Chapitre 33 : Révéler (trahir)

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Point de vue d'Azgar

« - J'ai un plan mais avant cela je dois te révéler mes origines. »

Aguerta était la cible de ma colère. De mon désarroi. De mes craintes les plus obscures. Elle était ce que je voulais fuir et ce que je ne pouvais plus quitter.

Son regard bleu, souvent doux et sage, était en ce moment déterminé et influent. Ma femme avait trouvé un moyen de me nuire, j'en étais sûr.

Mes mains, blessées et ternies par le sang, envoyèrent violemment valser ses doigts qui encerclaient mes joues et je la fusillai de mes prunelles, déclarant sur un ton empli de haine :

« - Que me caches-tu ? Cherches-tu à me défier ? »

Aguerta recula de deux pas, voulant mettre une distance convenable entre nos corps, mais je rompis cet éloignement rapidement, ma carrure surplombant la sienne, frêle.

« - Je suis ton allié. Je veux la même chose que toi : détrôner mon frère et instaurer une paix durable. »

Un rire amer sans joie s'échappa de mes lèvres déshydratées et gercées. Que de belles paroles venant d'une bouche beaucoup trop captivante.

C'était une sorcière. Satan. Et à ce moment précis, je ne prenais pas encore la véritable mesure de cette pensée acerbe.

« - Crache le morceau Aguerta ! Ou tu risques de perdre ta langue en me prenant pour un imbécile ! »

Je serrai les poings, me retenant de justesse et prenant mon mal en patience. Je voulais la dominer et je sentais qu'elle m'échappait. Son regard voulait tout dire.

Elle me filait entre les doigts. Et cela me mettait en rogne. J'aurai voulu la marquer. La posséder. L'achever pour son emprise sur mon esprit. Tel un ouragan dévastateur, mes dents ripaient les unes contre les autres, mes pensées fusant dans tous les sens.

Quelles origines ? N'était-elle pas celle pour laquelle elle se faisait passer ? M'avait-elle dupée ? Elle n'avait pas intérêt car je sentais déjà mes doigts se resserrer indéniablement sur le pommeau de mon épée recouvert de boue.

« - Ma mère la reine Marie était une sorcière. »

Je fronçai les sourcils, ses prunelles brillantes d'espoir que je la crois sans faire de dommages. J'avais déjà entendu cette histoire, ce récit raconté et écrit par nos anciens qui décrivaient un monde peuplé de sorciers gouvernant nos terres avant d'être exterminés par les humains et les Dieux.

« - Les sorciers ont été éliminés par les Dieux et les humains il y a plusieurs décennies, crachai-je.

- Pas tous Azgar. Ils se sont cachés et regroupés durant ces longues années et ont créé l'ordre des Suprêmes. Je les ai libérés. La seule preuve de leur existence et de leur ré-émergence est une prophétie qui m'est dédiée. »

Cette fois-ci un grognement de mépris sortit de ma gorge, accompagnant mon geste tandis que je me collai à son corps. À sa peau. À sa poitrine qui se soulevait rapidement.

Plusieurs mois auparavant, je n'aurai pas cru à son histoire. Qui l'aurait cru ? Des sorciers qui vivaient parmi nous ? J'en aurai ri et mit en doute la stabilité mentale de l'interlocuteur avant de le faire exécuter pour m'avoir fait perdre mon temps. Mais après les récents événements ... je ne pouvais qu'y songer avec plus de conviction. Je ne pouvais pas vivre dans le déni si mon peuple était en danger.

Des démons nous avaient attaqués sur le bateau et ma femme contrôlait le feu. Deux faits avérés auxquels j'avais assisté, impuissant. Et cela me sortait de mes gonds. Si elle disait vrai - et même si je priai de toutes mes forces pour que ça ne soit pas le cas - des sorciers s'étaient regroupés et avaient réussi à atteindre les plus hautes places de la hiérarchie.

Empires II : ConquêteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant