Les semaines suivantes passent presque normalement. Enfin, aussi normalement que possible vu le contexte. Et puis, Harry est presque tout le temps en retenue pendant un moment, en punition pour avoir séché l'école sans permission – même si on ne lui fait pas partager ses retenues avec Malefoy, remarque-t-il. On l'envoie passer chaque après-midi dans le bureau de McGonagall tandis que Malefoy est expédié chez Slughorn.
Ça aide, un peu, de ne pas être avec Malefoy tout le temps. Il arrive presque à se concentrer sur ses devoirs. McGonagall ne lui donne pas de travail supplémentaire pendant ses heures de solitude forcée, alors il essaie de passer son temps intelligemment. Hermione serait fière de lui, si elle n'avait pas arrêté de lui parler. Elle est toujours en colère à cause d'Amortentia.
— Ce n'est pas tant que tu l'aies fait, mon vieux, dit Ron en regardant nerveusement autour de lui au cas où Hermione le chope en train de parler avec Harry et lui fasse la tête à cause de ça. C'est que tu ne lui aies pas fait assez confiance pour lui dire que tu le faisais. Elle était vraiment inquiète quand tu as disparu et on ne pouvait pas demander d'aide à qui que ce soit au risque de révéler toute l'affaire.
Ron baisse encore davantage la voix.
— Je pense qu'elle s'en veut, aussi – de ne pas avoir réussi à trouver le contre-sort. Tu sais comment elle est. Je... je crois que tout ça, ça lui rappelle ses parents. Elle pense toujours qu'elle a mal agi avec eux, tu vois.
Il secoue la tête, la mine sombre, et laisse Harry à ses pensées.
Alors, en dépit du travail scolaire, il trouve plein de temps pour réfléchir : au fait qu'il a été un très mauvais ami pour Hermione, et à quel point il les aime, elle et Ron et... et à quel point il veut ce qu'ils ont tous les deux, pour lui. Tout se mélange dans sa tête : son désir d'avoir quelqu'un dont il serait si proche, et des images de Malefoy, la façon dont il regarde Harry quand il pense qu'Harry ne le voie pas, la façon dont sa marque sœur fleurit sous ses doigts, le fait... le fait qu'il a eu Harry à ses pieds en train de le supplier de l'aimer et qu'il n'a rien fait pour profiter de la situation. Ce n'est pas ce que Harry imaginait de lui.
Harry sait qu'il est un peu long à la détente quand il s'agit de ses propres émotions. Cela lui a pris bien trop longtemps pour comprendre qu'il pouvait voir Ginny comme plus qu'une amie, et ce n'est qu'après qu'elle ait rompu avec lui qu'il a compris pourquoi l'amitié était la seule chose qui pouvait marcher entre eux. Mais il n'est pas non plus totalement idiot. Il sait que Malefoy lui plaît. Que peut-être il lui a toujours plu, d'une certaine façon, même si à l'époque c'était trop mêlé à de la haine, de la rivalité et... Et puis, ils étaient des gosses, de toute façon. Ils ont grandi et ensuite ça a été la guerre – une vraie guerre avec de vrais combats où leurs amis sont morts, et leurs ennemis sont morts et parfois les deux étaient les mêmes, et ce n'était pas vraiment les meilleures circonstances pour regarder Malefoy et penser « ouais, il est canon ».
Harry n'est toujours pas sûr de penser que Malefoy est canon. C'est juste... Malefoy. Mais quand il le regarde maintenant, son ventre se noue. Et puis, il y a la masturbation. Il s'y adonne pas mal ces derniers temps – dans la salle de bain, là où Zabini ne peut pas le choper et lui attribuer de notes – et c'est toujours Malefoy qui lui vient à l'esprit dans ces moments-là.
Harry pense aussi – même s'il essaie de ne pas y penser parce que ça le terrifie – que son obsession pour Malefoy est tout à fait réciproque. Mais... il ne le connait toujours pas, pas vraiment. Malefoy a été élevé avec une façon de voir la vie totalement différente de celle de Harry – il a appris à apprécier sa suprématie sur les Moldus et les autres sorciers. Et maintenant, la réputation de sa famille est en lambeaux, sa position dans le monde a changé et... il a un tatouage autour du cou qui clame qu'il appartient au sorcier qui a sauvé le monde. Le doute tourmente Harry. Quels que soient les véritables sentiments de Malefoy, ça ne lui ressemblerait pas que de ne pas les utiliser à son avantage.
Mais alors qu'octobre arrive, Harry n'a pas l'impression que Malefoy utilise quoi que ce soit à son avantage. Il est silencieux quand Harry est dans les parages, et pas d'une façon boudeuse ou sarcastique, juste, eh bien, silencieuse. Comme s'il était perdu dans ses pensées. Mais même s'il est pensif, il prend quand même le temps d'observer Harry et fait semblant que non dès qu'il regarde vers lui.
Hermione ne parle peut-être plus à Harry mais elle parle à Malefoy, comprend Harry quand il les surprend ensemble à la bibliothèque un jour, penchés l'un vers l'autre. Il file derrière une étagère avant qu'ils puissent le voir et se demande de quoi ils parlent.
— Est-ce que Hermione t'a donné des idées pour te débarrasser du sort ? demande-t-il à Malefoy plus tard, quand il le trouve seul.
Malefoy lui jette un drôle de regard, comme si Harry l'accusait de quelque chose.
— Non. Et j'ai promis à Mère que je ne tenterais rien sans sa permission, de toute façon. Pourquoi ?
Harry hausse les épaules et essaie de faire comme s'il s'en fichait qu'Hermione parle à Malefoy et qu'il ne sache pas de quoi.
— Comme ça, dit-il. Je me posais la question, c'est tout.
Malefoy ne craque pas sous cet interrogatoire intense et ne ressent pas la pulsion de tout confesser, alors Harry laisse tomber, mais ça ne l'empêche pas de s'interroger. Il n'arrive pas à savoir pourquoi ça l'embête que Malefoy et Hermione soient en bons termes, et rien que ça, ça l'inquiète. Est-ce que c'est parce qu'il ne sait pas de quoi ils parlent ? Ou bien est-ce que c'est quelque chose de plus idiot – comme, le fait qu'il l'aient mis à l'écart ? Malefoy n'essaie pas de lui voler son amie, c'est une idée ridicule. Et... Hermione n'essaie pas non plus de lui voler Malefoy, pense-t-il en se faisant l'effet d'être un crétin suprême.
Mais c'est vrai que Malefoy semble un peu plus détendu. Déjà, il ne demande même plus à Harry de l'aider avec ses cours d'Étude des Moldus. Oui, c'était juste un prétexte pour qu'ils puissent se voir et parler de trouver un remède au sortilège, et ce n'est plus franchement d'actualité, mais quand même. Harry ne sait même pas sur quoi portaient les derniers cours, même s'il sait qu'ils ont dû parler de la bonne société moldue parce que Pansy était excitée que leur prochaine excursion soit chez un couturier célèbre plutôt que dans un café comme d'habitude.
Harry ne peut s'empêcher de trouver, sinistrement, que le temps est juste... en train de passer, sans sa permission, et qu'il perd le contrôle. Et chaque jour qui passe le rapproche de la fin octobre, de la date anniversaire de la mort de ses parents. Il devrait y être habitué, désormais, se dit-il en essayant de se ressaisir. Mais bizarrement, la date semble pire plus il prend de l'âge – son chagrin plus vif, plus cru. Il suppose que c'est parce que bientôt, il sera plus vieux que ses parents l'étaient quand ils sont morts. Cette pensée l'emplit de tristesse – pour ce qu'il a perdu et ce qu'eux ont perdu. Et en dessous de tout ça, il y a l'amertume constante que peut-être son absence de marque sœur veut dire qu'il ne connaîtra jamais ce qu'eux ont connu, même s'il dépasse leur âge, même s'il vit cinq fois plus vieux qu'eux.
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Tatoué sur mon cœur - Drarry
Fanfiction\TERMINÉ/ Harry a un problème : il n'a pas d'âme sœur. Drago a un problème : il en a une. Et si ces deux problèmes avaient la même solution ? Au programme : Serpentards machiavéliques, cours de coiffure sur chat, restaurants gastronomiques moldu...