La leçon dura toute la matinée sans autre interruption. Elle ressemblait beaucoup à ce qu'elle avait connu à l'ambassade d'Helaria pendant son séjour à Sernos, à ceci près que cette école était payante. Et elle allait beaucoup plus loin dans l'acquisition des connaissances. Ses élèves n'avaient nul besoin d'intégrer une corporation et de trouver un maître pour continuer à apprendre. Et les matières étudiées étaient choisies parmi plusieurs disponibles. Ainsi, tel que l'apprit Deirane par la suite, Kazami suivait, outre les cours de langue, orvbeliane, yriani et helariamen, des cours de géographie et d'arithmétique. Quand elle saurait correctement compter, s'y ajouterait la comptabilité. Ces deux dernières matières ne faisaient pas partie du cursus de Deirane. Mais elle en avait d'autres à la place. Deirane et Kazami ne seraient pas toujours ensemble.
L'après-midi, les élèves furent divisés en plusieurs groupes. Les pensionnaires partirent dans une direction alors que Dovaren entraîna Deirane et les autres novices vers ce qui se révéla un cours de géographie. Malgré son statut, Kazami se joignit à elles.
— Ce n'est pas pour apprendre à faire des broderies au point de croix que je suis ici, expliqua-t-elle, mais pour seconder mon mari dans ses affaires.
— De toute façon, tu sais déjà broder, remarqua Dovaren en montrant le col de la jeune femme.
— C'est ma mère qui m'a appris.
— Et nous, on n'a pas besoin de savoir ? demanda Deirane.
— A priori, tu ne cherches pas un mari, répondit la Shacandsen.
— Et puis, on dispose de domestiques pour ça dans le harem, ajouta Gyvan.
À la grande surprise de la jeune femme, elle reconnut quelques concubines dans la salle. Trois, pour être exacte. Dont la très jolie femme originaire du Sambor qu'elle avait remarqué quelques jours plus tôt sur la plage. Le passage de chanceuse à concubine ne signifiait donc pas la fin de la fréquentation de l'école. Même si elle n'avait jamais l'occasion de sortir de cet endroit, elle aurait au moins la possibilité de s'occuper. Et la dénommé Sarin était là également. Elle n'était donc pas une élève, comme elle l'avait d'abord cru, mais une concubine.
Le professeur de géographie, une jeune femme, était, ainsi que, l'apprit Deirane par la suite, une ancienne pensionnaire de l'école. Bien qu'Ard ait abordé tous les pays du monde, il avait surtout insisté sur l'Ectrasyc et en particulier la basse vallée de l'Unster. La haute vallée, stérilisée par les feythas, était totalement déserte. Mais il avait à peine parlé du Shacand. Et pourtant, ce continent était intéressant. Comme l'Ectrasyc, il comportait plusieurs royaumes. Mais ils s'étaient rassemblés dans une sorte de confédération qui les regroupait tous et avait pris la ville de Renaissance comme capitale. On pouvait presque le considérer comme un unique pays. Cela ressemblait à ce que l'Yrian et l'Helaria avaient tenté d'accomplir chacun de leur côté avec la confédération yriani d'un côté et les Frères de la mer de l'autre. Mais le résultat final se révélait plus abouti : une quinzaine de royaumes, davantage de langues encore, mais un seul gouvernement. Peut-être, ce fait s'expliquait par sa faible population. Pris tous ensemble, ces royaumes comptaient moins d'habitants que le seul Yrian.
L'après-midi passa sans que Deirane s'en rende compte. Le professeur n'avait pas seulement des connaissances étendues dans son domaine, il savait aussi les transmettre. Alors que ses journées avec Ard ressemblaient à des discussions intéressantes, mais un peu décousues, lors de ce cours elle avait réellement appris quelque chose.
Pendant tout le cours, la jeune femme avait surveillé la belle Samborren. Elle avait pu voir l'attention qu'elle avait apportée au professeur lors de son entrée dans la salle et sa déception quand elle avait annoncé que la leçon du jour concernait le Shacand. Visiblement, connaître leurs voisins du sud ne l'intéressait pas.
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La chanceuse (La malédiction des joyaux - Livre 3)
FantasyDans les harems, les chanceuses sont ces esclaves qui ont une "chance" de pouvoir devenir maîtresse du roi un jour. C'est le rôle aujourd'hui dévolu à Deirane : se former en attendant le bon plaisir du roi d'Orvbel. Le harem n'est cependant pas cet...