Chapitre 15 : Virage nocturne

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Satan semblait s'emparer de cet être déformé et défiguré, lui ôtant l'âme et la rendant esclave de ses désirs. Un voile ombragé empêchait d'apercevoir la fin de ses longues jambes féminines et noircies, des ombres dansantes à ses pieds alors qu'elle avançait vers moi, me pétrifiant sur place.

Ce démon semblait plus noir que la nuit. Plus obscure que les ténèbres. Plus infâme que la peste. Possédé.

L'enfer semblait la suivre. La guidant vers sa cible. Et c'était terrifiant.

Ses yeux rouges m'observaient, s'alimentaient de ma peur comme d'une nourriture délicieuse. Elle sentait ma panique qui faisait naître des tremblements incessants alors que je me reculais jusqu'à sentir le mur humide dans mon dos.

Mon cœur bondissait dans ma poitrine, voulant lui aussi fuir devant cette horreur qui se rapprochait, s'extasiant de mon impuissance. J'étais seule. Complètement pétrifiée. Et une seule pensée me vint à l'esprit : les démons.

Lorsqu'elle franchit le lit, seuls quelques pas nous séparaient et mon corps sembla se réveiller, l'adrénaline parcourant mes veines de part en part et je me jetai au dernier moment sur le côté, échappant à une branche sortant de sa paume qui fracassa le mur.

Mon pouls tambourinait sauvagement à mes tympans en furie et je me sentis glisser jusqu'à son antre, mon ventre dérapant sur le bois mouillé. Mes ongles s'ancraient sur le sol mais rien ne me retenait. Cette chose me tirait la cheville de ces doigts crochus et tordus que je pouvais sentir par-dessus mes bottes, me rapprochant inéluctablement de son corps.

Je lâchai un cri de fureur, attrapant la chaise qui valsait dans l'étendue d'eau et me retournai pour la projeter sur son visage horriblement terrifiant. Un craquement sourd se fit entendre et ce fut à son tour de crier de colère, ce son me pulvérisant les oreilles comme des millions de bourdonnements et elle se jeta sur moi.

Je levai mon genou pour la parer et tentai vainement de la repousser tandis qu'elle m'enfonçait la tête sous l'eau qui grimpait dans le navire. L'épuisement et le dégoût m'habitaient, accentuant les battements intensifs de mon cœur.

Je sentis soudain l'étau se desserrer alors je relevai mon visage, prenant une grande respiration qui me brûla les poumons, au moment où Azgar lui tranchait la gorge, un liquide noirâtre se répandant sur ma peau.

Je reculai vivement, son corps retombant sans vie entre mes jambes et je regardais avec horreur ses cheveux virevolter dans l'eau autour de sa tête tandis que son sang s'épandait autour d'elle. Oh mon dieu !

Mais que venait-il de se passer ?

Mes respirations étaient saccadées, incontrôlables et je n'osais plus cligner des yeux, de peur que ce démon ne bouge de nouveau.

Je ne sus combien de temps je restai ainsi à observer terrifiée cette créature venue de l'enfer mais une main finit par me soulever brutalement, me remettant debout.

Je plantai alors mes iris dans ses pupilles obscurcies et complètement dépassées par les événements. Je n'avais pas besoin de lui demander pour savoir qu'il ne savait pas non plus ce qu'il venait de se passer. Nous étions ignorants sur l'origine de cette chose infâme.

Presque ahuris et déroutés.

Ce démon n'avait rien d'humain. Absolument rien. Je ne serais pas étonné de ne trouver qu'une poitrine creuse et vide sans cœur. Comment ferait-il pour battre avec tant d'atrocités ? C'était insensé. Irrationnel. Mais surtout que nous voulait-il ? Notre mort ou bien plus ? Je ne saurai le dire.

Azgar me retenait pour m'empêcher de m'écraser sur le sol, mes jambes aussi flageolantes que tremblantes. Sa poigne était puissante et impérieuse, ses doigts agrippant un peu trop férocement mon bras mais à ce moment précis, je l'en remerciai de m'empêcher de sombrer.

Empires II : ConquêteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant