Bien sûr, Malefoy n'est plus là.
Ce qu'il y a à la place, c'est la réponse à un petit mystère : Luna, assise les jambes croisées par terre et le dos au mur. Elle tient un épais rouleau de parchemin couvert d'une écriture dense de sa main gauche, et sa baguette dressée dans la droite. De la lumière, si épaisse qu'elle est presque tangible, part de sa baguette vers le plafond et redescend en cascade à gauche et à droite d'elle. Harry comprend qu'elle est en train de créer une barrière des deux côtés du couloir pour empêcher quiconque d'entrer dans cette section.
Quiconque, à part ceux qu'elle a justement laissés entrer.
Luna relève la tête avec un sourire séraphique.
— Bonjour, Harry. Tu as passé un bon été ?
— Heu, dit Harry avec hésitation.
Il admettrait sans qu'on le presse trop qu'il aime beaucoup Luna, mais parfois il n'arrive pas à dire si elle est stupide ou si (et c'est plus probable) elle pense que c'est lui qui est stupide et veut lui faire comprendre quelque chose sans avoir à le dire directement. L'été est passé dans un tourbillon de jugements, les méchants ont été envoyés expier leurs crimes et c'est l'apothéose de mois de préparation pour s'assurer que justice soit rendue, et rendue en public. Est-ce que c'était bien ? Harry pense que oui, la plupart du temps.
— Je crois. Heu, qu'est-ce que tu fais, Luna ?
Luna a l'air surprise qu'il ait besoin de demander ;
— Oh, je lis juste une lettre que Rolf m'a envoyée, tu sais.
Harry manque tomber dans le piège de demander qui est Rolf et qu'est-ce qu'il a à voir avec tout ça, mais il l'évite avec un talent consommé.
— Non... le sortilège.
— Oh ! Ça ? Je rends juste service à un ami.
Harry attend.
— Tu as besoin de quelque chose ? demande Luna.
Elle penche la tête de côté comme si elle était en train d'écouter quelque chose que Harry ne dit pas.
— Il te pardonnera, tu sais, Harry. Il faut juste que tu lui donnes un peu de temps.
Harry se demande de qui elle parle – ce serait très agaçant si c'était de Malefoy, se dit-il, alors la loi de l'emmerdement maximal garantit que c'est exactement de lui qu'elle parle.
— Je cherche Malefoy, dit-il en essayant de ne pas être agacé quoi qu'il en soit.
— Oui, je sais, dit Luna en regardant autour d'elle comme si Malefoy se cachait peut-être dans un coin quelque part. Mais il n'est pas là, dit-elle au cas où la porte ouverte n'ait pas été assez enfoncée.
— Il me pardonnera ? répète Harry.
Son visage est soudain brûlant et ses nerfs crépitent d'indignation.
— Tu ne le veux pas ? demanda Luna avec gravité.
Harry déglutit avec peine et essaie de passer outre le nœud d'émotions qui semble constamment coincé dans sa gorge.
— Malefoy peut aller se faire foutre.
— Je suis sûre qu'il peut, répond Luna avec un parfait sérieux. Mais Harry, est-ce que c'est ce que tu veux ?
Et là – et encore une fois, comme c'est Luna, Harry n'arrive pas à dire si elle a d'un coup oublié pourquoi elle maintenait ce sortilège ou si elle essaie de lui enseigner une leçon obscure – elle arrête son sort de barrière.
Harry assimile le fait que le monde sorcier au complet semble s'être réuni dans ce train, tous assis dans le couloir à attendre une chance de pouvoir le tripoter, et il bondit vers la porte du compartiment, en tirant Luna à sa suite et en claquant la porte dans un bruit sonore.
Zabini réagit avec une célérité et une perspicacité surprenante : il est sur ses pieds et fortifie le sort de verrouillage d'Harry – et opacifie le verre de la porte en même temps – presqu'avant que Harry ait fini de le lancer. Il jette un regard réprobateur à Luna.
— Ne me regarde pas ainsi, Blaise, dit-elle avec sérénité.
Et puis elle se tourne vers Harry :
— Ils veulent juste te dire bonjour, tu sais.
Elle s'assied à côté de Pansy.
— Ce sont juste des gens.
— Mais je n'en connais pas la plupart, dit Harry.
C'est vrai : il n'a reconnu presque personne dans la foule. Ça lui fait un drôle d'effet de se dire que les gens qu'il connaît le mieux à l'école sont ceux qui se trouvent dans ce compartiment avec lui.
— Tu ne les connais pas encore, dit Luna gaiment. N'est-ce pas merveilleux que tant de gens se soient inscrits à Poudlard parce qu'ils veulent te rencontrer, Harry ?
Et avant que Harry puisse répondre que non, ce n'est pas merveilleux du tout, elle lève sa baguette.
— Ce n'est pas bon de rester dans le noir, Harry. Ça favorise les ombres douées de conscience, dit-elle en faisant disparaître le volet.
À l'extérieur, défilent des collines ponctuées de moutons. Des nuages gris sombres filent sur un ciel encore plus sombre. Et une sorcière sur un balai dans une robe imperméable, le visage rougi par l'effort que cela lui demande de suivre le train, essaie de prendre des photos d'eux d'une main tandis qu'elle s'agrippe désespérément à son balai de l'autre.
Et comme la journée semble bien partie pour atteindre des records d'horreur alors qu'il n'est même pas encore midi, Blaise Zabini qui devrait bientôt décrocher le titre de « personne au monde la plus détestée par Harry » dit d'une voix légère :
— Bon, autant lui donner quelque chose à se mettre sous la dent, hein, Harry ?
Et il se tord sur son siège pour l'embrasser en plein sur la bouche.
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Tatoué sur mon cœur - Drarry
Fanfiction\TERMINÉ/ Harry a un problème : il n'a pas d'âme sœur. Drago a un problème : il en a une. Et si ces deux problèmes avaient la même solution ? Au programme : Serpentards machiavéliques, cours de coiffure sur chat, restaurants gastronomiques moldu...