Si Sarah peine à convaincre ses parents d'accepter l'invitation des garçons pour le nouvel an, il en est autrement en ce qui concerne ma famille ; à vrai dire, mes parents semblent si heureux à l'idée que je passe la Saint-Sylvestre loin d'eux que j'en serais presque vexée. A croire qu'ils espéraient se débarrasser de moi depuis belle lurette !
Honnêtement, ça doit être la première fois de ma vie que j'attends les vacances de Noël avec impatience. C'est vrai, quoi : en temps normal, il s'agit d'une période particulièrement ennuyante, à larver sur le canapé devant des feuilletons ou des dessins animés tout en s'empiffrant de papillotes.
La seule source d'excitation étant étroitement liée à la présence d'Aurore qui se trouve, je vous le rappelle, en Angleterre, mon espoir de vivre des fêtes distrayantes s'avérait assez limité.
Or, au final, l'absence de ma cousine se révèle plutôt bénéfique : à présent, ma figuration est bel et bien terminée ! Je refuse d'endosser encore ce rôle de faire-valoir ambulant dont l'insipidité ne sert qu'à la mettre en valeur !
Non, cette année, mon programme sera visiblement assez chargé : entre les devoirs, les joggings en compagnie de Marjorie, mon personnage à monter sur World of Warcraft, le repas de Noël, ce à quoi s'ajoutent les sorties que mes amis ne vont probablement pas tarder à prévoir... J'ai du mal à le croire, mais je suis en train de devenir une adolescente très occupée.
Le tout additionné à l'excitation naturelle que l'on ressent à l'approche des fêtes, je dois admettre que j'ai l'impression de voir les jours défiler à vitesse grand V.
— Nathalie ! Ça y est, ça fait quarante-cinq minutes !
La voix de Marjorie interrompt le fil de mes pensées.
— Quoi, déjà ? je m'exclame.
Comme chaque samedi matin depuis un mois, la harpie et moi nous sommes retrouvées à la Citadelle afin de nous adonner à un jogging matinal.
— On court depuis trois quart d'heure et je suis à peine essoufflée ! je m'étonne. Si ça se trouve, je peux pousser encore un peu...
— T'as fait des progrès, reconnaît mon coach. Cela dit, évite d'abuser, il vaut mieux arrêter là.
— Oh, allez, je veux essayer d'atteindre les soixante minutes ! j'insiste.
La girafe à frange fronce les sourcils avant de s'arrêter d'un coup, m'obligeant à l'imiter à contrecoeur.
— Je peux savoir d'où te vient cette soudaine envie de repousser tes limites ? s'enquiert-elle, suspicieuse. D'habitude t'es plutôt une partisane du moindre effort.
Connaissant la perspicacité sans borne de la harpie, je préfère éviter de la regarder en face de peur qu'elle lise dans mes pensées.
— C'est à cause de ta pesée de lundi, c'est ça ?
Je ne peux m'empêcher de tressaillir en l'entendant énoncer cette vérité à voix haute, puis me demande sérieusement si Marjorie ne serait pas télépathe...
En effet, ma défaite cuisante face à la balance de lundi m'a davantage affectée que je n'ose l'admettre, me poussant à redoubler d'efforts quant au contenu de mon assiette ou lors de mes joggings. D'ailleurs, Sarah n'a pas cessé de lever les yeux au ciel en claquant sa langue contre son palais afin de montrer sa désapprobation...
Mon coach n'a nullement besoin de réponse ; mon long silence lui suffit à comprendre qu'elle a vu juste.
— Bon sang, Nat, je t'ai déjà expliqué que c'était super fréquent, ça ! soupire-t-elle, exaspérée. Le muscle pèse plus lourd que la graisse, du coup ça arrive de prendre du poids, à partir du moment où on entame un rééquilibrage alimentaire en faisant du sport. Sauf que c'est pas de la graisse, que t'as pris, espèce de quiche ! C'est du muscle. Ton corps s'est affermi. Et puis, de toute manière, les régimes, c'est jamais miraculeux, il faudra prendre ton mal en patience !
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Banale !
Fiksi RemajaDepuis toujours, Nathalie a la sensation d'appartenir à la catégorie des "personnages secondaires". Lycéenne timide, sans saveur, aux parents et à la vie terriblement ordinaires, elle n'a rien d'une héroïne ! Plutôt que de se résigner, elle décide...