Je reste stoïque de longues secondes. Je n'avais jamais frappé quelqu'un de sang-froid. Mais avec cette phrase il a dépassé les bornes. Il n'a pas dû avoir bien mal, la marque commence déjà à s'estomper.
Mes yeux se remplissent de larmes. La sensation de picoti me rappelle trop celle que laissait les coups de mon géniteur. Une larme coule mais je l'essuie avec un geste de rage. Je déteste quand on me voit pleurer. Mais trop de souvenirs remontent et un sanglot finit par passer la barrière de mes lèvres.
Alex tente de me prendre dans ses bras mais je me dégage. Il pose une main sur ma joue et je finis par me laisser faire. Il dépose un baiser sur une de mes joues mouillée et là encore je le laisse faire. Quand ses yeux se fixent sur ma bouche des frissons couvrent mon échine. Un de ses doigt fin caresse mes lèvres et il est si proche que son souffle se mêle au mien. Je prends peur et file me réfugier derrière la première porte que je trouve.Je pénètre dans sa salle de bain. Je tourne de verrou et m'adosse à la porte. Je continue de pleurer, quand est-ce-que j'arrêterais d'être faible comme ça ? Les coups de poings qu'il donne sur la porte me font sursauter.
-Elsa, ouvre-moi.
Je fais non de la tête puis je réalise qu'il ne me voit pas alors j'articule un semblant de réponse.
-écoute Elsa je suis désolé pour ce que je t'ai dit. Je n'aurais pas dû c'était idiot.
Ses excuses me font du bien mais je pleure plus de rage contre moi qu'envers lui.
-Laisse-moi entrer. Tu ne vas pas te cacher ici toute la nuit ?
-J'en suis capable.
-Je n'en doute pas, dit-il en riant. Sors de là. J'aime pas quand tu pleures.
Mon cœur.
Je m'assieds et m'adosse à la porte. J'entends qu'il fait pareil de l'autre côté. Il doit m'entendre sangloter. Il ne dit rien. Si je n'entendais pas le frottement de ses vêtements contre le bois j'aurais juré qu'il était parti.
-T'es toujours là ? finis-je par demander une fois mes sanglots taris.
-Bien sûr que oui, et pour info Reine des Neiges je ne bougerais pas.
-Reine des Neiges, tu connais ça toi ?
-Je connais mes classiques tu crois quoi !Même s'il est en colère et moi en pleurs nous ricanons. Puis je reviens à la réalité.
-Qu'est-ce que tu veux ?
-De quoi qu'est-ce que je veux ? Tu te réfugies dans ma salle de bain.
-Je ne sais pas Alexander, t'es censé me haïr pas essayer de m'embrasser, ce n'est pas à ça que tu as joué ces derniers jours ?
Si j'oses aborder le sujet c'est parce qu'une porte nous sépare et que ses yeux aussi perçants soient-ils ne traversent pas les murs.
-T'embrasser ?
-Ce n'est pas une réponse, qu'est ce qui t'as pris ?
-Qu'est ce qui te fait dire que j'ai essayé de t'embrasser, tu n'es rien pour moi.
Tu. N'es. Rien. Pour. Moi.
J'aurais dû m'y attendre. Je suis la reine pour me faire des films. Mais je suis sûre de ne pas avoir rêvé ses yeux sur ma bouche.Je ne sais pas pourquoi je me remets à pleurer. Peut-être parce que mon âme se rend compte que jamais personne ne l'aimera ou peut-être est ce mon corps qui pense ne jamais pouvoir être désiré. Ma bouche ne servira donc qu'à crier ma solitude.
Quand j'ouvre la porte car ce manège à assez duré je me confronte à lui, enfin à son torse en premier qui était collé contre la porte.
Il n'a pas répondu à mes questions, par contre il me tend un mouchoir, ce mec me crache des horreurs mais prend soin d'essuyer mes larmes.
Je le bouscule pour sortir de la pièce, j'ai affreusement besoin d'air, je ne comprends pas ce qui vient de se passer.
J'ai envie de vomir, la tête me tourne, je prends mon téléphone dans la poche avant de mon large sweat-shirt et appelle Charline. Ça fait des semaines qu'elle m'ignore et je commence à m'inquiéter. Et comme à chaque fois que je l'appelle je tombe sur sa messagerie.
Je sors en claquant la porte, l'air frais sur mes joues humides ont un effet de poignards, cela ne me change pas trop de d'habitude.
Je cours sans vraiment m'arrêter, mon téléphone toujours à la main, je veux m'éloigner le plus possible de l'immeuble. Je suis vraiment débile, qui souhaiterait m'embrasser, je suis repoussante. Un mec aussi attractif qu'Alexander ne cherche pas à sortir avec une fille aussi peu dans les codes que moi.
Sérieusement je suis repoussante, je suis désespérée, j'ai l'impression que jamais personne ne voudra de moi, et je crois que je pleure car inconsciemment je me rends compte de cela. Cette peur qui me dévore de l'intérieur, de finir ma vie seule, comme je l'ai commencée me donne envie de rentrer juste pour retrouver ma lame. Je ne dois pas sombrer, je l'ai promis à maman. Me faire du mal n'apaisera pas la douleur.
C'est terrible j'ai 16 ans et je sais déjà comment je vais finir, le désespoir c'est la pire des émotions.
J'arrive à l'arrêt de bus le plus proche, je me pose sur le banc séchant mes larmes ramassant au passage du mascara sur mes mains. Une vieille dame me dévisage, je dois faire peur à voir.
Je décide alors de me balader dans le quartier, ce n'est qu'un enchainement d'immeubles Haussmanniens, des librairies à en perdre la tête, des jeunes de partout, ce quartier est dynamique et j'aime ça. J'atterris facilement sur la place de la Sorbonne. Je m'assieds sur une des fontaines et regarde les étudiants sortir dans les bars, vivre leur vie. Certains s'aiment, d'autres se délient, mais ils sont tous si vivants. Cette marche permet à ma tête de se vider, j'imagine la vie de ses gens, oubliant la mienne. Je suis un peu perdue je crois, tout est si semblable. Je m'en fiche, je préfère rester dehors plutôt que de devoir affronter Alex. Mais je commence à avoir froid, le soleil est rentré chez lui, laissant à la Lune la froideur de la nuit.
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Until the last petal falls (terminé)
Romance/Seront-ils leur plus belle cicatrice ?/ « Un. Deux. Trois. Dans ma vie j'ai toujours ressenti le besoin de compter. Compter mes respirations pour refouler mon passé. Compter pour affronter le lendemain. Quatre. Cinq. Six. Je compte mes cicatri...