L'envol du Phénix [TOME 2]

IV. Shérif

   Je me réveille doucement. J'ouvre les paupières et souris. Ho mes Dieux... je suis dans un lit ! Un vrai ! Ça fait ultra supra méga longtemps que je n'ai pas dormi dedans. Il est un peu dur et les couettes ne sont pas très chaudes mais ce n'est pas moi qui vais m'en plaindre.

   Je frotte mes yeux un peu bouffis qui doivent être rouges à ce moment. Je me suis accordée une nuit. Une seule, pour pleurer, me blâmer, me lamenter de cette dernière semaine. J'ai pleuré ma peine de cœur, ma famille, mon avenir incertain...

   Je suis loin d'être irréprochable. Je suis humaine. Je suis quelqu'un de fière, je ne montre jamais mes faiblesses. Enfin très rarement, et encore moins maintenant. On m'a donnée quelques indications mais je suis tout de même perdue, dans ce monde inconnu.

   Je me lève et m'habille. J'ai acheté des vêtements et un sac de voyage avec l'argent que j'ai volé hier. Mon estomac grogne, j'ai une faim de loup. Je laisse mes affaires dans la chambre et descends les escaliers pour arriver au comptoir.

   Une femme discute avec l'épouse de l'aubergiste. Cette dernière est blonde, un peu ronde mais possède un grand sourire contagieux. L'autre est fine et brune. Sa peau mate demeure dissimulée sous une épaisse cape violacée. Elle m'intrigue. Je m'approche des deux femmes pour payer ma nuit.

« Bonjour, m'accueille la blondinette. Votre soirée s'est bien passé ?

- Bonjour, très bien merci ! Ça faisait très longtemps que je n'avais pas dormi comme ça.

- J'en suis heureuse alors ! Savez-vous combien de temps vous resterez ?

- Non, pas du tout.

   Je sens un regard insistant sur moi. Je tourne la tête vers la femme brune, elle me dévisage. Je lui souris poliment et sors de quoi payer mes trois prochaines nuits. A peine ma bourse remise à ma ceinture que je la sens bouger. J'attrape vivement la main de la femme.

   Mon regard s'assombrit en un instant. Je la vois frémir. L'épouse de l'aubergiste compte mes pièces et ne remarque pas notre échange.

- Maman ! J'ai faim, dit une petite voix.

   Je fixe le petit garçon, pas plus âgé de deux ans qui tire sur la cape de sa mère. Ses yeux sombres font des allers venus entre moi et sa supposée mère.

~~~~~~

   Il fait chaud. Les flammes sont partout. J'entends des cris, des pleures...

   Un arbre s'effondre sur moi. Je saute pour l'esquiver. Mon instinct prend le dessus et je cours à travers les flammes. Je perçois une voix familière. Sans hésiter, j'avance vers elle. Entourée par le feu, je vois un petit garçon accroupi qui appelle sa maman. Il a peur, les larmes roulent sur ses joues couvertes de suie.

   Les flammes me barrent la route. Je me concentre, quelques secondes après, elles s'écartent et me laissent passer. L'enfant tourne la tête vers moi. Je le serre contre ma poitrine et plaque sa cape de couleur verdâtre contre son nez et sa bouche. Je lui fais un sourire rassurant et l'aide à se relever.

   Un arbre enflammé tombe sur nous. Le garçon hurle et je tends mon bras vers le tronc qui s'effondre vers nous. Une vague d'énergie me traverse et sort de mes doigts. Des flammes jaillissent et brisent le tronc, qui atterrit à nos côtés.

   Il écarquille les yeux vers moi avant d'être prit d'une violente quinte de toux. Je le prends dans mes bras et le soulève. Je m'élance dans les flammes qui s'écartent sous mon passage. La chaleur ne m'atteint pas, comme la cendre. Je me sens bien, mes sens sont en alerte. Une puissante énergie me traverse et guide mes pas vers un lieu sûr.