A l'ombre des murs [Livaï x OC] | Wattys 2021 | Wattys 2022

1 ~ La brigade d'entrainement

– En rang, recrues ! beugle l'instructeur.

Je porte mes mains à mes tempes et les masse délicatement, j'ai horreur des gens qui crient et je regrette déjà amèrement de m'être engagée dans cette folle mission. Avec un long soupir, je traine les pieds et m'aligne sur mes camarades. Ignorant totalement comment faire le salut militaire, je jette un discret coup d'œil sur moi voisin de droite, ce dernier possédant une chevelure comparable à celle d'un poney, et imite sa posture : Poing droit serré contre mon cœur et poing gauche fermé dans le dos.

L'instructeur marche entre les rangs et analyse minutieusement chacun d'entre nous. Le regard braqué sur l'horizon, je me vide la tête et arbore une expression aussi neutre que possible. Je tique lorsque l'instructeur s'arrête à ma hauteur et se tourne d'une doucereuse lenteur vers moi. Je soutiens son regard assassin et me permets même de le dévisager ouvertement, ce qui ne semble pas lui plaire puisqu'il me hurle à la figure :

– Quel est ton nom, recrue ?

Je retiens in extremis une grimace, il m'a presque percé un tympan.

– Rose Stark ! crié-je à mon tour.

L'homme me toise de la tête aux pieds d'un regard méprisant, comme si je n'étais qu'un vulgaire insecte qu'il fallait écraser. Je ne me gêne pas pour le reluquer à mon tour et réprime un sourire lorsque je remarque que son crâne chauve ressemble étrangement à un œuf.

– Pourquoi t'es-tu engagée, soldate ?

Alors ça, c'est une excellente question ... Pourquoi me suis-je engagée ? Je ne peux décemment pas lui avouer la véritable raison de ma présence ici. Prise au dépourvu, je déblatère le premier mensonge qui me vient à l'esprit :

– Pour fumer toutes ces saloperies de titans !

Il esquisse un sourire, probablement satisfait de ma réponse et me lance un dernier regard avant de continuer à déambuler dans les rangs, à la recherche d'une nouvelle victime. Notre instructeur continue ainsi son petit manège pendant un long moment, il hurle sur des recrues, s'acharnant plus sur certains que sur d'autres. Il parvient même à rebuter quelques personnes fragiles qui décident d'abandonner tout simplement. S'ils sont effrayés par le simple fait qu'on leur crie au visage, il vaut peut-être mieux qu'ils abdiquent dès maintenant.

Je commence à avoir mal aux bras à force de rester immobile et des fourmis se font sentir le long de mes jambes. Je m'agite discrètement, sautillant d'un pied sur l'autre pour retrouver l'usage de mes jambes et remuant faiblement mes bras afin que le sang y circule à nouveau. Mon agitation m'attire un regard foudroyant de la part de mon voisin, il me semble me souvenir qu'il s'appelle Jean. Ce dernier fait bien une tête et demi de plus que moi, et pourtant je me débrouille pas mal avec mon mètre septante.

– Il en a encore pour longtemps comme ça ? ruminé-je.

– La ferme, m'intime mon voisin de droite.

Je lève les yeux au ciel mais ne poursuit pas la conversation. Je fixe discrètement chevelure de poney et constate qu'il paraît stressé, les yeux fuyards. A-t-il peur qu'on se fasse prendre en train de discuter ? Peut-être. Je n'ai pas le temps d'approfondir la question qu'un nouvel élément attire mon attention. Un nom.

– Eren Jäger, monsieur !

Je me dévisse le cou et tente d'apercevoir la recrue qui vient de parler. Deux rangs devant moi, légèrement en diagonale sur ma gauche, se trouve mon centre d'intérêt, celui pour qui je suis ici. Eren Jäger. Il est dos à moi et je devine qu'il doit faire approximativement ma taille, je ne peux voir que ses cheveux bruns coupés court. Ce qui me frappe instantanément, c'est la prestance et la détermination qu'il dégage, je peux aisément deviner qu'il n'est pas là pour plaisanter.