Chapitre 22 : Jeux verbaux

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Seul le bruit des couverts en argent venait rompre le silence durant ce repas propice à de grandes réflexions avant les négociations. Quelques fois on entendait les pas des servants qui se faisaient discrets mais rien ne venait me retirer de mes pensées éprises par l'homme qui me faisait face.

Azgar.

Pourquoi ? Cette question me tourmentait. Pourquoi avait-il changé d'avis ? Presque sur un coup de tête. Rien ne prévoyait qu'il allait m'accepter en tant qu'allier et encore moins en tant que femme. Je n'y comprenais rien, ce revirement de situation brûlant mes neurones qui fusaient à plein régime.

Ses aveux me perturbaient, autant qu'ils me réjouissaient. Mais d'une joie méfiante. Pas de celle que l'on profite à pleins poumons, le sourire aux lèvres. Non mais plutôt de celle qui nous tracasse sans que l'on puisse cesser de nous demander : et ensuite ? C'était ... affreusement tourmentant.

Parce qu'après sa déclaration, nous étions sortis du terme et il m'avait laissée, tout en ne loupant pas une miette de ma nudité, pour aller soigner ses plaies ouvertes qui avaient laissé des traces rouges ternir l'eau salie par nos baisers passionnés. Je m'étais ainsi retrouvée seule avec mes préoccupations et mes inquiétudes, June arrivant pour m'habiller. Et depuis je n'avais échangé aucun mot avec mon mari. Pas un regard. Pas un geste.

Et cette fois-ci, je croyais bien que j'en étais la responsable. Je l'évitai comme la peste afin de ressaisir mes pensées et mon corps.

« - Bien, maintenant passons aux choses sérieuses. Ceux qui sont conviés, veuillez me rejoindre dans la grande salle dans quelques minutes, déclara la reine avec un sérieux que je découvrais. »

La vielle dame couronnée se leva, suivie de sa famille puis il ne resta plus que Roan, Azgar et moi dans la pièce, comme des alliés ennemis. Chacun avait ses objectifs.

Roan voulait se faire un nom et défier son cousin au passage.

Azgar voulait rallier une armée à la sienne afin de gagner la guerre.

Et moi je voulais les ferveurs de cet empire.

Et une chose était sûre, nous devions tous sacrifier une partie de nous afin d'obtenir ce que nous voulions tant. Mais à quel prix ?

« - L'union. Nous devons tous être unis afin d'obtenir leur aide. Si nous paraissons divisés, nous n'aurons rien.

- Je suis d'accord cousin. Je connais cette famille depuis longtemps, je pense ... débuta Roan avant d'être brusquement coupé par son roi.

- Tu ne penses pas, tu obéis ! Tu n'es pas ici pour te faire une place mais seulement pour faire acte de présence. Que je ne t'entends pas durant les pourparlers sinon tu le regretteras amèrement ! »

Les deux hommes se défièrent mais Roan ne le contredit pas, sachant pertinemment qu'il n'hésiterait pas à mettre sa menace à exécution. Et qu'il le ferait avec une joie certaine et meurtrière.

« - S'ils acceptent de se rallier à nos côtés, comment traverseront-ils la mer ? Reprit le cousin après quelques secondes de pure tension. »

Je me pinçai délicatement les lèvres, méfiante à l'idée de révéler mes supercheries. Je ne voulais pas qu'ils le voient comme une menace mais je savais aussi que je frôlais l'acceptable. Pourtant j'avais la seule et unique solution.

Les mercenaires. Ces pirates peu fréquentables et fiables m'avaient fait serment d'allégeance dans cette guerre. Et en contrepartie je leurs avais promis terre, argent ainsi qu'une dette encore inconnue. Et cette partie de l'histoire n'allait pas leur plaire.

Empires II : ConquêteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant