L'envol du Phénix [TOME 2]

LXV. Tout le monde est là où Hadès le veut

   Je me dirige à grands pas vers un jeune garçon brun. Les flammes du feu de camp dansent joyeusement. Les étoiles brillent plus fort qu'à l'accoutumer. Mon visage ne montre aucune émotion. Il dissimule à la perfection ma tempête intérieur. Lorsqu'il lève les yeux vers moi, il fronce les sourcils, se doutant que je ne lui apporte pas de bonnes nouvelles.

- Henry ? Suis-moi s'il te plait.

Il pose le morceau de bois qu'il s'appliquait à tailler et me suit. Je le guide dans une zone à l'arrière du camp pour que personne ne puisse nous écouter.

- Tout va bien Peter ? Demande-t-il.

- Henry, ai-je commencé l'air grave, les Indiens me donnent deux jours pour régler le problème. Sinon ils exécuteront ta famille, je suis désolé.

- Mais...mais... on peut aller les sauver, non ?

Je soupire profondément, mon jeu d'acteur est parfait. Il ne se doute de rien. Je ferme les yeux une seconde pour faire monter un peu plus la pression.

- Si c'est ce que tu souhaites, j'envois des garçons en mission de sauvetage. Mais je vais tout de même te prévenir, ce n'est pas sûr de fonctionner.

Il me dévisage, les yeux brillants. Je peux lire des dizaines d'émotions traverser ses iris marrons. Il déglutit et baisse la tête.

- Ça ne résoudra pas le problème de toute manière, souffle-t-il. Si on ne fait rien, Neverland mourra.

Je souris intérieurement, il est vraiment perspicace. Il est bloqué, il le sait. Seul deux choix s'offrent à lui, mais le désir de devenir un héros est trop fort.

- Je t'ai kidnappé Henry, c'est vrai. Mais je ne te forcerai pas à payer un tel prix.

- C'est quoi le prix ?

- Tu devras rester à Neverland pour toujours..., dis-je dans une grimace affligée.

Il hoche simplement la tête sans rien répondre. Je l'observe un moment avant de reprendre.

- Tu as ta famille, tu serais obligé de tout quitter mais... on pourrait être ta nouvelle famille ? Tu pourrais devenir un garçon perdu.

- Ça ne sera jamais pareil.

- Je sais...

- Je ne sais pas quoi faire, renifle-t-il. Je...je voudrais parler à Phénix.

Automatiquement, mon cœur s'emballe. Sans le vouloir, je mords ma lèvre. Je détourne les yeux pour reprendre contenance. Il ne s'est rien passé !

- Pourquoi ? Ai-je demandé un peu trop brusquement.

- Parce qu'il n'y a qu'elle qui me dira sincèrement comment est la vie ici.

J'acquiesce, ma lèvre toujours coincée entre mes dents. Des images virevoltent dans mon esprit et j'ai grande peine à les chasser.

- Donc je vais envoyer mes garçons. Mais je te le redis, il y a peu de chance qu'ils réussissent.

Je le laisse là et m'éloigne. Je reste quelques minutes seul afin de reprendre le contrôle sur mes émotions. Ce qu'il s'est passé en début de soirée repasse encore, encore et encore dans ma tête. Une boucle infinie que je n'arrive pas à faire dévier.

Elle m'a embrassée. Je sais qu'elle ne l'a fait que pour le jeu, que ça ne voulait strictement rien dire, il n'empêche qu'il s'est passé quelque chose d'étrange. Je n'ai jamais ressenti ça. Cette connexion...