Maxence

460 85 66
                                    

Nicolas me retient de poursuivre Axel.

— Lâche moi, bon sang !

— Non. Il faut qu'il grandisse, Max. Tu ne l'aides pas en te pliant ainsi pour lui !

— Qui es-tu pour me dire ce que je dois faire ?

— Un ami qui te veux du bien !

— Nicolas a raison, me réprimande Erwan, il ne faut plus lui courir après comme ça. Ne vois-tu pas qu'il se fiche complètement de tes sentiments ? Il n'a cure de ta douleur et tes émotions, il est centré sur sa propre personne. Axel n'est pas comme nous.

Je tire violemment sur mon pull pour me dégager de la poigne de mon aîné. Je les vise d'un regard noir et déçu.

— Il n'est pas comme «nous» ? C'est quoi le «nous» pour vous ? Hein ? C'est quoi ? Des amis ? Des LGBT ? Des citoyens spéciaux ? Vous êtes sérieux ? Car moi je ne sais pas de quoi vous parlez ! Vous vous rendez compte de ce que vous avez fait ? Vous êtes des adultes, des personnes ouvertes d'esprit et normalement plus matures que lui, cependant vous avez réagi au quart de tour sans tenir compte de ses insécurités et des ses idées préconçues.

— Il fallait que quelqu'un s'en charge, soutient Hugo. Il nous mettait les nerfs à vif, on en pouvait plus.

— Alors vous vous êtes servis de moi comme une excuse !

Vu leurs traits nerveux, j'ai tiré dans le mil. Ils avaient des comptes à régler. Je suis si déçu.

— Vous l'avez attaqué physiquement, dégradé son intégrité et peut-être exacerbé sa haine juste parce que nous en aviez assez de lui. Je n'ai pas eu mon diplôme de psychologie, mais je sais parfaitement que vous avez eu tort ! Vous pensez vraiment que je n'ai jamais eu envie de lui arracher la tête avec tous ses a priori ? Que je n'ai jamais songé à quitter cette chambre et le laisser dans son déni perpétuel ? Eh ben si ! Ça m'a traversé l'esprit plusieurs fois, parce qu'il est parfois insupportable, mais je ne l'ai pas fait. J'ai choisi de ne pas le faire, bon sang.

— Personne n'a ta patience, soupire Shen. Tu dis ça parce que tu es amoureux de lui, si tu le voyais comme nous on le voit, tu arrêterai de le défendre.

— Ce n'est pas contre toi ou lui, ajoute Kelly, mais c'est pour tout ce qu'il représente au quotidien. Il en est encore à croire qu'être attiré par le même sexe est «soignable». C'est grotesque et insultant pour toutes les personnes qui souffrent de part le monde, tu devrais le savoir. Ce n'est pas à nous de t'en parler, tu es gay.

— Et alors ?

Ils s'exclament tous, surpris par mon interrogation. Alban et Sam qui étaient encore debouts, reprennent place sans me quitter des yeux. Je connais ce regard, je l'ai déjà reçu plusieurs fois parce que personne ne comprenait ma démarche et ma façon de voir le monde qui n'est pas «logique».

— Vous pensez qu'Axel est une menace ? Pour qui ? Moi ? J'ai été harcelé toute mon adolescence jusqu'à ce que je décide de quitter l'université et fuir le domicile de mes parents parce que je n'étais plus à ma place. Soixante-dix pourcent de ces fois là ce n'était pas des agressions dus à ma sexualité. Pas du tout. Je n'ai jamais caché mon attirance pour les garçons, donc j'ai été torturés par des individus plus forts que moi qui n'acceptaient pas mon choix, cependant que vous le croyez ou non, ça ne m'a pas empêché de trouver cette lutte moins insupportable que d'être harcelé parce qu'on est plus petit, plus faible. Vous croyez que les garçons et filles qui me brimaient en permanence pour mon physique savaient que j'étais gay ? Non. Est-ce que ça veut dire que les blessures me faisaient moins mal, eh ben pas du tout ? J'ai souffert bien des fois, et chaque fois que je recevais des insultes sur les réseaux ou que j'étais poussé dans les couloirs ou que j'étais même mis de côté dans mon équipe au lycée, je me fichais d'avoir un homophobe ou non face à moi. Ça n'avait plus d'importance à la longue parce que j'ai appris à me battre contre tous. Je ne laisse aucune discrimination m'atteindre.

Les Marron : Ménage à quatreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant