54. Le kigurumi, c'est sexy

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Ma mère ne prononce pas un mot durant le trajet retour jusqu'à notre domicile, ce qui, en soit, constitue un véritable exploit vu la pipelette qu'elle est en temps normal. A vrai dire, ce mutisme cumulé à son air fermé sont deux indices révélateurs de la gravité de la situation dans laquelle je me trouve.

— Maman..., je me lance après une longue hésitation.

Sauf qu'un simple regard en biais de sa part suffit à m'interrompre. Nous poursuivons donc la route dans un silence de mort et, une fois arrivées à la maison, la Grande Inquisition Maternelle se contente de m'ordonner de monter dans ma chambre sans tarder.

— J'ai quand même le droit de passer aux toilettes avant ? je plaisante.

Cette boutade me vaut une baffe. Comme ça, sans préavis.

— Pas la peine de faire ta maligne ! s'écrie ma daronne. T'as vraiment pas de quoi être fière de toi, aujourd'hui, Nathalie ! T'en prendre à Mattéo de cette manière... Franchement, je te reconnais plus, ces temps-ci ! Ton père et moi avons été patients jusqu'ici... Mais là, ta petite crise d'ado commence à nous taper sur le système ! Tu dépasses carrément les bornes !

J'amène la main à ma joue meurtrie. La gifle n'est pas très douloureuse, en soit, c'est surtout mon ego qui en a pris un coup.

Des larmes de honte ainsi que de colère me montent aux yeux et, après un ultime regard noir, je me dépêche de dévaler l'escalier puis de claquer la porte de ma chambre.

Je me dirige de manière machinale sur l'ordinateur et constate en ouvrant Facebook que j'ai été notifiée des dizaines de fois. C'est ainsi que je tombe malgré moi sur le fameux post qu'a publié Anaïs ce matin pendant la récréation :

 C'est ainsi que je tombe malgré moi sur le fameux post qu'a publié Anaïs ce matin pendant la récréation :

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Malgré l'avertissement de Raphaël, je ne peux m'empêcher de me sentir blessée. C'est la première fois de ma vie que l'on parle de moi sur un réseau social or, ironie du sort, il se trouve que c'est pour me tourner en ridicule.

Ma raison me dit de fermer cette page, d'arrêter de lire ces commentaires nauséabonds pourtant, sans que je ne m'explique pourquoi, il m'est impossible de cesser mon scrolling afin de voir tout, absolument tout ce qui est dit à mon sujet.

Peut-être suis-je masochiste, ou peut-être que les haters sont semblables à une drogue à laquelle il est complexe de renoncer.

Une vibration de mon téléphone finit par m'arracher à ce lynchage numérique hypnotique et un faible sourire se dessine sur mes lèvres en constatant qu'il s'agit d'une notification WhatsApp :

→ Mattéo vous a ajoutée à la conversation "Beauty & the Geeks".

Mattéo :
La revoilà parmi nous 😉

Sarah :
Yay ! 🙆

Après mûre réflexion, je décide en premier lieu de m'excuser.

Banale !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant