43 - Robin

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- Jamais je n'aurais pensé que les rumeurs soient vraies, soupira Isabelle.

Je lui offris un sourire qui ressemblait plus à une grimace. Elle glissa un bout de pain entre mes lèvres que je mâchais avec difficulté. Ses cheveux blonds comme les blés étaient rassemblés sur le haut de son crâne mais certaines mèches retombaient devant ses yeux. Sans cesse, elle les dégageait mais elles revenaient inlassablement.

Un plateau dans les mains rempli de victuailles et d'un verre de lait, Isabelle était venue m'apporter le repas du prisonnier par modération et me faisait la conversation, ou pestait sur ces rumeurs véridiques.

- Vous vous êtes vraiment fait prendre ?

- Je suis devant vous, remarquai-je.

Elle grogna et me donna un bout de ce pain sec puis me fit avaler une gorgée de lait. Elle continua tout le long de la conversation.

- Comment va Lady Marianne ? demanda-t-elle.

Je fronçai les sourcils. Pourquoi me demandait-elle ceci ? Comment pourrais-je le savoir ?

- Elle n'est pas au camp, répondis-je en utilisant ma voix la plus douce.

Surprise, elle se figea, un morceau d'une pomme ridée à deux doigts de mes lèvres qui salivaient du sucre de ce fruit – même s'il commençait à dater.

- Comment cela, « elle n'est pas au camp » ?

- Lady Marianne n'est pas avec les rebelles, Isabelle...

Distraite et confuse, elle appuya ma nourriture contre les lèvres que j'ouvris avant qu'elle ne la lâchât. Son visage reflétait son inquiétude. Perdue, elle me nourrit machinalement. Son attitude m'intriguait ; certes, je savais qu'auparavant, Isabelle était une de ses servantes, Mary en faisant partie aussi, mais il devait y avoir autre chose...

- Pourtant... pourtant vous avez dit au shérif qu'elle se trouvait là-bas...

Oh, alors ces rumeurs étaient parvenues à leurs oreilles. Donc maintenant, tout Nottingham devait le penser. Néanmoins, je comprenais donc sa réaction.

- J'ai menti, annonçai-je en murmurant.

- Pourquoi ? s'énerva-t-elle.

- Parce que...

Je ne terminai pas ma phrase et regardai par-dessus son épaule ; il n'y avait personne mais cela ne m'étonnerait pas si, derrière la porte qui était devant moi à plusieurs mètres, quelqu'un se cachait pour écouter notre conversation. Peut-être qu'Isabelle était là pour gagner ma confiance afin d'en apprendre le plus pour tout répéter au shérif. J'avais déjà été stupide pour lui avoir dit à propos de Lady Marianne, et je ne voulais pas prendre encore plus de risque.

Isabelle comprit ma retenue et hocha simplement la tête.

- Vous avez raison, souffla-t-elle. On ne sait pas ce qui se cache derrière ces murs.

Elle me sourit, comme pour m'assurer qu'elle ne m'en voulait pas et posa le plateau vide sur la table. Elle attrapa ensuite une bande de tissu qu'elle plongea dans l'eau pour venir nettoyer mes blessures sanguinolentes sur mon torse. Elle faisait du mieux qu'elle pouvait, mais ce n'était pas en nettoyant le sang qu'elle me guérirait. Mais je n'allais pas la blâmer, elle m'aidait en faisant ceci, j'avais déjà l'impression d'être plus propre.

- Pourquoi ? interrogeai-je en désignant du menton ses gestes.

- Le shérif ne veut pas que vous mourriez maintenant, il veut d'abord savoir où est Lady Marianne et votre camp. Ensuite, il vous tuera. Vous êtes la mine d'information la plus précieuse, et il sait tout ce qu'il pourrait en tirer, ajouta-t-elle sans relever le visage baissé sur mes plaies.

Robin des BoisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant