Il n'y a pas d'antidote à la crétinerie - 1

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Il n'y a pas d'antidote à la crétinerie

Le dortoir est très bien rangé quand Harry se réveille le lendemain matin. Ou plutôt quand on le réveille. Zabini, qui a de gros cernes, lui secoue l'épaule, bâille si largement que Harry voit ses amygdales, et dit :

— On est en retard pour le petit déj', faut se dépêcher.

Les autres s'agitent aussi, avec des grognements variés qui suggèrent que tout le monde a dormi aussi bien que lui. Les rideaux de Malefoy sont grand ouverts et il n'est nulle part en vue, si bien que Harry ne sait pas si c'est lui qui a rangé ou un elfe dévoué. Plus Harry grandit, plus il trouve bizarre que tant d'aspects de la vie sorcière dépendent d'une armée de minuscules esclaves professionnels. Il trouve ça tout aussi bizarre de se rappeler une époque où il se moquait d'Hermione pour en avoir quelque chose à faire et pour avoir lancé la SALE.

Harry ne sait pas s'il est davantage déçu ou soulagé de l'absence notable de Malefoy à la table de Serpentard. Ce n'est pas franchement qu'il ait envie de le voir ; le saccage de leur chambre la veille ne présage rien de bon. Mais d'un autre côté, ne pas savoir ce qu'il se passe avec Malefoy le rend nerveux – et sa nervosité augmente de minute en minute. Qu'est-ce qu'il pouvait bien y avoir dans la lettre que Malefoy a reçu la veille ? La loi de l'emmerdement maximum fait que ça a certainement à voir avec la marque sœur. Ce qui veut dire que ça a à voir avec Harry aussi

Harry se rappelle son rêve – Malefoy qui appelait son nom alors que la marque avait pris vie et le dévorait – et il déglutit avec difficulté. Il se dit qu'il va aller s'asseoir avec Ron et Hermione ce matin, et peut-être que la vue de leur amour le fera se sentir mieux.

Alors Harry s'assoit et Ron se décale pour lui faire de la place. Luna transporte avec précaution son demi-melon rempli de lard grillé depuis la table de Serdaigle pour les rejoindre. Harry avait un peu faim ce matin, mais à la vue du combo melon + lard, son appétit disparaît pour aller se cacher derrière sa colonne vertébrale.

— On trouve souvent du melon avec du jambon cru, dit Luna, quand elle voit que tout le monde la regarde. Ça c'est juste la version chaude. Vous voulez essayer ?

— J'ai trop mangé, dit Ron, et il met de côté son sandwich au lard à moitié mangé avec un soupir de regret.

Quand Luna tourne la tête pour regarder quelque chose d'inexistant, il l'emballe dans un mouchoir en papier et le cache dans sa manche. Il le ressort dix minutes plus tard, quand ils sont en cours de Potions et qu'il n'y a plus de Luna en vue.

— Tu es sûr que c'est une bonne idée de manger ici ? demande Harry alors que Ron prend une énorme bouchée.

Il y a du ketchup partout sur la manche de sa chemise, remarque Harry. Hermione le remarque aussi et essaie d'oublier qu'elle l'a remarqué. Ça a l'air de la faire souffrir. Harry compatit. Ron est parfois difficile à côtoyer, et ce n'est pas lui qui a hardiment accepté de l'épouser.

Ron avale le reste du sandwich, un peu comme un boa constrictor.

— C'est bon, dit-il avec désinvolture. Ce n'est pas comme si on fabriquait des potions vraiment dangereuses ici.

Heureusement, Slughorn arrive avant qu'Hermione puisse faire la liste de toutes les potions extrêmement dangereuses qui ont été concoctées dans cette école – ça fait déjà un moment qu'elle s'est lancée et elle n'est parvenue qu'à la lettre E.

— Aujourd'hui, j'aimerais que vous alliez à la page soixante-quatorze et que vous prépariez l'antidote au philtre d'amour, dit-il en faisant un clin d'œil à Harry. Je parie qu'au moins l'un d'entre vous risque d'en avoir besoin bientôt, alors il vaut mieux prendre ses précautions. Ha ha !

Toute la classe regarde Harry fixement. Tous ces regards ne sont pas amicaux.

— Ha ha, dit Harry.

— Les antidotes, bien sûr, font partie du programme pour ce cours, poursuit Slughorn. Alors vous allez avoir besoin de perfectionner votre technique. Rappelez-vous : une potion mal préparée marchera probablement, mais pas très bien, alors qu'un antidote mal préparé ne marchera pas du tout, dans la plupart des cas. Alors il est vital d'être précis. Suivant quelle est la potion d'origine, un antidote peut faire la différence entre la vie et la mort – ou, pire, entre le libre arbitre et la servitude.

— Je n'aurais pas formulé ça comme ça, marmonne Ron à Harry.

Celui-ci hoche la tête, mais au fond de lui, il ne sait plus trop ce qui est pire.

La leçon est commencée depuis quelques minutes, et Hermione vient de demander à Ron d'aller chercher des rameaux de sorbier magique et donne des instructions à Harry sur la quantité d'huile de ricin qu'il faut mesurer, quand Malefoy rentre dans la salle.

— Par les c..., heu, reliques de Godric, marmonne Ron.

Il change son juron en quelque chose de moins vulgaire quand il croise le regard d'Hermione.

— Malefoy a l'air prêt à être déposé dans une chambre funéraire pour qu'on vienne pleurer sur son corps. C'est juste moi, ou est-ce qu'il a l'air encore plus mort-vivant et maléfique que d'habitude ?

Ce n'est pas juste lui. La pâleur de Malefoy – que Harry, malheureusement, qualifierait davantage de délicate que de morte-vivante – a viré au gris. Les cernes sous ses yeux sont presque violets. Slughorn, qui lève la tête avec mauvaise humeur de la pile de parchemin qu'il est en train de corriger pour gronder le retardataire, fronce les sourcils avec inquiétude.

— Est-ce que ça va, Drago ? s'enquiert-il. Peut-être qu'une visite à Mme Pomfresh pour lui demander une de ses potions revigorantes est à l'ordre du jour.

Ça va, grogne Drago en laissant tomber son sac sur le sol à côté d'un bureau vide et en s'affalant sur une chaise comme si elle l'avait personnellement offensé.

Il semble soudain se rappeler où il est et ajoute, même si c'est toujours sur un ton qui n'est pas approprié pour s'adresser à un professeur :

— Merci de me l'avoir proposé, Monsieur.

Tatoué sur mon cœur  - DrarryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant