62. Retour de boomerang

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Les élections se déroulent dans le gymnase du lycée, lequel a été aménagé pour l'occasion : des isoloirs de fortune ont été montés, de même qu'une petite estrade où les candidats auront une dernière chance de s'exprimer ainsi que de convaincre le reste des élèves de leur accorder leur vote.

Au moment où nous parlons, c'est Aya qui s'y trouve, haranguant la foule de son agressivité toute Ayaesque sur ses sujets préférés, à savoir la cause LGBT, l'écologie ou encore les menus végétariens à la cantine.

A cet instant, je dois admettre que j'ai du mal à contenir le grand sourire qui s'affiche sur mes lèvres. Pas seulement parce que j'approuve les revendications politiques d'Aya, mais parce que juste après elle, c'est Tricia qui sera sur scène.

Or, Marjorie et moi avons programmé l'heure de publication du prochain numéro lors de son passage, de sorte à ce que les mensonges de la déléguée soient révélés au grand jour pile au moment où elle s'exprimera.

— T'es bien la seule tarée qui a l'air d'aimer être ici aujourd'hui, m'apostrophe Adam, assis à côté de moi sur les gradins.

— T'apprécies pas cette ambiance électorale ? je m'enquiers distraitement.

— Ça me gonfle.

— T'inquiètes, d'ici quelques minutes tu vas kiffer ta race, je réponds avec un large sourire.

Le chevelu hausse les sourcils.

— J'en déduis que Mattéo n'a pas réussi à te détourner de ton "plan Triciannihilation". Elle va prendre cher, j'espère ?

Je préfère demeurer énigmatique afin de conserver le suspens, cela dit le rictus que je lui adresse doit être suffisamment évocateur car j'aperçois le même se dessiner sur ses lèvres.

— Tu vas voter pour Aya, toi aussi ? je lui demande.

— Ouais. Et toi, tu vas voter pour Antoine, je parie ?

Je tressaille en entendant ces mots.

— Qu'est-ce qui te fait dire ça ?

— Chaque fois qu'il a ouvert la bouche pendant cette campagne, t'avais un air benêt. Le même air benêt que t'avais quand tu matais Mattéo, avant.

Le chevelu a ponctué cette phrase d'un regard suspicieux.

— N-N'importe quoi ! je balbutie, ricanant malgré moi.

Je tâche de dissimuler ma gêne en remettant mes cheveux en place. Heureusement, Adam n'insiste pas, cependant je vois à la façon dont il me dévisage qu'il n'est pas dupe.

Je sais ce que vous vous dîtes... Mais non, je n'ai pas craqué pour Antoine. Cependant, je dois admettre que depuis que Tricia a enclenché sa vendetta à mon encontre, le footeux a été le seul individu à prendre ma défense. Et puis, il a quand même un sourire plutôt ravageur.

Toutefois, si je le regarde pendant les heures de cours, c'est uniquement car je suis une esthète dans l'âme : mes yeux aiment contempler la beauté. Qu'y a-t-il de mal à cela, au juste ?

— Je vais voter Aya, je proteste. Antoine est peut-être mignon, sauf qu'il a aucune idée concrète.

— Bien sûr ! ironise le chevelu en roulant des yeux. J'en crois pas un mot, mais soit.

— Oh, et puis zut, occupe-toi donc de ton fion, va ! Ou, en l'occurrence : de ta Fiona !

A peine ai-je prononcé ces paroles que le smartphone du chevelu vibre. Celui-ci le sort de sa poche et se met à tapoter sur le clavier.

Banale !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant