Axel

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Après un bon repas, je lui propose que nous allions nous promener hors de ce centre. Je suis fatigué de cet enfermement. Nous avons le droit de porter nos vêtements hors de l'établissement, tant mieux ! Enfin habillés, nous prenons une carte du centre à l'accueil pour ne pas nous perdre. Ça ne serait pas malin.

Nous allons dans les bois, lui derrière moi, tandis que je fais office de guide. Il s'attèle à prendre des photos de la nature avec son téléphone.

— Je savais qu'une bonne marche te ferait le plus grand bien, lui dis-je tout sourire.

Dos à moi, je ne vois pas son visage, je ne sais pas s'il est aussi souriant que moi. Il n'a pas été hostile après notre sortie de la salle de massage, je suppose que mon refus ne l'a pas ébranlé, sinon il ne serait pas venu jusqu'ici avec moi.

Son portable se met à sonner, il décroche après avoir vérifié. C'est sa mère. Il est très enjoué de lui parler, je reste un peu plus en retrait pour lui donner de l'espace. Pendant ce temps, je vois des champignons très intéressants dans le coin. Curieux, je prends une photo en espérant que je vais trouver son nom et son espèce.

— Mam, j'ai vingt-quatre ans, c'est trop tôt de penser à ça, rit-il.

Je souris quand j'entends son rire naturel. Ah, c'est quoi cette plante ? Je ne l'ai jamais vu. Je m'amuse bien dans cet endroit, je suis dans mon élément. Découvrir de nouvelles plantes inconnues à ma collection. Le truc de Mathis c'est la porcelaine et la mienne c'est la flore.

— Non.

C'est quoi cette froideur soudaine ?

— Tu sais que je ne veux pas en parler, si c'est pour cela que tu m'as appelé alors ça ne sert absolument à rien. D'ailleurs je suis en ballade, je vais bientôt manquer de réseau. Je t'appelle demain, Mam. Salut.

Il lui raccroche au nez. Il est suicidaire ? Je fais ça à ma mère je peux dire adieu à mon avenir, même mon frère n'a jamais essayé. Il préfère ne pas répondre que de décrocher pour lui raccrocher au nez.

— Euh... alors ? Elle voulait quoi ?

Il range son portable dans la poche de son blouson en cuir.

— Pas grand chose, conclut-il fermement.

Loin de moi l'idée que je suis intrusif, mais ça ne ressemblait pas à «Pas grand chose». Malgré cela, je ne peux pas le forcer. Je ne suis pas en position de le faire. Au lieu de ça, je veux parler d'un sujet qui me tient à cœur.

— J'aimerais te demander, commencé-je. Comment s'est passé ton Coming out ? Je sais que tu as décidé de partir de chez tes parents très tôt pour vivre ta vie comme bon te semble, mais tu ne m'as pas encore raconté ce qui s'est passé avant que tu en viennes à prendre cette décision.

Il marche devant moi, les mains dans la poche. Son silence est stressant, peut-être ne va-t-il pas me répondre ?

— Très mal. J'ai reçu des coups pour ça.

Quoi ?

J'arrête juste pour observer son dos. Ses parents l'ont frappé ?

— C'est mieux que tu comprennes le contexte, dit-il. Je suis le seul garçon de mes parents dans une famille de six enfants, normalement sept, mais une de mes soeurs est décédée. Je n'ai pas eu la chance d'être aussi grand que mon vieux. Mon paternel à presque deux mètres, tu imagines l'ironie. Ce détail physique avait tendance à l'énerver chez moi, il me trouvait grotesque.

Grotesque ? Sérieux ?

Moi j'ai l'air du fils du voisin avec la mienne. Ma mère et mon père sont élancés, Mathis dépasse mon père de quelques centimètres. Et puis il y a mois qui fait tâche avec mon physique de girafe. Ma mère m'a toujours appelé sa <<girafe claugnon>>, un surnom que j'ai souvent détesté. Bien qu'avec le temps j'ai commencé à m'en orgueillir car je pouvais regarder mon frère et ses amis de haut. Pour moi c'était devenu un moyen parfait de rendre les autres jaloux, même si en réalité ça ne servait à rien en général. Se courber devant des portes trop petites, les lits ne sont pas toujours assez grand parfois, toujours à me tortiller dans certaines voitures. Je commande mes vêtements en ligne, surtout les pantalons. Des tas d'inconvénients.

Les Marron : Ménage à quatreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant