On peut toujours tomber plus bas - 4

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Harry n'en attend pas – tout son courrier devrait être redirigé vers sa boîte privée pour être ouvert par son secrétaire. Mais, à son grand désarroi, tous les hiboux du monde semblent s'être donné rendez-vous à Poudlard pour venir foncer sur lui en piqué. Harry se penche et évite de justesse un traumatisme crânien dû à une avalanche de lettres. Quand il refait surface, hébété, il voit une meute de Beuglantes se battre, et quand elles l'aperçoivent, elles explosent de leurs enveloppes et chacune essaie de crier plus fort que les autres. 

« COMMENT OSES-TU ÊTRE GAY ! »

« SI TU AS BESOIN D'UNE FEMME POUR PORTER TES BÉBÉS, CHOISIS-MOI... »

« QU'EST-CE QUE DUMBLEDORE AURAIT DIT... »

« C'EST MOI QUE TU DEVRAIS AIMER, PAS LUI ! JE T'EN SUPPLIE ! »

La directrice s'est levée et jette une volée de sortilèges aux lettres qui sont toujours dans les airs. Flitwick, Chourave et Slughorn se déploient et tentent vaillamment de maîtriser la foule. Harry lutte contre l'envie de se cacher sous la table. On ne peut pas arrêter des Beuglantes une fois qu'elles ont commencé. La seule option est d'attendre que ce soit fini. 

— Je, heu, suppose que la photo de toi en train de rouler une pelle à Zabini a dû être publiée, dit Ron, parce que les portes ouvertes sont faites pour être enfoncées. 

Il retire un minuscule paquet entouré de rubans de ses cheveux et le jette de côté avec dégoût.

Harry pense que la meilleure chose à faire est de rester assis sans bouger et de regarder ses pieds – enfin, en direction de ses pieds. Ils sont déjà couverts d'enveloppes, et s'il continue à rester immobile, elles arriveront bientôt à ses genoux. Alors, bien sûr, il se retrouve à jeter un coup d'œil au bout de la table pour voir si Zabini est affligé de la même calamité. 

Zabini, bien sûr, n'est pas affligé de la même calamité. Il a un sourire de chat satisfait et tend la Gazette du jour à Malefoy, qui est assis en face de lui. 

Harry tressaille. Il est trop loin pour entendre ce que Malefoy répond, mais son visage se crispe et il repousse le journal du bout des doigts, comme s'il était tellement dégoûté qu'il n'arrive même pas à le toucher. 

Quelque chose se crispe en Harry. 

— Argh, dit Ron alors qu'une autre volée de lettres s'abat sur eux. 

Il s'agite pour se débarrasser d'une substance rose et gluante qui a coulé de l'une d'entre elles. 

— Mince, j'espère que c'est un des philtres d'amour pour de faux que vend George, et pas un vrai, histoire d'éviter que tu me sautes dessus et essaies de me fourrer ta bite dans l'œil. 

Harry explose de rire. 

— Dans l'œil

Ron vire au rose. 

— C'est un truc que font les gays, j'ai entendu dire, dit-il avec un grand sourire. 

— Rassure-toi, Ron, je n'essayerai jamais de fourrer ma bite dans ton œil. Sauf si ça peut te sauver la vie, peut-être, ajoute-t-il d'un air sérieux pour le plaisir de le voir se tortiller de gêne. 

— Je pense que je choisirai plutôt la mort, mon vieux, répond Ron. Sans vouloir t'offenser. 

Bientôt, les professeurs parviennent à maîtriser les hiboux récalcitrants, les Beuglantes ont hurlé jusqu'à ce qu'elles soient réduites en poussières, et les enveloppes ainsi que leur contenu douteux ont disparu – pour toujours, espère Harry. Il compte bien envoyer un courrier pour se plaindre, sans mâcher ses mots, mais il ne voit pas trop à qui. 

— Harry, mon chéri, l'appelle Zabini. 

Harry se retourne avec horreur et essaie de ne pas remarquer que Malefoy a quitté la pièce et que le journal est désormais abandonné sur la table du petit déjeuner. Même d'ici, il peut se voir réagir sur la photo alors que Zabini lui colle un gros smack sur les lèvres. Lui, il sait que c'est un mouvement de recul ; mais pris hors contexte, il a l'air de se pâmer. Et une fois qu'il a repéré la photo, il la voit partout – on dirait que le moindre élève de Poudlard a pris un abonnement à la Gazette juste pour le plaisir de participer à ce moment historique : le moment où le Survivant était devenu le Soupirant en avouant sa passion homosexuelle pour son très sexy camarade de Serpentard.

Ce n'était pas étonnant que Zabini ait passé tellement de temps sur sa coiffure ce matin. 

— Je suis vraiment désolé, mais je vais être obligé de te briser le cœur – je suis hétéro, vois-tu, dit Zabini d'une voix empreinte d'une tristesse indicible mais qui porte néanmoins très bien. 

L'effet est légèrement gâché par ses lèvres qui n'arrêtent pas de frémir, mais c'est presque plausible. 

— Notre amour a été beau le temps qu'il a duré, mais je ne peux plus continuer, même toi, notre cher sauveur, ne peux me convertir. 

Il porte la main à son front, l'image même du chagrin. 

Harry regrette que les plats du petit déjeuner ne soient plus sur la table, car il aurait pu se précipiter sur cet enfoiré et lui enfoncer une saucisse dans la narine. Cela dit, à bien y réfléchir, ça aurait peut-être était un peu trop suggestif au vu des circonstances. 

La Salle est silencieuse, comme si tout le monde attendait quelque chose. Harry espère que quelqu'un d'autre va se décider à rompre le silence – même s'il soupçonne qu'il faudrait au moins que McGonagall menace de retirer un millier de points à Serpentard pour que Zabini se taise définitivement – jusqu'à ce que Ron se lève d'un coup et dise d'une voix indignée :

— Comme si Harry avait envie de sortir avec quelqu'un comme toi ! Et puis de toute façon, il aime les filles

Tatoué sur mon cœur  - DrarryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant