En temps normal, les vestiaires représentent une véritable épreuve, pour moi. Je ne peux empêcher mes yeux de s'attarder sur les corps de mes camarades de classe, ayant du mal à refouler ma jalousie face à l'absence de bourrelet ou de cellulite... C'est souvent le pire quart d'heure de la journée car après ça, je me trouve souvent moche, grosse et repoussante.
En général, je passe ensuite l'heure de sport à maudire intérieurement ces filles minces aux fesses bien moulées dans leurs leggings branchés et flashy. C'est clair qu'en comparaison, mon vieux jogging Domyos effiloché fait pâle figure. Merci maman de ne pas avoir voulu m'en acheter un nouveau ! Et d'abord, depuis quand la mode s'intéresse-t-elle aux vêtements que l'on met pour transpirer ? Franchement, si c'est pas la preuve que notre monde part complètement en vrille...
Enfin, aujourd'hui, c'est différent. Les pensées négatives ne font qu'effleurer mon cerveau, tant je suis remontée contre Sarah. Une fois arrivée aux vestiaires, je ne prête même pas attention aux autres et fonce droit sur mon amie en criant son nom, mais celle-ci continue de m'ignorer royalement tout en enfilant sa tenue de sport. Ce vent monumental déclenche quelques gloussements parmi nos camarades.
— Regarde, on dirait qu'on a affaire à une dispute de boudins ! ricane Sandy en poussant Allison du coude.
— Moi, je mise sur le plus gras des deux, lui répond son interlocutrice, déclenchant l'hilarité de leur petit groupe de pétasses.
— Ouais. Go, Sarah ! On est derrière toi ! Baston de boudins ! Baston de boudins !
Mon amie pousse un long soupir d'exaspération avant de dire :
— Mêlez-vous de vos affaires, ça changera !
L'intervention de mon amie déclenche un long "ouh" général.
— Bah dis donc, c'est que notre gros boudin se rebelle, ironise Allison. Dommage que ta répartie soit planquée quelque part avec ton sens de la diététique.
Comme si elle avait balancé la vanne du siècle, elle conclut cette réplique en tapant dans la main de Sandy, laquelle n'a même pas dû comprendre le sens de ces mots au vu de son QI limité (ça se voit à son grand sourire niais).
— Oh, ta gueule, Allison, intervient Aya, une autre fille de notre classe un peu garçon manqué sur les bords.
— Elle a quelque chose à dire, la lécheuse de minous ?
— Ça suffit ! intervient Tricia. C'est homophobe, ça, Allison.
— Laisse tomber, meuf, fait Aya. Je préfère être lesbienne qu'avoir un prénom sorti tout droit d'une télé-réalité !
Cette dernière réplique sonne comme une déclaration de guerre, et voilà que les deux se mettent à se disputer en haussant le ton de plus en plus fort. Franchement, je décroche complètement de leur prise de bec, trop contente de voir l'attention générale se détacher de nous.
— C'était bien trouvé, ça, de la part d'Aya, marmonne Sarah. Je le pensais mais j'osais pas le dire.
— Ça y est, tu me fais plus la tête ? je demande, pleine d'espoirs.
Elle hausse les épaules.
— Je boude pas ! C'est juste que... Écoute, hier, c'était bizarre. Cette Marjorie, je la sens pas. C'est une vraie garce ! Je lui fais pas confiance.
— Je suis désolée, mais qu'est-ce que tu veux que je fasse ?
— Ce que je veux, c'est que tu te mettes pas à devenir une pétasse parce que tu la fréquentes, c'est tout.

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Banale !
Teen FictionDepuis toujours, Nathalie a la sensation d'appartenir à la catégorie des "personnages secondaires". Lycéenne timide, sans saveur, aux parents et à la vie terriblement ordinaires, elle n'a rien d'une héroïne ! Plutôt que de se résigner, elle décide...