Mathis

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Aujourd'hui René fait un télétravail important avec un gros client. Vu que la présence de mon frère altère sa concentration, j'ai décidé de sortir avec lui. Je veux que mon mari soit au meilleur de sa forme. Axel et moi prenons un taxi pour aller prendre un pot dans un bar que j'adore, Le Barrios. Il ne connait pas cet endroit et c'est normal parce que c'est un bar exclusif. J'espère qu'il ne me fera pas une scène à notre arrivée, sinon je ne réponds plus de rien. Il est vrai que lorsque René frôle l'homicide je sors toujours la carte de l'enfant unique incompréhensif, n'empêche il me fait le coup je le castre !

Nous ne passons jamais du temps ensemble, ce serait intéressant de discuter dans la tranquillité et mieux se connaitre pour une fois. Je pourrais ainsi l'éclairer sur des sujets qu'il ignore comme ma sexualité et tout ce qui l'entoure. Je suis un peu égoïste sur ce coup, car j'attends sincèrement que mon frère ouvre les yeux sur son homophobie et comprenne une bonne fois pour toute que le fait que j'aime un homme ne change pas du tout qui je suis. Mes parents peuvent avoir tous les a priori du monde, ça ne me dérange pas, mais mon frère est l'être le plus proche de moi, il serait juste qu'il prenne ma défense face à notre famille.

Je me sentirais moins seul.

À destination, Axel regarde autour de nous.

— Je ne suis jamais venu de ce côté de la ville.

— C'est normal, il n'est fréquenté que par la communauté LGBT. La majorité des commerces ne sont destinés qu'à un public averti. C'est sympa.

— Attends... Tu m'as fait sortir de la maison pour m'embarquer dans un pays loin des miens ? Loin de la normalité ? Loin de ma vie ?

Je lui claque la nuque.

— La ferme. Tu n'as donc aucun respect pour les autres ? Je te préviens, Axel Claude, tu n'as pas intérêt à m'énerver, alors descends d'un étage, guignol !

— Je ne suis pas obligé de rester là ! Je ne vais pas me laisser embarquer dans une ballade en territoire ennemi !

Je l'attrape par les épaules et lui fais un croche-pied en public. Il la ramène moins la tour Eiffel. C'est moi l'aîné ou pas ?

— Violence, toujours la violence. Tu ne connais que ça.

J'ignore ses paroles et le tire avec moi par le col du manteau. Il peut bien se débattre, je ne suis pas un poids plume. Il sait à qui il a à faire, je lui en ai fait baver quand nous étions enfants. Devant mon bar préféré, des passants rigolent en le regardant. Il se redresse, honteux. C'est dur de ma part, mais il a parfois besoin d'une bonne leçon. Pourquoi le visage de mon mari me vient à l'esprit ?

Nous pénétrons Le Barrios, une bonne odeur de bien-être nage dans l'air.

Ouais, mon chez moi.

— C'est cregnos, il n'y a que des mecs. Dis moi au-moins qu'une meuf va se pointer d'un moment à l'autre.

Tout d'un coup un arrière goût de regret me titille la langue.

— Ce bar est destiné exclusivement à la gente masculine, mais si c'est trop pour toi on peut aller ailleurs. Il y'a un café plus loin pour tout le monde, mais vu que tu veux absolument que nous t'aidions à y voir plus clair dans cette découverte de ton orientation, tu devrais t'assoir ici, le cadre est idéal pour observer autour de toi et faire ta propre opinion. Tu dois comprendre que les stéréotypes ont la vie dure, mais fais moi confiance que si tu restes l'esprit ouvert, tu seras bien surpris par la clientèle de cet endroit. Être gay, bi, pan ou tout autre orientation n'a rien avoir avec la couleur de peau, la culture, la personnalité, le niveau de vie et la viabilité physique d'une personne. Dans ce quartier les gens se sentent comme chez eux et sont eux-mêmes car il n'y a personne qui les jugera ou les insultera pour un ci ou ça. Alors frangin, juste pour une heure, pas plus, essaie de mettre de côté tes idées reçues et découvre de nouvelles choses.

Les Marron : Ménage à quatreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant