XVII : Le repérage

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XVII
Lerepérage

La fouille de la bibliothèque avait constitué une vraie mine d'or. Une copie des dossiers judiciaires en provenance de toute la Pentarchie y était rassemblée comme tous les documents. La classification extrêmement bien organisée, par tribunal puis par chronologiquement, lui permit de se passer d'aide. Naim ne laisserait aucune trace dans le souvenir des archivistes.

L'investigation se révéla plus longue qu'elle l'avait cru. Elle connaissait la date approximative. Les événements avaient eu lieu pendant la fête de printemps. Quelques douzains plus tard, la tête des assassins orvbelians revenait dans un coffre. Le jugement avait donc été prononcé entre les deux. En voyant les dossiers défiler rapidement, guère plus d'un ou deux par douzain, elle pensait que la recherche serait courte. Mais juste après la période de la fête, ils augmentèrent soudainement. Ils concernaient presque tous des étrangers qui avaient dépassé les bornes lors des festivités. Agressions et viols étaient les plus nombreux. Les femmes de l'Helaria avaient pourtant la réputation de défendre chèrement leur vie. Mais il y avait beaucoup d'immigrées parmi elles, qui n'avaient jamais appris à se battre. Elle découvrit aussi plusieurs meurtres, causés par une incompréhension entre les coutumes locales et celles des visiteurs. Mais celui qui la concernait était unique. C'était le seul assassinat de sang froid de la période.

Dayan avait raison. Les minutes du procès rangées à Honëga étaient falsifiées, mais celles présentes à la maison mère des bibliothécaires étaient authentiques. Elle ne vit que peu de différences dans les mots, mais dans les faits c'était énorme. L'assassinat était devenu une tentative d'assassinat et la victime était devenue le plaignant. Le reste du texte était totalement identique à l'exemplaire que lui avait montré Brun avant de partir.

Ternine était donc vivant. La première partie de sa mission était accomplie. Il restait la seconde : où se trouvait-il ? Ça, les documents ne le disaient pas. En revanche, l'adresse où il logeait au moment des événements y figurait. Le mieux était de se rendre sur place, le propriétaire de l'auberge pourrait lui donner des indications intéressantes.

Elle embarqua donc pour Honëga.

Une fois de plus, le transport était gratuit pour les nouveaux peuples. Au passage, Naim put juger de l'efficacité des fonctionnaires helarieal. Elle se présenta au poste de garde à l'entrée d'Imoteiv, elle y déposa ses armes et annonça son intention de partir par la prochaine navette à destination de la province orientale. Elle subit une fouille rapide, destinée à vérifier qu'elle n'en cachait pas d'autres sur elle. En quelques stersihons, les formalités furent expédiées. Puis elle se rendit au port. L'endroit était extraordinaire, d'une beauté à couper le souffle. C'était une immense grotte dont le plafond devait bien atteindre la mi-hauteur du plateau de l'île. Ses parois étaient en calcite blanche immaculée veinée de noir. Au centre du bassin, six colonnes en calcite aussi donnaient un ancrage aux pontons. Les quais eux-mêmes étaient en granite rose taillés avec la précision qui caractérisait les artisans helarieal.

Naim y serait bien restée davantage, mais elle n'avait pas le temps. Elle se rendit sur l'embarcadère destiné au trafic passager interîles.

Un bref instant avant le départ, un garde se présenta avec les armes, les siennes et celles de quelques autres voyageurs à en juger par les paquets que portait son binôme. Il les lui restitua avant qu'elle monte à bord. Elles avaient été enveloppées dans une couverture de cuir, fermée par un lien en silt. Une mesure qui en rendrait difficile tout usage inconsidéré. Le garde resta à surveiller maintenant que les passagers étaient à nouveau équipés, ils ne quitteraient pas le bord. Puis, une fois le bateau sortit du port, il retourna à son casernement.

Le trafic entre Imoteiv et Honëga était intense. La navette n'était pas une simple barque comme pour son arrivée à Jimip. C'était un vrai navire, une goélette. N'ayant pas de cargaison à transporter, toute la cale avait été divisée en cabines de six couchettes chacune, trois de chaque côté de la porte. Pour la première fois depuis qu'elle avait entendu parler de l'Helaria, Naim regretta que ce peuple ne fasse pas de différence entre sexes, ils n'avaient pas regroupé les femmes entre elles, sa cabine était mixte. D'un autre côté, sa silhouette lui assurait que personne ne poserait la main sur elle, à moins de vouloir finir le voyage à la nage. Ceci dit, avec le nombre de dauphins qui les accompagnaient, il arriverait aussi à destination. Il serait juste un peu mouillé.

La chanceuse (La malédiction des joyaux -  Livre 3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant