XLIX : La leçon.

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L'eunuque trouva Deirane dans la salle de cours. Elle assistait à une leçon de géopolitique. Seule Nëjya l'accompagnait. Ni Kazami ni Sarin n'étaient intéressées. Et Dursun était trop jeune. Sans parler d'Elya et des nièces de Dovaren qui étaient encore des enfants. Le messager alla prononcer quelques mots discrets au professeur. Celui-ci hocha la tête pour donner son autorisation. Il revint alors vers Deirane.

— Serlen ? demanda-t-il.

La question semblait inutile. Il n'en existait pas deux comme elle, avec des diamants incrustés dans la peau.

— C'est moi.

— Vous avez de la visite au salon des invités.

— De la visite ?

Les yeux de Deirane s'écarquillèrent d'étonnement. Qui pouvait bien venir la voir ? Personne ne savait qu'elle vivait ici. À tel point qu'elle ignorait la présence d'un tel lieu.

Elle se leva et suivit son guide à travers les couloirs. Pendant toute la durée de leur séjour à l'école, les pensionnaires n'avaient pas le droit de sortir, mais elles pouvaient recevoir des visites. Une annexe du palais avait été consacrée à cela. Il comprenait plusieurs salles, toutes bâties sur le même modèle : deux pièces séparées par un panneau ouvragée en bois — Dursun appelait ça un moucharabieh.

Assis dans un fauteuil en cuir, Dayan l'attendait. Elle avait toujours cru que le ministre, en raison de son rang, pouvait entrer librement dans le harem. Il n'en était rien, seules des circonstances exceptionnelles l'auraient permis. Le besoin ne se faisait pas sentir puisqu'en temps normal il convoquait la personne qu'il voulait voir et un eunuque la lui amenait. Mais là, c'était lui qui s'était déplacé vers elle.

Deirane s'installa dans le fauteuil en face de lui, comme il l'y invitait d'un geste de la main. La séparation permettait de parler, mais pas de se toucher et encore moins d'échanger des objets. Encore qu'une feuille enroulée serrée pourrait certainement être glissée entre les motifs du moucharabieh. Mais Deirane pariait que si une telle opération était tentée, les eunuques investiraient la salle dans le tösihon.

— Serlen, commença-t-il, je suis venu te remercier pour ce que tu as fait pour Cali.

— Je n'ai rien fait, répondit-elle, c'est Naim qui est intervenue.

Il caressa son bouc d'une main tout en souriant.

— Tout le monde sait que Naim fait partie de tes alliées.

— Nous sommes amies. Elle m'apprend à me défendre. Cela s'arrête là.

— Cela fait vingt ans que je suis ministre. Je sais reconnaître les partis. Naim marche à tes côtés, ainsi que Dursun et Nëjya. Les autres membres de ton groupe sont trop jeunes pour avoir une importance quelconque. Mais elles deviendront adultes un jour. Et quelques concubines indépendantes se tâtent pour décider si elles s'allient à toi ou pas.

— Qu'allez-vous faire contre Mericia ?

— Cali n'est ni une favorite royale ni une acquisition spéciale comme toi. Brun ne bougera pas le petit doigt pour elle. Moi seul moi serais motivé pour intervenir. Mais j'aurai besoin d'un levier dans le harem. Mon unique entrée est Cali.

C'était un agent bien faible. Deirane partageait l'opinion du ministre.

— Mericia risque de recommencer, remarqua Deirane.

— La prochaine fois, elle s'assurera de n'avoir aucun témoin.

Deirane croyait voir où voulait en venir Dayan.

— Vous me demandez de protéger Cali ?

— Cali ne sait pas faire grand-chose. Elle ne participe pas aux joutes politiques du harem. Elle ne cherche à intégrer aucun parti. Elle ne s'implique dans rien. Elle n'a qu'une seule passion : la danse.

La chanceuse (La malédiction des joyaux -  Livre 3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant