54 - Marianne

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 Je fermai les yeux. Lentement. Mais les rouvris dans la seconde en sentant son souffle sur ma peau. Silencieusement, je repoussai les couvertures et marchai pieds nus sur le sol froid en pierre pour attraper un châle blanc en laine. J'avançai pas après pas jusqu'à la fenêtre et calai mon épaule contre la chambranle et observai le clair de Lune. Un léger vent joua dans mes cheveux et me fit frissonner.

Je regardai par-dessus mon épaule et les ronflements du shérif me parvinrent. Je soupirai doucement et posai ma tête contre le mur, en resserrant mon châle autour de mes épaules.

- Marianne ? Que faites-vous ? murmura le shérif.

Il s'était déjà réveillé... Avait-il senti mon absence ou l'avais-je réveillé en quittant le lit conjugal ?

Je sentis l'inquiétude dans sa voix. Touchée par sa bienveillance, je le rassurai d'un sourire et lui assurai qu'il pouvait aller se recoucher. Or, il ne m'écouta pas et entoura ma taille de ses bras, posant son menton sur mon épaule.

Une larme coula le long de ma joue, sans qu'il ne la remarquât. Cette tendresse... je voyais Robin à travers et mon cœur se serra.

Sa main caressa mon ventre et l'impression que, depuis ma disparition, le shérif avait changé s'intensifia. Il semblait plus assagi, oh, il était toujours aussi cruel sur les taxes et la population de Nottingham, mais avec moi... il était plus attentionné, plus protecteur. Chaque jour, il essayait de se faire pardonner. Depuis ces trois mois, il ne m'avait touchée qu'une seule fois, lors de mon retour. Les autres jours, il était aux petits soins avec moi, se contentant de dormir à mes côtés et de me rassurer sur mes cauchemars, qui concernaient Robin, Aurore. Son abandon, son rejet. L'enlèvement de ma fille... mon incapacité à pouvoir la voir.

Et c'était le shérif qui me consolait de cette peine de cœur sur l'homme dont il voulait le trépas... c'en était risible.

Les mains du shérif glissèrent sur mon ventre, inquisitrices et curieuses. Elles palpèrent par-dessus mon vêtements.

- Marianne ? chuchota-t-il surpris. Que ?...

Je fermai les yeux. Il me mettait face à cette vérité physique que je réfutais ; j'étais à nouveau enceinte. Et le shérif, euphorique, touchait en continu mon abdomen, persuadé que c'était son enfant, ne pensant pas un instant que cela ne pouvait pas être le sien.

Il resserra son étreinte, heureux et embrassa mon épaule. Son moment de sérénité et de joie fut interrompu par de violents coups sur la porte. Il grogna, et tout en se détachant de moi, il hurla à la personne d'entrer. Un garde, gêné et le souffle court bégaya :

- Navré de vous déranger monseigneur, mais Robin des Bois est dans nos murs.

Je sentis mon cœur battre plus vite. Robin... Robin dans nos murs... que faisait-il là ? Que voulait-il volait ? Mon Dieu, le shérif ne devait en aucun cas l'attraper. Mais qu'il était stupide de venir ici ! Il devait pertinemment se doutait que sa venue ne passerait pas inaperçue ! Tout le monde pensait qu'il m'avait enlevée ! Je n'avais toujours pas le cœur à rétablir la vérité... et encore moins le courage.

- Restez ici, Marianne, m'ordonna le shérif.

J'acquiesçai et, le regardant se chausser et enfiler un pull et son épée autour de sa taille, je m'assis sur le lit, inquiète. Je resserrai mes bras autour de ma poitrine, le châle se coinçant entre mes bras. La porte se referma sur le shérif et le garde qui courraient jusqu'à Robin. Le cœur serré, j'attendis, patiemment au début. Puis l'inquiétude grandit, et mon envie de savoir ce qu'il se passait augmenta. Je ne commis pas d'actes insensés et je restais difficilement sur le lit. La tête sur les oreillers, je me rongeai la lèvre jusqu'au sang.

Robin des BoisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant