LVI : la diversion - (2/3)

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Jevin vivait au deuxième étage, juste sous la suite de Brun. Les trois femmes quittèrent la cage d'escalier pour rejoindre la chambre. C'est dans cette dernière que se trouvait le passage. Une porte toute simple était habilement cachée derrière une immense tapisserie helarieal, que son poids maintenait bien en place, représentant deux lanciers en train de combattre. La pièce ainsi dissimulée était minuscule. Elle abritait une échelle qui aboutissait dans les souterrains.

En se retournant, Cali se rendit compte que Nëjya ne les avait pas suivies. Elle n'était pas entrée dans la chambre. En revenant en arrière, elle la trouva dans le salon. Elle était appuyée au mur, les yeux fermés, les poings serrés. Elle tremblait.

— Que se passe-t-il ? demanda Cali.

— J'ai vécu des moments pénibles dans cette chambre.

— Quand le prince t'a frappée ?

Nëjya hocha la tête.

— Je devrais me montrer compatissante, mais là j'ai un peu de mal.

Malgré ses paroles un peu dures, la danseuse prit la main de la jeune femme et l'entraîna à travers la pièce. Nëjya se laissa faire. Elles se retrouvèrent toutes les deux dans la salle secrète où Sarin les attendait.

— Maintenant ? demanda cette dernière.

— On descend.

Le tunnel représentait ce qui restait d'un ancien système qui permettait autrefois aux occupants du palais de rejoindre la plage pour s'enfuir en cas de danger. Mais les ancêtres de Brun l'avaient utilisé pour investir les lieux et s'emparer du royaume, une cinquantaine d'années plus tôt. Ceux-ci avaient jugé plus prudent de le combler. Ils n'en avaient conservé que la première moitié qui allait jusqu'à la tour de garde. Aucune lampe ne les éclairait. Mais on y trouvait non plus ni obstacle ni bifurcation. Elles ne risquaient ni de se perdre ni de blesser. Il suffisait de suivre le mur d'une main. Toutefois, marcher ainsi, dans le noir absolu, était oppressant. Aussi quand les deux femmes émergèrent dans les caves de la tour, le mince rai de lumière qui filtrait par la porte menant à la salle des gardes les soulagea.

De curiosité, Nëjya regarda le mécanisme qui bloquait le battant contre toute intrusion. L'endroit était toujours un refuge, mais il n'allait plus jusqu'à la mer. Il devait permettre à la famille royale de se cacher le temps que les secours arrivent. Bien sûr, si les ennemis s'installaient, les fugitifs seraient pris au piège, voire débusqués. Il était possible qu'un autre tunnel sorte du palais dans la forêt par exemple. Mais Cali ne le connaissait pas et Orellide non plus. S'il existait ce qui était loin d'être sûr vu qu'il avait échappé à toutes les investigations, le nombre de dépositaires de son trajet devait être très réduit.

Lentement, elles grimpèrent l'escalier qui menait jusqu'au corps de garde. Elles hésitèrent avant de tourner la poignée. La porte grinça, mais personne ne les intercepta. La pièce était vide. Une seule torche l'éclairait. Après le parcours qu'elles venaient d'effectuer, elle les éblouit presque. Ce n'était qu'une entrée. À leur droite, un autre passage reliait la tour au système de fortification de la ville. Les soldats qui opéraient ici n'étaient pas les gardes rouges, mais l'armée d'Orvbel. Jamais la troupe d'élite ne se serait limité à simple travail de surveillance, surtout quand il n'existait pas d'accès direct avec le palais.

Elles entendirent des bruits de discussion. Ils provenaient de plus haut, de l'étage. Nëjya sortit son poignard de sous sa cape et resta en arrière pendant que les autres continuaient. Ces dernières montèrent l'escalier avec précaution.

— Pourquoi marche-t-on comme ça ? demanda soudain Sarin.

— Pour ne pas se faire repérer, répondit Cali.

La chanceuse (La malédiction des joyaux -  Livre 3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant