Banale !

59. Tricinvasion

Tétanisée telle un Chenipan face à Rapasdepic, je reste sans réagir. M'imaginant presser de toutes mes forces sur le bouton "A" afin de prendre la fuite, je commence à faire un pas en arrière histoire de m'éloigner le plus possible de la harpie.

Mais avant que je ne puisse reculer davantage, voilà que Cat surgit de nulle part devant Sarah et moi en criant nos prénoms.

Fuite impossible !

La blonde nous emprisonne en un câlin général qui manque de m'étrangler.

Catherine lance "Étreinte" !

Pendant cette accolade forcée, mes yeux glissent à nouveau sur le Rapasdepic de service, mais il s'avère que celle-ci, en train de rire aux éclats, la main posée sur l'épaule du footeux, s'est désintéressée de ma personne.

Le Rapasdepic s'enfuit !

Un long soupir de soulagement s'échappe de mes poumons tandis que Cat nous relâche enfin, non sans me lancer un long regard empreint de jugement. Après m'avoir dévisagée de haut en bas, la fashionista fait claquer sa langue contre son palais d'un air désapprobateur.

— Dis donc, dis donc, Nat... C'est quoi cette dégaine ?

Je jette un coup d'oeil coupable à ma tenue du jour : depuis que je suis devenue la cible principale des attaques de ma classe, j'admets être peu à peu retournée à mes vieux démons, enfilant des vêtements discrets en espérant qu'ainsi, mes camarades me laisseraient tranquille.

— Je pensais qu'avec des fringues passe-partout, les autres me ficheraient un peu la paix..., je hausse les épaules.

La blonde croise les bras puis me demande en arquant un sourcil :

— Et du coup ? Ça a marché ?

— Pas vraiment..., je grimace.

— Bien entendu que ça marche pas ! Tu veux mon avis ? Cette fille qui te harcèle, là, Tricia, c'est une vieille jalouse. Elle s'en est déjà pris à Miléna pour la même raison ! Tu comprends ?

— Tricia ? je répète en clignant des paupières, incrédule. Jalouse de moi ? Je pense que tu te trompes, c'est pas le genre à...

— Bien sûr que oui ! me coupe-t-elle. C'est tellement évident ! Quand elle t'a vue débarquer avec tes nouveaux vêtements, toi, le vilain petit canard devenu un cygne rayonnant, elle t'a enviée, ni plus, ni moins ! Donc en reprenant ton ancien look, tu entres dans son jeu. Pire, même : tu lui signifies sa victoire sur toi.

Sarah pousse un cri de triomphe en entendant ça.

— Ah, tu vois ! J'te l'avais dit, Nat, que c'était stupide ! Merci de la raisonner, Cat ! Toi, au moins, elle t'écoutera.

Elle ponctue cette phrase en tapant la paume de la fashionista.

— Et du coup..., je demande d'une petite voix. Comment elle s'est débarrassée d'elle, Miléna, au juste ?

— Allons lui demander directement.

Sans attendre de réponse, elle m'entraîne vers le canapé où les deux aspirateurs de glotte s'avèrent lancés dans leur activité favorite, à tel point qu'elle se voit obligée de se racler la gorge histoire de capter leur attention.

— Oh, ça alors ! s'exclame la grande brune en me voyant. Ça va, Nathalie ? Non, attends : réponds pas. Avant tout, je voulais que tu saches que je t'ai beaucoup défendue pendant l'histoire de Rateaulie, et que j'ai laissé personne dire du mal de toi en ma présence.

Tandis qu'elle dit ça, Morgan hoche gravement la tête.

— Ça, ouais..., confirme-t-il. Elle était sacrément reloue, même.