Chapitre 31

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Toujours point de vue de Jane

Le cinquième à été le pire. C'est le cinquième jour que j'ai commencé à voir la réalité en face. C'est le cinquième que je me suis mis à parler, rompant le quasi-silence dans lequel je m'étais mise, n'ayant murmuré qu'une poignée de formules de politesse à Oscar et Emma face à leurs tentatives malaisés d'entamer la conversation. Le seul son que je produisais, c'était celui de mes sanglots et des explications hachées derrière mes larmes pour expliquer en quoi ma vie serait meilleure, plus facile sans elle. Même moi, je n'y croyais pas. C'est le cinquième jour que j'ai enfin osé regarder mon visage dans le miroir. Sale et couvert de bleus, et mes yeux si gonflés qu'ils étaient à peine ouverts.C'est le cinquième jour où je me suis effondrée, priant enfin Dieu de faire disparaître la douleur. Personne ne peut supporter une telle peine. Pas même moi. C'est le cinquième jour que je l'ai appelé, je n'ai pas pu m'en empêcher. Je m'étais dit que si elle répondait, nous pourrions trouver une solution, un compromis. Nous nous serions présenté des excuses à n'en plus finir et promis de ne plus jamais nous quitter. Je suis tombé sur son répondeur après deux sonneries. Elle a rejeté l'appel.

Au huitième jour, j'ai faibli et je l'ai encore appelé. Cette fois-ci, elle a eu la courtoisie de laisser sonner son téléphone jusqu'à que, je tombe sur sa messagerie au lieu d'appuyer directement sur le bouton pour ignorer mon appel. C'est au huitième jour que je suis restée alitée à revivre les quelques fois ou elle m'a fait part de ses sentiments.C'est là que j'ai compris que la plus grande partie de notre relation était en fait...Dans ma tête, un peu comme l'image que je me faisais de ses sentiments pour moi.J'ai compris que tout le temps où je pensais de ses sentiments pour moi.J'ai compris que tout le temps où je pensais que nous pouvions construire notre relation , la faire marcher pour toujours, elle ne pensait pas du tout à moi.

C'est ce jour-là que j'ai décidé de rejoindre les gens normaux et que j'ai téléchargé des musiques. J'ai mis un casque et écouter la tristesse des autres qui me rappelle qu'il n'y a pas que moi qui à mal. Ca m'a beaucoup aidée. Je ne suis pas la seule à aimer quelqu'un qui ne m'aime pas assez pour se battre pour moi.

Au neuvième jour, j'ai enfin pris une douche et essayer d'aller à la bibliothèque. Le matin, j'ai réussi à boire la moitié de mon café et Emma m'a dit que mes joues reprenaient un peu de couleur.J'ai utilisé toute mon énergie en espérant ne pas tomber sur Jess pas loin de notre appart.Le neuvième jour , j'avais dépassé le stade où je voulais lui parler. Je range des livres et vois écris " Avez vous peur de mourir ?".Et silencieusement, je dis : ne suis-je pas déjà morte ?

Le dixième était un mardi. J'ai commencé à faire des phrases, pas complètes et généralement sans rapport avec le sujet de la conversation, mais personne n'a eu envie de me le faire remarquer. Oscar me parle d'une fête de crémaillère et je note mentalement que je devrai lui redemander quand j'aurai toute ma tête.J'ai passé la journée à regarder la porte de la bibliothèque.J'ai mangé ce jour-là, plus que du riz et de la banane, comme les jours précédents. Emma fait cuire un jambon, je ne l'ai remarqué que parce que ça m'a rappelé celui qu'on avait mangé chez Karen. Des images de ce soir-là, elle me tenant la main sous la table alors qu'elle était assise à côté de moi, m'ont renvoyé à l'état de loque humaine, me faisant passer le reste de la nuit dans les toilettes à vomir le peu de nourriture que j'avais mangé.

Alors que le douzième s'étendait à la fin, je me suis mise à imaginer ce qui se passerait si je n'avais plus à subir cette douleur. Et si je disparaissais ? L'idée m'a terrifié, pas à cause de la mort, mais parce que mon esprit n'est pas capable d'imaginer un endroit aussi ténébreux. Cette idée m'a remise en place en fait sortir de cette spirale infernale, pour me ramener doucement à la réalité, enfin la réalité que mon esprit pouvait supporter.J'ai changé de t-shirt et j'ai commencé à chercher un appartement que je pourrai m'offrir près de la bibliothèque. J'ai trouvé plusieurs appartements à visiter. 

Au treizième jour, j'ai fait un bref sourire, et le couple l'a remarqué. C'est ce jour-là que j'ai mangé mon beignet et mon café avec Julie. Celle-ci m'a dit que j'étais jolie, malgré mes vêtements froissés et les cernes sous mes yeux. C'est le treizième jour que le changement a opéré, c'est au treizième jour que pour la première fois, je n'ai pas passé que la journée à regretter que les choses ne se soient pas passées différement entre Jess et moi. J'ai entendu le couple parler de l'anniversaire de Jess qui devait avoir lieu quelques jours plus tard et j'ai été surprise de ne ressentir qu'une petite brûlure dans mon cœur en entendant son prénom.

Aujourd'hui, c'est le quinzième jour.

Emma me prévient derrière la porte de la salle de bain.

- Le déjeuner est prêt.

Personne n'a parlé de mon départ ou de l'endroit où j'irai si je décidais de partir. Je leur en suis très reconnaissante, mais, en même temps, je sais que ma présence chez eux va devenir un fardeau. Emma n'arrête pas de m'assurer que je peux rester aussi longtemps que je le souhaite et Oscar n'arrête pas de me rappeler, plusieurs fois par jour, qu'il apprécie ma compagnie. Mais au final, c'est le pote de Jess aussi. Je veux avancer, décider de là où je devrai aller et vivre. Je n'ai plus peur.

Je ne peux plus et ne veux plus passer une autre journée à pleurer pour cette fille malhonnête qui ne m'aime plus.

Lorsque je retrouve Emma à la cuisine, elle mord en pleine dent dans un pancake et elle a un peu de sirop d'érable à la commissure des lèvres, qu'elle récupère d'un coup de langue.

- Bonjour.

Elle me sourit, les joues pleines et l'œil brillant.

- Bonjour.

Je me verse un verre d'eau. Elle continue de me fixer pendant que je bois.

- Quoi?

- Tu as ..eh bien, tu as l'air en forme.

- Merci, j'ai décidé de prendre une douche et de sortir du monde des morts.

Ma blague la fait sourire lentement, comme si elle n'était pas sûre de ma santé mentale.

- Vraiment, ça va?

Elle finit son pancake. Je décide d'en prendre un et j'essai de ne pas remarquer qu'elle m'observe comme si j'étais un animal dans un zoo.

- Je suis prête si tu l'es.

Oscar rentre dans la cuisine.

- Jane tu a l'air superbe aujourd'hui !

- Merci.

Aujourd'hui, pour la première fois, j'ai pris le temps de me préparer, vraiment me préparer pour avoir l'air présentable. Les quatorze jours qui viennent de passer, je ne me suis pas occupé de mon apparence, pourtant habituellement soignée. Aujourd'hui,je me sens moi-même. Mon nouveau moi. Mon moi après Jess.Le quinzième jour était mon jour.

J'ai laissé mes cheveux à l'air libre, je me suis un peu maquillé. J'ai mis un pantalon souple avec un t-shirt. Oscar passe et me dit:

- Ca te va très bien.

Je prends mon manteau et mes affaires.

- Merci beaucoup.

- Passe une bonne journée.

Il sourit, visiblement surpris et très heureux de me voir revenir au monde réel. Je suis dans l'entrée, prête à partir.Mais Emma me demande:

- Oh, Jane, est ce que dimanche, c'est toujours ok?

- Ok pourquoi ?

- Pour la crémaillère et le bébé, Oscar te la dit il y a quelques jours.

- Euh, ouais, c'est ok !

Je souris. Je suis prête. Je peux le faire. Je peux participer à un événement public, avec des gens sans craquer.Mon subconscient est muet pour la première fois en quinze jours et je remercie Emma avant de suivre Oscar dehors. Il part pour travailler et moi aussi.

Il fait soleil même chaud. En montant dans la voiture, je me rends compte que ce n'est pas la sienne, mais je ne relève pas.

- Tu sais que je pars ce soir pour deux jours ?

- Quoi ? non ! Où ça ?

Il me regarde en fronçant les sourcils puis sourit.

- Je vois, c'est pour le travail.

- Je suis désolée, j'aurai dû t'écouter et être plus attentive à ce que tu me disais, plutôt que de tourner autour de mon nombril.

Je n'arrive pas à croire que je ne l'ai même pas écouté quand il me parlait de cette fête dimanche et maintenant de ça.

- T'inquiètes, ce n'est pas grave. Je n'ai fait que le mentionner. Je ne voulais pas t'infliger ça alors que tu étais ..Euh, tu sais..

- Un zombie?

- Ouai , un zombie effrayant.

Il plaisante, ce qui me fait sourire, pour la cinquième fois en quinze jours.La sensation est agréable.

- Je suis inquiet à l'idée de partir.

Il me fait culpabiliser.

- Ne le sois pas ! Tu as déjà fait beaucoup pour moi, beaucoup trop! Je vais me débrouiller toute seul. Avec Emma, on va se faire une soirée fille. Je suis vraiment désolée pour tout.

- Ce n'est pas ta faute, c'est la sienne.

Je hoche la tête et remets mon casque aux oreilles. Oscar sourit.

Je range des livres, je regarde la couverture. Comme si c'était fais exprès, ça parle de douleur. Histoire de bien me torturer. Mais après avoir pensé un moment à ma douleur. Je me dis que des fois ça peut changer une personne, la rendre plus forte et donc que la foi n'est plus aussi nécessaire. On a besoin de soi.On a besoin d'être fort pour ne pas laisser la douleur nous pousser ou nous tirer là où on ne veut pas aller.

Je me prends un café et regarde Julie. Celle-ci aide un client.Quand elle eu fini,Julie prends mon gobelet et dit:

- Merci il ne fallait pas.

Je souris et je vais pour m'en faire un autre. Mais elle me rends le gobelet.

- On partage?

Je fronce les sourcils mais boit qu'a même après elle.


Point de vue de Jess


Quinze jours.

Quinze jours sans lui parler.Je ne pensais pas que ça serait possible de vivre une journée sans lui parler, encore moins quinze putain de journées.J'ai l'impression que ça fait mille jours, et chaque heure qui passe est plus douloureuse que la précédente.

Quand elle a quitté l'appartement ce soir-là, j'ai attendu encore et encore le bruit de ses pas franchissant le seuil de la porte, j'ai attendu sa voix qui me crierait dessus.Ca n'est pas arrivé. Je suis resté assise par terre à poireauter. Elle n'est jamais revenue.

J'ai fini les bières du frigo et j'ai éclaté les bouteilles contre le mur.Le lendemain matin, quand je me suis réveillée, elle n'était toujours pas là, alors j'ai emballé mon merdier. J'ai sauté dans la bagnole et je suis allé dans mon ancienne maison. Juste pour me barrer d'ici. La maison n'a jamais été vendue. Si elle aurait voulu revenir, ç'aurait cette nuit-là. J'avais besoin de me casser et de prendre l'air et de me barrer. Avec mon haleine chargée d'alcool et mon t-shirt blanc taché.

Si Jane m'avait appelé avant que je prenne l'autoroute, j'aurais fait demi-tour. Mais tant pis, elle a eu plusieurs occasions de revenir. Chaque fois précédente, elle l'avait fait, malgré toutes mes conneries, alors pourquoi ç'aurait été différent ce coup-ci ?Qu'est que j'avais fait de pire ? Ok, je lui ai menti, mais c'est un petit mensonge de rien de tout, et elle a pété un câble.

Si l'une d'entre nous doit être en rogne, c'est moi. Elle a dit son prénom de l'autre meuf, et en plus Emma à débarqué, ambiance Wonder woman de merde, pour me foutre une claque ? Non, mais c'est quoi ce merdier ?

Toute cette situation est à chier et ce n'est pas de ma faute. Enfin, peut-être que si.Elle peut revenir ramper à mes pieds, moi, je ne le ferai pas.Je l'aime, mais ce n'est pas à moi de faire le premier pas.

J'ai passé la majeure partie de mon premier jour à dormir sur le canapé qui es resté.J'ai dessaouler pas mal.Je ne sais pas pourquoi je suis ici alors que cette baraque, je la déteste.C'est blindé de souvenirs de merde avec mon père et ma mère que j'ai trouvée. Deuxième jour était crevant.Je suis restée allonger à regarder le plafond pourri.J'ai fini par sortir à huit heures. Une jolie blonde avec les yeux de Jane; de la même couleur, m'offre un verre.J'ai décliné plus ou moins poliment, je n'ai été gentille qu'à cause de la couleur de ses yeux. Plus je la regardais, plus je me rendais compte qu'ils n'étaient pas de la même couleur.Ils étaient ternes et sans vie.Les yeux de Jane sont marron foncé, mais avec une touche de clair.Ils sont beaux autant que des yeux puissent l'être.Putain, mais pourquoi est-ce que j'ai le cul posé dans un pub à penser à des globes oculaires?

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A suivre !

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