Sarin regarda alternativement la jeune Yriani et son amie naytaine. Il était vrai que sa peau claire serait bien visible même dans la nuit la plus sombre. Dovaren, par contre, devait être parfaitement invisible.
— Et toi ? demanda Deirane, tu es sûre de ne pas vouloir venir ?
— Le harem me convient. J'y suis à l'abri du besoin, je peux y exercer mon art en toute sécurité et Brun est un amant très correct. Et comme je ne répugne pas à prendre mon plaisir avec d'autres femmes et que les eunuques disponibles sont nombreux, je suis comblée de ce côté-là également. Puisque c'est la dernière fois que nous nous voyons, bonne chance à toutes.
Les trois amies s'enlacèrent, seule Dursun resta en dehors de l'accolade générale. Puis les novices rejoignirent leur quartier.
La nuit tombait. Les quatre fuyardes avaient depuis longtemps préparé les habits pour leur évasion. Mais elles ne les avaient pas revêtus. Elles auraient paru suspectes si elles avaient été surprises en traversant ainsi le harem. À la place, elles les avaient pliés dans l'étui de l'usfilevi de Deirane. Personne ne serait étonné de la voir s'enfoncer dans les jardins à la nuit tombée. Elle allait souvent s'entraîner dans un coin tranquille. À l'occasion, quelques-unes de ses amies viennent avec elle. Parfois, des concubines les suivaient, mais elles restaient rarement plus de quelques calsihons. La nuit noire les effrayait alors que Deirane trouvait sa fraîcheur agréable après la lourdeur de la journée.
Dursun ne devait pas les accompagner. Afin de se fournir un alibi, elle avait emmené Elya dans la salle des novices, pour l'aider à réviser ses leçons, bien avant que les autres ne commençassent leurs préparatifs. Ainsi, elle pourrait affirmer qu'elle ignorait ce qu'elles organisaient. Et donner une explication plausible au fait qu'elle ne les accompagnât pas avec elle cette nuit-là. Elya éprouvait des difficultés dans l'apprentissage de la lecture et ce n'était pas la première fois que la Shacandsen s'isolait avec elle. Ce douzain, c'était même assez fréquent. Personne ne serait donc surpris de la voir seule.
Les adieux eurent lieu dans la chambre de Deirane. Elles enlacèrent l'une après l'autre la petite Aclanli. Les mains de cette dernière s'attardèrent un peu plus que nécessaire sur le corps de Deirane qui semblait n'y accorder aucune importance. Par contre, pour Nëjya les choses se passèrent différemment.
— Je regrette que tu ne puisses pas venir, se désola Nëjya.
— Et moi que toi tu ne puisses rester.
— Ça fait trop longtemps que j'attends une occasion comme celle-là. Je ne peux pas la laisser m'échapper.
— Je comprends. C'est quand même dur.
Leurs corps se serrèrent étroitement. Les mains se firent câlines. Les deux femmes étaient quasiment de la même taille. Leurs bouches se joignirent et elles s'embrassèrent. Deirane les regarda, totalement surprise par ce qui était en train de se passer devant elle. Pourtant elle les avait vu échanger des caresses, mais elle n'en avait pas tiré toutes les implications. Elle tourna la tête vers Dovaren qui leva les épaules d'une façon qui signifiait « tu n'avais pas compris ? ». Loumäi ricana d'un air gêné et détourna les yeux. Le baiser s'éternisant, Deirane commençait à être mal à l'aise. D'autant plus que Dursun avait déboutonné le corsage de Nëjya et s'était légèrement écartée pour libérer la robe qui tomba au sol. Sa bouche parcourait maintenant le corps dénudé, le cou, le haut de la poitrine. La Samborren la laissa profiter d'elle un long moment avant de la repousser.
— Je dois y aller, murmura-t-elle.
Dursun s'éloigna. Les yeux pleins de larmes, elle s'enfuit.
Dovaren ramassa la robe.
— Au moins, tu es en partie prête. Tu t'habilleras plus vite.
Bien que ce fût une plaisanterie, elle n'avait pas totalement tort. Une concubine nue dans les jardins du harem ne présentait rien d'extraordinaire. Surtout parmi les plus belles. Et belle, Nëjya l'était. Mais en voyant les yeux troublés de son amie, son sourire s'effaça.
VOUS LISEZ
La chanceuse (La malédiction des joyaux - Livre 3)
FantasyDans les harems, les chanceuses sont ces esclaves qui ont une "chance" de pouvoir devenir maîtresse du roi un jour. C'est le rôle aujourd'hui dévolu à Deirane : se former en attendant le bon plaisir du roi d'Orvbel. Le harem n'est cependant pas cet...