Axel

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Main dans la main, Max et moi retournons à l'hôtel. On se promet de visiter plus profondément les bois demain. On enfile à nouveau nos peignoirs juste pour regarder la télé dans la chambre. Je veux qu'il continue où on s'était arrêté, mais je ne veux pas le brusquer. Il a vraiment eu une enfance compliquée, et maintenant j'arrive un peu à comprendre à qui j'ai à faire. Je ne doute pas que son envie irrépressible de participer à ce concours est surtout en mémoire de sa défunte sœur. Cette Christina doit beaucoup lui manquer, je suis affreusement désolé pour lui. Je me demande de quoi elle est morte et si son père en est responsable.

Même s'il a déjà plusieurs soeurs, je crois que le manque est toujours là. Si jamais je perdais mon frangin aussi jeune... Je ne pourrais pas le supporter. Je ne sais pas s'il y a une possibilité d'oublier, un décès est un décès.

— Si tu continues de me fixer comme ça, tes yeux vont tomber, sourit-il.

Ah.

Je lui rends sa bonne mine.

— Je sens que tu veux connaître la suite, avoue.

Mon sourire disparait, je baisse les yeux sur mes cuisses. Oui je veux savoir. Je ne peux le nier.

— Tu veux bien m'écouter ? dit-il.

Quelle question ! J'accepte d'un coup de vent. Mon blond affiche un sourire moins naturel, plus forcé. Nous entamons sûrement le pire de son passé. Je ne sais pas si je dois encore le serrer contre moi ou lui donner de l'espace en restant sur ce fauteuil. Je choisis la seconde option lorsqu'il s'adosse à la tête de lit, l'oreiller serré dans ses bras et ses jambes en tailleur. Il veut être dans sa bulle, je pense.

— Disons que plus rien a jamais été pareil après ça. Elle n'avait plus de matériels, plus d'argent, plus d'espoir. Ayant raté ses chances de participer à ce concours, elle a laissé tombé. Du moins... c'est qu'on pensait tous, car bien plus tard Christina s'est enfuie de la maison.

Bon sang.

— Elle est partie un an plus tard. Elle a dit que j'étais assez mature maintenant pour m'occuper des autres à sa place, elle n'avait plus rien qui la retenait parmis nous. Mes parents l'ont signalé à la police, mais ils ont dit qu'ils ne pouvaient rien faire parce qu'il fallait attendre quarante huit heures. Je savais où elle allait car elle m'avait réveillée cette nuit-là pour me dire adieu.

— Adieu ?

Il cache un sourire triste derrière l'oreiller.

— Elle était du genre à toujours en faire trop. Une vraie piplette au coeur tendre. Elle est partie rejoindre son petit ami, un mec plus vieux qu'elle m'avait présenté juste une fois, je ne l'aimais pas ce gars. Il avait l'air plus intéressé à son physique qu'à sa personnalité. Elle ne m'a pas écouté sur ce coup, pour la première fois. Il avait promis de l'emmener en Italie où elle pouvait exprimer son talent à sa guise. Mouais, une seconde vie quoi.

Je l'observe qui rouspète parce ce qu'il n'y a rien de plaisant à la télé. Il n'a pas l'air en mauvais point, mais je crois qu'il joue juste la comédie. Ça me fait très mal de le penser. Je le trouvais déjà très fort sans connaître son histoire, aujourhui je suis encore plus impressionné. Il m'a écouté durant ce séjour, il a fait avec mon caractère, il a tenu bon sans jamais se plaindre ouvertement. Il m'a conseillé, soutenu et parfois réprimandé même si ça voulait dire que je lui tournais le dos. C'est étonnant de ce dire qu'en un mois, j'ai ressenti et vécu plus d'émotions avec lui que j'en ai vécu avec mes tous mes amis et proches.

— Bref...

Son visage est fermé, je m'inquiète. La télécommande est toujours dans sa main, mais ses yeux sont lointains. Ils brillent.

Les Marron : Ménage à quatreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant