51 - Robin

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Petit Jean était à côté de Much et de James ; à ma droite, Allan et Will attendaient avec la même inquiétude. Nous étions au sol ; Richard était dans la cabane avec Arthur. Ce dernier faisait tout pour lui sauver la vie. Arthur avait pris deux secondes pour me dire qu'il y avait une chance. Je n'étais pas arrivé trop tard. J'étais arrivé à temps pour le sauver. Il y avait une chance.

Richard ne mourrait pas.

Il ne devait pas. Oh non ! Il n'avait pas intérêt à mourir. Il me devait des explications. Et ensuite, je le tuerais. Moi, pas le shérif qui mourrait également de ma main.

- Où est Mary, Robin ? demanda Allan.

- Mary ? ris-je cynique. On s'en fiche de Mary.

Je sentis leur regard surpris. Quoi ? J'avais le droit. Elle m'avait menti. Délibérément qui plus est ! Elle m'avait caché qu'elle était Lady Marianne... Tant de fois, je l'avais cherchée. Tant de fois, elle l'avait su ! Tant de fois qu'elle aurait pu me le révéler... J'avais le droit de lui en vouloir.

- Elle est toujours en vie, consentis-je à ajouter sèchement.

Je ne pouvais pas l'empêcher, ce ton si sec et si dur. Elle était Lady Marianne ! Et Richard devait le savoir ! Bon sang, c'était évident qu'il savait ! Je n'avais aucune preuve, mais je le sentais.

- Où est-elle ? insista le ménestrel.

Je ne répondis pas ; je ne voulais pas laisser exploser ma colère sur lui. Il n'y était pour rien. Mary nous avait tous mentis. Et puis, elle devait être bien heureuse là où elle était désormais ! Elle avait retrouvé son bâtard de mari. Elle avait retrouvé ce luxe puant de richesses. Non, tout allait bien pour elle, désormais.

- Robin ! s'énerva Allan.

Will tenta de le calmer, doucement, mais il n'eut le droit qu'à un rejet physique et violent. Tout le monde était à cran. Eux, ils voulaient tant savoir ce qu'elle était devenue, ils avaient tellement peur pour Richard, pour elle. Et moi... À bout de nerf, je lui hurlai :

- À Nottingham ! Et elle y est très heureuse ! Crois-moi, crachai-je en fin de phrase.

Ils blêmirent tous, mais Will et Allan furent les plus surprenant, notamment ce dernier. Il se leva d'un bond et marcha dans tous les sens sous notre regard étonné. Il grogna, s'arracha les cheveux, marmonna dans sa barbe naissante. J'en avais perdu de ma verve.

Ils n'étaient pas choqués... Pas comme Petit Jean et Much. Non, eux, ils avaient juste peur. Pas de sentiments de trahison, de colère, d'incompréhension.

- On doit aller la chercher ! s'exclama-t-il.

- Ce n'est pas nécessaire, si tu veux mon avis, sifflai-je, ma colère revenant.

- Tu ne comprends pas !

- Au contraire ! criai-je. Elle n'a jamais été Mary ! Cette femme a toujours été Lady Marianne ! Qui sait la véritable raison pour laquelle elle était ici ! Sans doute pour tout révéler à son bâtard de mari !

Allan me dévisagea, furieux tandis que Petit Jean lâchait un petit « Quoi ? » ahuri. La respiration rapide, le ménestrel s'avança vers moi et me planta son index dans le torse. Alors qu'il s'apprêtait à parler, Will intervint brusquement :

- Tout le monde se calme, d'accord ? Et Robin, tu vas nous faire le plaisir de t'expliquer.

Sa voix était cassante, cassée, pressée, peureuse. Il se contenait pour savoir exactement les événements qui s'étaient déroulés il y avait peu.

Je les regardai tour à tour dans les yeux. La stupéfaction primait sur tous les autres sentiments, mais la trahison n'était pas loin derrière. La colère m'habitait, ces autres émotions m'avaient quitté quand j'étais rentré au camp, avec un Richard mourant sur mon cheval pris pour les rejoindre au plus vite.

Robin des BoisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant