé sur son berceau une cartographie de son patrimoine génétique, choisi par ses parents et définissant dans les moindre détails qui il est destiné à devenir. Elle est née dans une couveuse artificielle, de la rencontre de deux gam...