13. Retournement De Situation

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On était toujours dans la même position dans le silence. Je me sentais bien, plus que jamais, bien plus que depuis longtemps. Je commençais tout juste à goûter au bonheur à nouveau. Et ça faisait du bien. J'eus pourtant envie de briser le silence, j'en avais besoin. J'avais besoin de savoir où on en était. Ces derniers jours avaient été ambigus et j'étais à présent presque sûre qu'on s'apreciait bien. J'avais juste besoin d'en savoir plus, qu'il me confirme que je ne devrais pas avoir de doutes.
<< Marin ?
Je savais pertinemment qu'il n'aimait pas son prénom, mais je ne savais pas vraiment comment l'appeler autrement. Je lâchai sa main et m'installai sur le dos en m'éloignant un peu de lui. J'attendais d'avoir des réponses avant de me laisser avoir à nouveau.
- Oui ?
- Ça fait quoi de nous tout ça ?
Ma question n'était pas claire mais s'il me demandait de préciser, cela signifierait qu'il refuserait de comprendre. Pour l'instant, il réfléchissait. Il ne devait pas savoir non plus.
- Je ne pense pas que mettre des mots là-dessus nous aiderait, au contraire.
Cherchait-il à éviter d'en parler ?
- Je pense que moi j'en ai besoin, murmurais-je en fixant le plafond. Je suis perdue...
- Je t'assure que ça ne servirait à rien. Ça nous foutrait la pression et on ne saurait pas vraiment comment agir l'un avec l'autre. On doit pouvoir être libre de se confier comme des amis dès qu'on en a besoin, et... Il hésita. D'être plus que ça quand on en a envie.
Il n'osait pas prononcer les mots auxquels il pensait.
- Tu as peut-être raison. Ou alors peut-être qu'on n'est pas fait pour être ensemble.
Je n'en était pas tellement persuadée, je voulais juste avoir son avis.
- Tout ce que je sais c'est qu'on est pareils. Regarde-nous, poursuivit-il, j'ai l'impression que tu es mon alter ego. On a cette même peine en nous, cette même souffrance qui nous empêche d'être heureux. On a aussi tous les deux une situation familiale catastrophique : mon père me hait et ma mère est la reine des hypocrites, ton père est mort et ta mère est à la limite de la dépression.
Ça me procura un pincement au cœur. C'était si vrai. Il continua.
- On déteste le lycée, on ne se préoccupe pas du futur. Je n'évoquerait même pas nos amour passés...
- C'est à cause d'eux qu'on n'arrive pas à être ensemble ? Parce qu'ils nous hantent ?
- Non. Je suis sûr qu'ils sont bien plus heureux sans nous, on doit arrêter de penser à eux. Pour ma part, je l'ai oubliée depuis longtemps.
J'aimerais dire la même chose, mais ce serait faux. Et pourtant, je ne pense pas à Jacob si souvent, mais dès que c'est le cas, je suis remplie de remords. Et lorsque je me l'imagine, je ne le vois pas heureux, mais souffrant. Comme moi.
- L'abandon c'est pire encore, chuchota-t-il.
Je ne savais pas quoi répondre. Dans mon cas, c'était moi qui avait abandonné Jacob, pas l'inverse. Il a dû le vivre terriblement mal. Pour éviter de dire quelque chose de maladroit, je me tournai légèrementi vers lui sans trop le regarder et passa ma main dans ses cheveux. J'adorais faire ça avec Jacob, et c'était bien mieux que de dire que j'étais désolée pour lui.
- Tu n'es pas obligée de faire ça.
Il ne disait pas ça sur un ton sec, plutôt sur un ton triste.
- De faire quoi ?
- De faire comme si tu étais amoureuse.
Qu'est-ce qu'il voulait dire ? Que l'aimer était mal, que lui ne m'aimait pas ?
- Peut-être que je le suis.
Peut-être, oui. Je n'en sais rien, c'est trop flou. Je sais juste que je l'aime bien et qu'il m'aide à aller mieux. C'est clairement tout ce que je sais.
- Je crois que... commença-t-il.
Au même moment, quelqu'un sonna à la porte de la maison et le coupa.
- Tu devrais aller voir, je crois que ta mère est chez moi.
Je ne bougeai pas, je ne voulais pas gâcher ce moment tellement plaisant. Et je voulais entendre sa réponse, je ne savais pas ce qu'il comptait dire.
- Sérieusement, c'est peut-être important, Hannah. >>
Je soupirai et me levai du lit en vitesse. Je n'allais pas le persuader de me répondre ou de ne pas y aller, je le savais. Je ne pris pas le temps d'enfiler des habits présentables ou de me coiffer correctement et partis en direction de l'entrée sans dire un mot de plus à Marin.

La Fille Qui Courrait Après Les LoupsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant