Un déjeuner chez les Wheeler

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Le repas fut comme à son habitude horriblement ennuyeux. Je détestais ces repas du dimanche midi que ma mère nous obligeait avec Nancy d'assister. C'était pour «resserrer les liens familiaux» comme elle disait si bien qu'elle les faisaient. Pourtant, elle savait aussi bien que nous que ces fameux liens s'étaient défaits depuis longtemps.

Nous n'avons jamais eu une vraie famille, une vraie famille qui s'adore, où chaque membre de la famille compte et s'entraide les uns avec les autres, comme la famille de Will. Ou encore une famille comme celle de Lucas. Ses deux parents s'aiment comme jamais je n'ai vu des parents s'aimaient. Moi, je crois que mes parents ne se sont jamais aimés. J'ai même du mal à les imaginer s'être aimés un jour. Mon père n'est jamais là quand il le faut pour nous, il n'est même jamais là tout court. C'est même à se demander si il est au courant de notre existence. Moi, je m'en fichais pas mal. J'ai jamais eu besoin d'un père et je sais que Nancy partage le même avis que moi. C'est pour Holly que c'est plus dur. Une enfant de 6 ans a besoin de son père. Quelqu'un qui lui raconte des blagues, qui l'aide à faire ses premiers devoirs, qui l'emmène au parc... Nous on ne connaît pas tout ça, c'est ma mère qui s'en est occupée, qui s'occupe de tout même. Et quelque fois, je me demande vraiment pourquoi elle reste avec un mec comme mon père. Personne ne mérite de partager sa vie avec un type pareil.

-Mike? Tu m'écoutes? me cria soudain Holly de l'autre côté de la table.

-Quoi? Oui qu'est-ce-que tu dis Holly?

-Je te demandais si tu allais voir Jane pendant les vacances?

Un sourire rieur s'afficha sur le visage de ma soeur qui coupait sa viande et je la vus se mordre les lèvres pour ne pas éclater de rire. Quand à Holly et ma mère, elles me regardaient comme si elles me passaient aux rayons X.

-Oui c'est vrai ça Mike, rajouta ma mère en se servant un verre de vin. Qu'est-ce-que tu comptes faire pendant les vacances?

-Bah... je sais pas encore, avouais-je en jouant nerveusement avec ma fourchette sur la nappe. Je verrais avec les autres.

Ma mère hocha la tête et rajouta ces phrases qui me firent rougir jusqu'à la racine de mes cheveux:

-Et tu me préviendras si un jour tu vas chez Jane. Pour que je saches si je dois venir te chercher ou pas... Et puis ce sera une première pour toi non?

Je crus que j'allais recracher tout ce que j'avais dans la bouche. Nancy, elle, ne s'en priva pas. On aurait dit qu'elle allait mourrir étouffée. Je la fusilla de rire et déglutit avec difficulté avant de répondre à ma mère d'un air posé:

-Ah oui ne t'inquiètes pas. Je te préviendrai.

Elle ne savait pas que ce n'était pas chez Lucas que j'allais après les cours cette année. C'était chez El que j'allais. Il n'y avait que Nancy qui le savait. Si je l'avais dit à ma mère, elle aurait été capable de m'espionner ou même appeler Hopper pour savoir si j'étais bien là-bas. Et vu les tensions entre Hopper et moi, j'ai préféré une nouvelle fois cacher la vérité à la femme qui m'a élevé.

Alors que je m'apprêtais à enchaîner sur un autre sujet, le téléphone fixe sonna. Tout nos regards se posèrent sur notre père qui était le plus près du téléphone. Mais comme à son habitude, il se contentait de finir goulûment son assiette sans prêter aucune attention au son du téléphone et à nos regards insistants. Alors, comme à son habitude, ma mère leva les yeux au ciel et se leva péniblement. J'aurais juré voir une larme tremblotait dans son œil. J'étais si mal pour elle dans ces moments-là.

-Allô? claironna-elle en prenant une voix détendue quand elle prit le combiné. Non c'est sa mère. Vous êtes?

Mon regard et celui de Nancy se relevèrent en même temps de nos assiettes. El... Si seulement cela pouvait être elle. J'avais une chance sur deux, soit c'était pour Nancy soit c'était pour moi.

-C'est à dire que nous sommes tous à table, dit ma mère. Il te rappellera plus tard d'accord? Au revoir et bonne journée Jane.

Mon cœur se mît soudain à battre à tout rompre. «Jane...»

-Non attends maman passe la moi! m'interposais-je en quittant la table.

-On ne quitte pas la table tant que le repas n'est pas fini! répliqua mon père à la manière d'un robot, toujours le regard plongé dans son assiette.

Mais ma mère venait de raccrocher.

-Mais maman t'as pas entendu ce que je t'ai dit? Je t'ai dit de me la passer! gémis-je d'un ton énervé.

-Et toi, tu n'as pas non plus entendu ce que ton père a dit? On ne quitte pas la table tant que le repas n'est pas terminé, me répondit-elle en se rasseyant.

-Ah c'est tout ce que tu trouves à dire? Tu es sérieuse là? ripostais-je en restant debout.

-Ne parle pas comme ça à ta mère, me reprit mon père en se tournant vers moi pour la première fois. Et puis d'ailleurs, qui est cette Jane?

J'ouvris la bouche pour répondre mais ce ne fut qu'un souffle exaspéré qui en sortit. C'est ce que j'étais, exaspéré par cette famille ingrate et incompréhensive face aux besoins des autres.
Je quitta donc la pièce d'un pas énervé avec la voix de ma mère qui me criait avec autorité:

-Mike reste ici! Le repas n'est pas terminé. Mike!

-Bah bonjour l'ambiance... grommela Nancy.

-Mamaaaan? Je pourrais la voir Jane un jour dis? minauda Holly.

-Bon Karen est-ce-que tu peux me dire qui est cette satané Jane? s'enquit mon père d'une voix soudain intéressée par la situation.

Je n'entendis pas la réponse de ma mère car je claqua la porte de ma chambre à ce moment-là. Je me laissa tomber sur mon lit, les mains dans les cheveux en soupirant. Comment une famille pouvait arriver au point où la notre en était? J'entendais les éclats de voix de ma mère résonnaient dans toute la maison qui se plaignait qu'on allait tous la rendre folle et la petite voix de Holly qui désirait son dessert en plein milieu du repas.

De toute façon ce n'était même plus une famille que l'on était, c'était un champs de bataille permanent.

Je tourna alors la tête vers ma table de nuit. Adossé contre ma lampe de chevet, il y avait une photo d'El souriante, assise sur le muret en pierre de notre lycée, ses jambes croisés, ses cheveux éparpillés dans le vent et le regard lointain. C'était ma préférée de toutes celles que j'ai d'elle. La particularité de cette photo est qu'elle a été prise sans qu'El ne s'en aperçoive. Ça l'a rend très naturelle sur cette photo. Et pour moi, c'est le naturel qui embellit les personnes. Puis mon regard se dirigea sur le petit téléphone individuel bleu que Nancy m'avait donné après s'en être acheté un nouveau. Je souris à mon tour. Je savais exactement ce qu'il me restait à faire.

Désolé pour le retard, j'étais censé publier hier mais j'ai eu une journée plus chargée que je ne l'avais prévu!
J'espère que ce chapitre vous a plus et rendez-vous lundi pour un nouveau chapitre qui est un mileven☺️
Je vous aimes, gardez le sourire❤️

Liz🌙

Je t'aimais, je t'aime et je t'aimerai 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant