27 ~ Vous êtes mon héros

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– Qu'est-ce que tu as encore fait Rose ? souffle Laure en arrivant à mon chevet.

Laure est une infirmière qui suit le bataillon comme son ombre. Nous nous sommes rencontrées lors de mes nombreuses visites à l'infirmerie, bien souvent à cause du caporal Livaï.

– Je me suis frottée d'un peu trop près au titan colossal, plaisanté-je. Mais j'ai bien failli l'avoir !

– De ce que je peux voir, lui aussi a bien failli t'avoir.

Elle ôte les bandages de mon visage avec une délicatesse dont elle seule a le secret. Je peux voir les bandes dégoutantes et pleines de sang passer devant mes yeux, m'arrachant un hoquet de dégoût. Vu l'état délabré des bandages, je n'ose imaginer celui de mon pauvre visage.

– Ces médecins de Stohess t'ont vraiment soignée comme des bouchers, grommèle-t-elle.

Avec ses doigts de fée, elle applique délicatement un cataplasme vert sur mon visage avec une délicatesse dont je lui suis reconnaissante. Elle place ensuite de nouveaux bandages propres sur mon visage et affiche un sourire satisfait une fois le travail terminé.

– Tu as vraiment beaucoup de chance, ton visage n'est presque pas touché. Tu devrais t'en sortir sans trop de cicatrices.

Je suis rassurée par ses paroles et la laisse s'attaquer à mes mains, en moins bel état que mon visage. Lors de l'attaque de Bertolt, j'ai protégé mon visage à l'aide de mes bras, donc mes mains ont pris le souffle chaud de plein fouet. Je grimace et me mords la lèvre pour retenir les gémissements de douleur qui menacent de m'échapper. J'ai été stupide, très stupide. C'était idiot de ma part de me ruer toute seule sur cet enfoiré, et maintenant je m'en mords les doigts, sans mauvais jeu de mots.

– Un jour c'est dans un cercueil que tu reviendras, souffle Laure.

– J'attends ce jour avec impatience, ricane Livaï.

Encore lui ? Accoudé contre l'embrasure de la porte, les bras croisés sur son torse, il me sonde de la tête aux pieds de son éternelle expression insipide. Je lui lance un regard noir qui ne lui fait aucun effet. J'en viens à me demander s'il arrive à ce gnome d'éprouver des sentiments ou de ressentir quoi que ce soit. Il ne rit pas, ne pleure pas, n'explose pas de rage. Dans toutes les situations, il reste d'un calme olympien.

Après un long moment passé à m'observer, il se décolle enfin du mur et avance lentement vers mon lit. Le bruit de ses pas sur le plancher en bois est le seul son qui parvient à mes oreilles, personne ne parle. Il finit par s'immobiliser derrière Laure qui rentre la tête dans les épaules et me lance un regard désolé.

– Comment va notre momie aujourd'hui ?

Bah alors, on a sucé un clown ce matin ? pensé-je.

Je me retiens cependant de lui sortir ces mots tels quels, ça s'est plutôt mal fini la dernière fois.

– Décidément caporal, votre humour résiste à toute épreuve.

Il ne réagit pas à ma remarque mais pousse un long soupir exaspéré. Quelques mèches rebelles tombent devant son regard froid qui me paralyse sur mon lit. Il est d'une beauté glaciale qui ne me laisserait pas indifférente s'il n'était pas si insupportable, et si petit.

– Et toi tu es décidément d'une stupidité sans bornes. Tu aurais pu crever.

Oui, je suis stupide, mais jamais je ne l'admettrai devant lui. Jamais je ne lui donnerai raison, ça lui ferait bien trop plaisir, à supposer qu'il soit capable de ressentir une telle chose.

– Vous avez encore volé à mon secours, vous êtes mon héros.

– Je suis le héros de beaucoup de femmes, se vante-t-il.

A l'ombre des murs [Livaï x OC] | Wattys 2021 | Wattys 2022Où les histoires vivent. Découvrez maintenant