96

820 85 7
                                    

EUGÉNIE

-Tu as faim ?

-Je devrais me décoller de toi et je pense pas en être capable. Et j'ai pas faim.

Mon ventre gargouilla, trahissant qu'en réalité je mourrais de faim.

-Menteuse.

-Je ne veux pas te lâcher.

J'avais l'impression que si je le lâchais, mon monde s'effondrerait.
Il s'était déjà effondré quand j'avais regardé le résultat mais les bras de Raphaël maintenaient tous les morceaux en place.

-Tu veux manger quoi ?

-Rien.

-Gèn...

Je fermais les yeux un instant pour me retenir de pleurer, encore.

J'avais tellement eu peur de sa réaction.
La mienne avait été stupide, qui prenait une douche de trois heures en découvrant qu'elle était enceinte ?
Je reverrais toujours la décomposition du visage de Raphaël quand il m'avait trouvé puis qu'il avait vu le test de grossesse.

À quoi je m'attendais de sa part ?
Il avait été parfait, comme toujours.
Il avait sacrifié son concert de ce soir, il ne m'en voulait pas pour mon mensonge et il l'était encore plus en se préoccupant de ce que je voulais manger après m'avoir gardé plusieurs heures contre lui.

-Je ne sais pas, j'ai mal au crâne.

-Je vais regarder ce qu'il y a dans les placards.

Je le suivis pour aller m'échouer dans le canapé, emmitouflée dans un plaid.
Je le regardais ouvrir tous les placards puis le frigo.

-Il n'y a strictement rien. Tu veux un kebab ?

-Ketchup et sauce blanche ?

-Sans oignons.

-Je viens avec toi.

-Non. Tu restes ici. Je fais vite.

Il était sortit de l'appartement avant que je puisse riposter.
Je n'étais encore vêtu que du peignoir dans lequel il m'avait emmitouflée.
Je retournais dans la salle de bain et après une vraie douche, je m'enroulais dans une serviette puis pris le morceau de plastique resté sur le rebord du lavabo.

Aucun doute.
J'avais un polichinelle dans le tiroir.
Une brioche au four.
J'étais à cours d'expressions.
Et de larmes aussi.
Je me sentais comme une gamine qui venait de faire une bêtise.
Une grosse bêtise.
Comment j'avais pu être aussi stupide ?
Confondre la semaine de placebo avec une semaine normale ?
Pile au moment où j'allais voir Raphaël pour un week-end !
Pile au moment où l'on s'était jeté l'un sur l'autre comme des animaux en rut !

Je me mis de profil et plaquais la serviette contre mon ventre.
A peine deux mois, ça ne se voyait pas du tout.

-On voit rien du tout.

Mon regard accrocha celui de Raphaël dans le miroir. Il était adossé contre l'encadrement de la porte et détaillait lentement ma silhouette.

-T'as fais vite.

-Je ne voulais pas te laisser trop longtemps.

-Je vais m'habiller.

Il hocha la tête et posa ses lèvres sur mon front quand je passais à côté de lui.

-Je t'aime. Me glissa t-il.

Mes bras s'enroulèrent tout seul autour de sa taille.

-Moi aussi je t'aime. Plus que tout.

ComèteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant