19 - Robin

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- Le shérif veut nous expulser de nos terres, Robin, m'expliqua Tiphaine, la femme du forgeron de Locksley. On n'a plus d'argent pour payer les impôts, notre fils, Edouard, est malade, il lui faut de la nourriture, mais nous n'avons rien... Robin ! Quand reviendras-tu ? Nous avons besoin de toi ! Pas seulement Gaël, Edouard ou moi, mais tout Locksley !

Je lui adressai un sourire réconfortant, réprimant ma grimace. Cette jeune femme d'une trentaine d'année repoussa une mèche de ses cheveux bruns attachés en chignon sur le dessus de sa tête. Un carré de tissu encadrait son crâne, la couvrant du Soleil. Sa peau tannée par ce même astre était ridée de fatigue, et lui donnait un air plus strict. Ses yeux marrons si vifs me scrutaient avec attention, attendant une réponse positive qui jamais ne viendrait.

Je ne pourrai jamais revenir, j'étais un voleur, un hors-la-loi, un mécréant, un fourbe, un tricheur, un menteur, une ordure, un malfrat, une abomination pour faire plus simple. J'étais la pire chose que Dieu ait créé selon notre bien-aimé shérif de Nottingham.

Encore une fois, c'était lui le responsable de leur malheur, et j'allais tenter d'aider Tiphaine, son époux, Gaël et leur fils, Edouard. Et comme à chaque fois, je ne promettais rien quant au succès de la future tentative.

Mais Tiphaine me demandait quelque chose d'encore plus compliqué, comparé à les aider à garder leur terre, cette tâche-là, de revenir, était impossible. Jamais je ne pourrais et même si je vainquais le shérif, en le tuant ou autre solution, je ne pourrais pas reprendre Locksley.

Je l'expliquai à Tiphaine qui s'agaça rapidement.

- Robin ! Ce sont tes terres, elles appartiennent depuis des générations à ta famille, les de Locksley ! Et les terres des Locksley comportent certes que quelques villages, mais la terre est fertile ! Tes terres sont fertiles ! Le shérif n'avait pas le droit de te les spolier.

- Techniquement, il ne me les a pas spoliées, comme tu dis, précisai-je. Tu sais très bien, toi comme tous les villageois de ces terres, qu'il a apparemment trouvé des preuves qui, je le cite, « compromettraient l'avenir de la couronne d'Angleterre et qui prouvent que les Locksley avaient pour but de tuer le roi Richard ». Bien sûr, mes parents avaient même tout un plan détaillé pour le tuer dans son sommeil, raillai-je. C'est sûr, ce n'est pas comme s'il nous dépossédait lui aussi de nos richesses... pour la croisade et pour défendre les terres de Philippe Auguste, roi des Français.

Tiphaine pinça les lèvres. Elle ne devait pas apprécier que je critique le roi Richard mais l'on ne pouvait cacher la vérité. Le roi Richard Cœur-de-Lion, fils du roi Henry II d'Angleterre et d'Aliénor d'Aquitaine – une grande femme –, il avait fortement récupéré les richesses du royaume pour partir en croisant pour la Terre Sainte. Croisade menée par Frédéric Barberousse, empereur romain germanique et roi d'Italie, accompagné de Richard Cœur-de-Lion mais aussi de Philippe Auguste pour reprendre Jérusalem aux mains de Saladin, le méchant de la croisade.

Sauf que pour se faire, il fallait de l'argent, et le roi Richard vida pratiquement tout le trésor de son père, les caisses de l'Angleterre, il libéra même le roi d'Écosse de son hommage contre de l'argent.

Il avait donc été accusé de négliger l'Angleterre, ce que l'on ne pouvait nier.

Alors certes, comparé à son frère, notre actuel roi Jean Sans-Terre, le roi Richard était mieux, mais il n'était pas parfait non plus et je l'appréciais peu. Mais j'aurais préféré qu'il restât en vie pour ne pas que Jean prenne le trône...

Le pire, c'est qu'ils n'avaient même pas repris Jérusalem.

Alors oui, Tiphaine n'était pas ravie.

Robin des BoisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant