Il n'y a pas d'antidote à la crétinerie - 4

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Harry décide que c'est mieux s'il s'assied sur le canapé. Ce n'est pas qu'il pense être sur le point de s'effondrer, mais... juste au cas où.

— Heu, quoi ? tu en as pris pendant le cours, ou quoi ?

Malefoy, le dos à la porte, se laisse glisser et s'assied par terre, l'image vivante de la détresse. Il renverse la tête en arrière, appuyé au panneau de bois, et ferme les yeux.

— Non, dit-il.

— Bon, vas-y, insiste Harry comme Malefoy n'ajoute rien de plus et reste assis là, tout mou. Quand est-ce que tu as essayé ?

Un muscle tressaute sur la joue de Malefoy.

— La semaine dernière, avoue-t-il.

Il penche la tête en avant brièvement pour se frotter les yeux et puis se rappuie à la cloison, en tournant la tête à Harry.

— J'en ai piqué dans la réserve de Slughorn. Ses protections sont si faibles que même un gamin pourrait les faire sauter.

— Oh, dit Harry. Mais...

— Et le weekend, j'en ai essayé dans la réserve du manoir, continue Malefoy, d'une voix neutre. Avec au moins une douzaine d'autres antidotes, des onguents, des lotions et des potions

— Oh, dit Harry.

— Et c'était après une semaine de recherches intensives sur ce putain de sort – tu ne pensais pas que je séchais juste les cours pour aller bouder, quand même, si ? Ma mère m'a envoyé une sélection des livres les plus intéressants de notre bibliothèque par hibou. Et comme ça ne suffisait pas, je suis rentré à la maison et j'ai lu le reste. Et avant que tu demandes, Potter, dit Malefoy avec un air pointu, en se tournant pour le fusiller du regard. Les livres de notre bibliothèque sont parfaitement légaux et ont été vérifiés par plusieurs Aurors, alors ne pense même pas à essayer d'aller cafarder là-dessus.

— Je n'y comptais pas ! proteste Harry, piqué.

— Et je peux emprunter ce que je veux à la bibliothèque de Poudlard aussi, merci bien. Même si la Réserve est à peu près aussi utile qu'une théière en chocolat, ajoute-t-il d'une voix mordante. D'après ce que j'en ai entendu, Dumbledore l'a débarrassée de tout ce qu'elle contenait d'intéressant au fil des années. C'est pour ça que j'y suis passé en dernier, il ne m'a fallu que dix secondes pour voir qu'il n'y avait rien d'intéressant là.

Mais Harry a trouvé Malefoy à la bibliothèque avant qu'il décide que leur dortoir l'avait offensé et qu'il fallait lui casser la gueule ; si c'est le manque de lectures intéressantes qui l'a mis dans cet état, il est plutôt long à la détente.

— Alors... pourquoi tu étais si énervé la nuit dernière, du coup ? demande-t-il.

C'est peut-être une question hardie, mais parfois les questions hardies sont les seules qui valent la peine d'être posées. Et il semble qu'il n'ait rien compris à ce que faisait Malefoy ces derniers jours. Là où il voyait du complotage et du caractère de merde, en fait il n'y avait que... des recherches. Des recherches frénétiques en solo, et de la panique frénétique en solo.

Malefoy fait la moue sans le regarder, et pendant un instant, Harry ne sait pas s'il va répondre ou non.

— J'ai réussi à persuader une ancienne... connaissance de mon père de me retrouver, après notre charmant voyage à Édimbourg, dit-il avec distance. Il a promis de m'aider et je l'ai cru. Je lui ai versé une somme significative en tant qu'avance sur résultats.

Harry voit la fin de l'histoire arriver à des kilomètres.

— Le hibou que j'ai reçu hier soir était de lui, dit Malefoy.

Il replie ses genoux contre sa poitrine et se penche en avant. Sa voix est amère.

— Je n'arrive pas à croire que j'aie été aussi bête. Il dit que son enquête n'a mené à rien et qu'il est désolé de ne pas pouvoir m'aider. L'avance n'est pas remboursable.

— Tu devrais le dénoncer aux Aurors pour escroquerie, suggère Harry, comme une andouille.

— Quelle bonne idée, dit Malefoy. Je vais le dénoncer tout de suite, et je n'aurais assurément aucun problème pour avoir essayé de me procurer des artefacts de magie noire, n'est-ce pas ?

— Je pourrais témoigner en ta faveur, dit Harry avec hésitation, davantage parce qu'il se sent complètement con et qu'il a envie de prouver qu'il est juste... eh bien, à moitié con.

C'est probablement la moitié du haut qui est con, celle où se trouve son cerveau.

— Génial ! s'écrie Malefoy. Je suis sûr que le fait que tu as mené de façon publique des recherches sur les sortilèges d'amour et que tu as concocté un antidote aux philtres d'amour, combiné au fait que j'ai ton nom autour du cou comme un collier pour chien ne me pénalisera pas du tout quand on me traînera de nouveau devant le Magenmagot.

Harry y réfléchit.

— Est-ce que tu vas me mordre si je m'assieds à côté de toi ? demande-t-il.

Malefoy cligne des yeux et retrousse ses lèvres dans l'ombre d'un sourire.

— Je ne te mordrais pas même si tu étais fait de crème caramel, Potter, dit-il.

— Je suis sûr que si, dit Harry.

Il se lève du canapé et remet la fiole d'antidote dans sa poche, avant de se laisser glisser par terre à côté de Malefoy. Ce n'est pas aussi inconfortable que ce à quoi il s'était attendu. Le tapis de Slughorn doit faire un mètre d'épaisseur.

— Écoute... je ne sais pas pourquoi tu as fait tout ça tout seul, sans m'en parler, dit Harry.

Il le pense. Sans l'aide de Ron et Hermione, il se rend compte qu'il n'a absolument pas progressé. C'est de justesse s'il a eu l'idée d'essayer de mettre fin au sort de son côté. À part des recherches peu brillantes, il s'est contenté de faire du sur-place, à attendre que Malefoy accepte de travailler avec lui. Est-ce que c'est une faiblesse ou est-ce que c'est se montrer raisonnable ? Il ne sait pas trop. Tout ce dont il est sûr, c'est que :

— C'est moins horrible quand tu fais les choses avec des amis, fais-moi confiance.

Tatoué sur mon cœur  - DrarryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant