Chapitre 25 : Retour aux terres natales

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Je n'avais pas sommeil. Je cogitai dans les draps froissés, me tournant, me retournant, ne trouvant aucune position agréable qui me ferait oublier les images du corps sans vie de Roan.

Il était mort. Il nous avait vendu à mon frère. C'était un traître et en même temps je n'arrêtais pas de penser qu'il l'avait fait par désespoir. Qu'il était simplement perdu et que personne n'avait su lui tendre la main pour remonter la pente. Et ce chagrin qui m'empoignait les entrailles était douloureux.

Il ne méritait pas une telle mort. Ni une telle vie. Personne ne le méritait.

Je soufflai de désarrois, me positionnant sur le dos et observai le plafond, les images du meurtre tournant en boucle dans ma tête. Je revoyais chaque détail, chaque mouvement. De l'épée ensanglantée au sourire narquois qui avait élargi ses lèvres lorsqu'il avait admis sa traîtrise. Cela me faisait froid dans le dos.

Qu'avait-il dévoilé à Marcus ? Jusqu'où était-il allé ? N'avions-nous donc plus aucun effet de surprise ?

Le pire est à craindre, avait froidement déclaré la Reine Divina.

Son visage s'était refermé tandis qu'Arthur avait affiché un air d'incompréhension, la stupéfaction lui coupant toute volonté de dire une parole. Cependant nous le savions tous, la victoire s'était encore éloignée de dix pas et je me demandais à présent si la prédiction était véritable.

Allions-nous vraiment gagner cette guerre ? Parce qu'en cet instant, nous n'avions aucune chance. C'était comme préparer un désastre mortel. Nous n'avions plus aucun pion dans l'échiquier si Roan avait tout révélé au grand jour.

Les alliances et mon don étaient en péril.

« - Nous devons savoir ce qu'il a écrit à Marcus, murmurai-je à Azgar. »

Le roi ne dormait pas non plus mais semblait plus paisible, la tête posée sur l'un de ses bras amenés en arrière. J'avais l'impression que tuer son cousin avec sauvagerie le libérait d'un poids qu'il traînait depuis des années. Il semblait libéré.

« - Pour nous assurer de sa traîtrise. Peut-être n'a-t-il pas tout dévoilé, repris-je.

- À sa place je n'aurais rien oublié. Il voulait nous affaiblir et il s'est certainement donné tous les moyens.

- Je ne comprends pas son revirement soudain de situation, c'est lui-même qui a plaidé notre cause auprès de la Reine afin que nous ayons audience, pourquoi l'aurait-il fait si c'était pour nous trahir derrière ?

- Parce que je lui en avais donné l'ordre, déclara-t-il avec ardeur. »

Je soufflai dans le noir de la pièce, la lune étant la seule source de lumière sur cette ville endormie. Cela n'avait aucun sens. On n'obéit pas à un ordre d'un homme qu'on veut abattre.

« - Pourquoi avez-vous tué sa femme ? »

Un lourd silence accueillit ma question légitime. Je voulais savoir. Je voulais comprendre.

« - Il a toujours été un fin manipulateur. Depuis longtemps que je me souvienne, j'ai dû surveiller ses faits et gestes. Pour lui ce n'était pas de la trahison mais un plaisir diplomatique et politique. Il se plaisait à pactiser avec l'ennemi et à rendre les conflits impossibles à résoudre. »

Je me tus, retenant mon souffle, alors que le Roi semblait dans ses pensées, se remémorant certainement de vieux souvenirs. Je savais que la relation entre les deux hommes était chaotique, pour ne pas dire désastreuse, mais j'avais toujours pensé que c'était le caractère autoritaire d'Azgar qui avait forcé Roan dans ses retranchements.

Empires II : ConquêteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant