58 - Marianne

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 Deux semaines. Deux semaines et il me manquait tant. Dieu savait à quel point j'avais espéré qu'il surgisse dans mes appartements. Mais il ne venait pas. Et la déception s'inscrivait peu à peu dans mon âme.

Je m'en voulais, d'avoir été aussi odieuse. Autant odieuse que lui. Non... Plus maintenant. Il avait essayé. Et bien que je lui en voulais encore... J'étais apte à l'écouter. Je crois même que j'en avais besoin.

Je renversai ma tête en arrière et enfouis mon visage sous l'eau. Je restai quelques secondes en-dessous, à l'écart de tous bruits. J'étais bien, en paix avec moi-même. Loin de tous problèmes. J'en venais presque à tout oublier. C'était reposant. L'eau coula sur ma peau quand elle rentra en contact avec l'air, me redonnant presque immédiatement tous les problèmes que j'avais.

Je sortis du bac d'eau chaude, la peau fripée et gelée face à ce contact d'air de même température. Les douces flammes dans l'âtre ne suffisaient pas à me réchauffer. Je me séchai rapidement, sans l'aide d'Isabelle qui s'était absentée et avait voulu que je l'attende pour qu'elle m'aide, à cause de ma grossesse. Je m'habillai seule et me couchai seule, sans l'ombre d'une seule personne désirée ou non.

Je ne savais pas ce qu'Isabelle était partie faire, et honnêtement, je m'en fichais pas mal. Je lui faisais confiance et n'avais pas de craintes quant à ses intentions. J'étais juste étonnée ; elle qui m'assistait dans pratiquement tous mes gestes pour me ménager, la voilà qui disparaissait mystérieusement.

Elle avait prétexté qu'une connaissance lui avait donnée rendez-vous, et que c'était extrêmement important. C'était sans doute un amant secret et je ne cherchais pas à m'interposer entre eux ou tout simplement satisfaire ma curiosité.

Elle faisait sa vie comme elle entendait. Si Isabelle était apte à prendre soin de moi, elle en était tout aussi capable pour elle-même. Je lui faisais pleinement confiance là-dessus, et je n'allais pas lui reprocher que son amant pouvait être un rebelle ; moi-même j'avais eu une liaison avec leur chef.

Robin... Tout me ramenait à lui ! Cela m'agaçait autant que cela m'attristait.

Couchée sur le lit, en simple chemise de nuit blanche, relevée sur une de mes cuisses, la fenêtre venait caresser ma peau, doucement, avec son air frais de nuit. N'arrivant pas à me concentrer sur ma lecture, encore et toujours à cause de lui, je refermai sèchement le livre et le posai sur la table à ma gauche.

Un petit coup à la porte résonna et je poussai un grognement, pour accorder ma permission à entrer.

- My Lady ? demanda Isabelle.

Je tournai mon visage vers elle, attendant patiemment la suite. Elle se dépêcha d'entrer. Là voilà qui revenait ! Moi qui m'attendais à la retrouver les joues rougies de bonheur, voire même essoufflée, je fus presque déçue de voir une mine aussi austère sur ses traits. Cependant, cela amena mon inquiétude ; j'espérais sincèrement qu'elle n'était pas souffrante ! Rapidement et mentalement, je me fis l'inventaire de ce qui lui faudrait pour soigner toutes sortes de mots.

Comme Isabelle restait trop silencieuse, je quittai les couvertures et m'avançai vers elle, une main sur mon ventre proéminent. Elle s'en affola immédiatement et me força à me rasseoir sur le matelas.

- Ne vous inquiétez pas pour moi, my Lady ! Je vais bien, mais...

Son regard se porta sur ma personne. Quoi ? J'allais bien ! Le bébé était en bonne santé, moi également. Je ne souffrais d'aucun manque de l'alimentation, et les nausées s'étaient calmées depuis un long moment. Au pire, seules mes sautes d'humeur me menaient la vie dure mais j'allais bien... Pourquoi un tel regard si angoissé ?

Robin des BoisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant