47 - Robin

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Février 1214. À mon avis, le début de la fin. Petit Jean n'est toujours pas d'accord avec moi, malgré les interminables conversations que nous avons, agaçant nos amis au plus haut point.

Environ cinq s'étaient déroulés et, de mon point de vu, tout avait changé, mais tout se ressemblait encore.

Mary m'évitait, avec brio je devais le reconnaître. Les fois où je tentais de lui parler de ce que je lui avais dit, ou de lui parler tout court, elle trouvait toujours une solution, une chose à faire pour repousser la discussion. Parfois l'infirmerie, d'autre Aurore, un beau bébé de cinq mois qui commençait à voir ses dents pousser, provoquant des nuits difficiles pour elle et sa mère, sans oublier Constance et Éléonore qui supportaient elles aussi les pleurs et les angoisses de la jeune maman.

Elle m'évitait peut-être dans le but de détruire mes sentiments, ou au moins de les atténuer, mais comme je l'avais dit, la voir chaque jour, toujours un peu plus belle et libre, ne faisait qu'augmenter mon amour pour elle. Je savais très bien que j'en étais même ridicule, et mon frère avait remarqué mon changement de comportement. Selon lui, j'étais plus fleur bleue, plus ridiculement niais.

Elle avait beau me fuir, quand nous étions contraints d'être proche physiquement, elle tenait un parfait masque d'émotions. Elle était toujours aussi douce, gentille, mais elle ne se laissait toujours pas marcher sur les pieds. Face à moi, elle n'avait pas changé. Personne ne remarquait la tension, la distance qu'elle avait instauré entre nous deux. Elle était douée, je ne savais pas où elle avait appris cela, mais elle était aussi neutre qu'une noble sous son masque. Si bien qu'aux yeux des autres, notre relation était toujours au même stade. Allan se permettait même de continuer à me taquiner là-dessus, m'encourageant à m'installer avec Mary et Aurore dans une cabane qui nous serait propre.

Bien sûr, ses remarques me faisaient prendre conscience que ce que j'avais remarqué il y a cinq mois était visible aux yeux de tous les autres depuis presque le début. Allan avait été un des premiers à remarquer que nous irions bien ensemble.

Concernant l'avancée du camp, toutes les cabanes étaient finies. Nous en avions construit une vingtaine en plus après avoir terminé celles prévues au début et tout le monde était installé avec la personne qu'il voulait. Les sommiers avaient bien avancé, et la plupart était construit, et supportait le poids des dormeurs.

Pour en revenir à ce février 1214, c'était la date où le roi Jean avait débarqué à la Rochelle, en France pour conquérir ce royaume avec l'aide d'Otton IV, empereur germanique. J'ignorais quel était leur plan et s'il réussirait, mais j'étais certain d'une chose : si le souverain anglais ne réussissait pas, il pourrait y avoir de grandes conséquences sur son règne. Le peuple était au bord de la rupture, et chaque acte fait ne l'aidait pas.

Si j'avais été roi, jamais je ne serais parti en guerre malgré les tensions à cause de la pauvreté du royaume. J'aurais fait en sorte de relever son économie, pas de la détruire encore plus. Quant aux tensions entre royaumes et dirigeants, j'aurais fait en sorte de les apaiser.

Aujourd'hui, je chassai avec plusieurs autres personnes. Les deux lapins que j'avais accrochés à ma ceinture ne suffiraient pas à nourrir tout le camp, et je pistais un sanglier. Les alentours étaient silencieux, chaque homme guettant les environs verts avec la plus grande concentration. Mon arc en main, j'avançais d'un pas souple et léger, me fondant dans la forêt sans difficulté.

La piste était fraîche ; entre les branches brisées, les quelques empreintes de pas entre la mousse, l'herbe et les feuilles, mais aussi le tronc éventré à vif, trouver le chemin était chose aisé. Mais je préférais prendre mon temps et ne pas me jeter sur le sanglier qui devait être à une centaine de mètres plus loin et ainsi ne pas mourir, une défense dans le ventre. De toutes les proies, c'étaient bien les sangliers les plus dangereux, surtout une mère qui défend ses petits.

Robin des BoisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant