53 ~ Pas à pas

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Dix caisses contenant chacune vingt kilos de patates, trois caisses contenant dix bouteilles de vin, une caisse contenant trente-cinq saucissons. Je jette un furtif regard autour de moi pour vérifier que je suis bien seule avant de glisser un saucisson dans ma veste. Où en étais-je déjà ? Ah oui, une caisse contenant trente-quatre saucissons, trente sacs de farine de 20 kilos, ...

Faire l'inventaire est décidément l'une des choses que je déteste le plus au monde. L'unique avantage que j'en tire, c'est que je peux piquer en douce dans les stocks des nouvelles cargaisons sans que personne ne le remarque. Je repère une caisse remplie de bouteilles d'alcool et hésite à en dérober une pour me l'enfiler ce soir. Je m'approche prudemment de la caisse et saisis une bouteille de whisky afin de mieux l'examiner.

– Rose ?

Je sursaute lorsque la voix d'Armin résonne dans mon dos et manque de peu de lâcher la bouteille de whisky. Je la remets à sa place et note le contenu de la caisse sur ma feuille d'inventaire avant de faire volte-face. Je vois la tête blonde d'Armin dépasser d'une étagère à l'autre bout de l'allée. En m'apercevant, ce dernier s'avance vers moi, un timide sourire sur le visage.

– Le caporal Livaï te demande, m'informe-t-il d'une voix nerveuse.

Je souffle bruyamment pour exprimer mon mécontentement tout en poussant la caisse pour la remettre à sa place.

– Qu'est-ce qu'il me veut encore cet idiot ? Il vient de m'envoyer faire l'inventaire !

Armin hausse les épaules et nous sortons tous deux de la réserve. Nous arrivons sur l'étroit escalier en colimaçon menant aux cuisines et je pousse un long soupir rien qu'à l'idée de devoir remonter toutes ces marches. Je tends mes béquilles à Armin qui les saisit, surpris, et m'assieds sur la première marche. Je monte ensuite laborieusement ce long escalier sur les fesses pour ne pas risquer de me rétamer avec mes béquilles, comme cela m'est arrivé à chaque fois que j'essaie d'emprunter cet escalier debout.

Armin m'observe faire en silence sans porter aucun jugement, et je l'en remercie. Après de longues minutes, nous parvenons enfin au sommet de l'escalier de l'enfer et je me remets debout. Armin me rend mes béquilles et nous traversons les cuisines et le réfectoire pour déboucher sur le couloir du rez-de-chaussée. Nous empruntons ensuite les escaliers menant au premier étage et je crois reconnaitre le chemin que nous empruntons. Mes doutes se confirment lorsque nous débouchons sur un cul-de-sac au fond duquel trône une unique porte. Celle-ci s'ouvre sur la tête souriante d'Hanji après qu'Armin ait toqué timidement.

– Ah vous voilà, sourit Hanji de toutes ses dents.

Hanji ouvre la porte en grand et nous invite à entrer. Percevant mon hésitation, elle m'attrape par le bras et me tire à l'intérieur sans me demander mon avis. Armin entre à ma suite et referme la porte derrière lui. Comme la dernière fois, Hanji me traine jusqu'à une chaise et me force à m'asseoir dessus. Je balaie la pièce du regard et suis étonnée de ne pas voir le gnome car, selon les dires d'Armin, c'est lui qui aurait demandé à me voir.

– Le caporal n'est pas là ? m'étonné-je.

A l'instant même où je prononce ces paroles, la porte du bureau s'ouvre une nouvelle fois sur le caporal Livaï. Le rictus au coin de ses lèvres n'augure rien de bien et mon visage se décompose carrément lorsqu'il prend la parole.

– Pourquoi cette question, merdeuse ? Je t'ai manqué peut-être ? ricane-t-il.

– Mais bien évidemment, quelle question ! rétorqué-je. Chaque instant loin de vous me parait durer une éternité.

Livaï me fusille de ses yeux acier et je lui rends son regard noir. Après tout, il l'a cherché. Le caporal traverse la pièce et va s'adosser à la fenêtre en face de moi, les bras croisés sur sa poitrine. Nous nous dévisageons un long moment en silence tandis qu'Hanji fait un boucan monstre dans une petite pièce rattachée au bureau.

A l'ombre des murs [Livaï x OC] | Wattys 2021 | Wattys 2022Où les histoires vivent. Découvrez maintenant