Chapitre 10

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Je suis tellement prise dans notre conversation que je n'ai même pas réalisé que le soleil s'était couché.
— Je crois qu'il est temps de rentrer, souffle Rafael.
Je le suis jusqu'à sa moto et cette fois-ci je n'hésite pas à m'accrocher à sa taille.
— C'est bon ?
Je hoche la tête. Il démarre. Les lumières passent à toute vitesse devant mes yeux. Fermement accrochée à Rafael, je souhaiterai que cette balade dure des heures. J'ai passé une superbe soirée et je n'ai pas envie de revenir à la réalité. Je n'ai pas envie de retrouver un Rafael désagréable maintenant que j'en connais un peu plus sur lui, maintenant que je sais ce qu'il est capable d'être.

Nous arrivons chez moi beaucoup trop rapidement à mon goût. Il se gare sur le trottoir en face de la maison des Fuentes, éteint le moteur et descend de la moto.
— Santiago était super content d'avoir mangé avec toi, je crois qu'il t'apprécie.
Je pense qu'il apprécie surtout les trois assiettes que Madame Fuentes lui a servies.
— Au moins un Sanchez qui a du goût.
Il s'humecte à nouveau les lèvres, mon regard se perd sur celles-ci et je ne sais plus quoi dire.
— Un Sanchez libre de fonder la famille qu'il désirera plus tard, attend dix ans et tu auras peut-être ta chance.
Je m'approche d'un pas, amusée.
— Santiago n'est pas vraiment mon type.
Sa main tatouée glisse sur la mienne, il joue avec mes doigts. L'ambiance est si lourde que je suis sûre que nos hormones respectives peuvent se sentir à des kilomètres.
— C'est quoi ton type alors ?
Sa main enlace désormais la mienne, il me tire un peu vers lui. Mon cœur s'accélère.
— Ceux qui savent ce qu'ils veulent.
Sur ces mots, je retire ma main, fière de moi. Rafael rit et hoche la tête. Je décide alors que c'est le bon moment pour partir.
— Ruby ?
Arrivée sur le trottoir d'en face je me tourne.
— Oui ?
Il monte sur sa moto et s'apprête à enfiler son casque.
— Ce que je t'ai dit tout à l'heure en espagnol, ça veut dire que « tu es précieuse ».
Je sens le rouge me monter aux joues. Il enfile son casque et ouvre la visière.
— Et je le pense.
Puis, il redémarre et disparaît en quelques secondes.
Je monte les marches et passe la porte d'entrée le sourire scotché aux lèvres, sourire qui s'évanouit à peine entrée dans le couloir.
— Tu es déjà rentrée.
La lumière s'allume, Madame Fuentes se tient devant moi en robe de chambre, un verre d'eau à la main.
— Oui.
Je bredouille gênée et ajoute qu'on a mangé tôt.
Elle pose le verre sur la table de la cuisine.
— C'est gentil de la part de Lucrecia de t'avoir déposé, je ne savais pas qu'elle avait une moto.
Prise sur le fait, je ne peux plus mentir.
— Je peux vous expliquer.
Alors que je m'attendais à un discours moralisateur, Madame Fuentes réagit d'une tout autre façon.
— Peu importe qui est ce garçon, des tatouages qu'il arbore où les gens qu'il fréquente. Si il te plaît, c'est que son cœur doit être pur.
Ma lèvre inférieure tremble, j'ai envie de prendre Madame Fuentes dans mes bras, mais je n'ose pas. Alors je me contente de sourire et de la remercier.


Cette semaine me paraît plutôt longue. Je n'ai pas arrêté d'enchaîner le travail et l'association. Rafael est encore absent, Lucrecia a donc besoin de moi plus que d'habitude. Je n'ai pas revu Rafael depuis notre « rendez-vous », Santiago ne vient plus non plus. Lucrecia dit qu'il a des affaires personnelles à régler donc plus clairement : quelque chose se trame chez les Scorpions, quelque chose qui ne sent pas bon du tout.
— Ça arrive souvent ?
Nous venons de fermer l'association, Lucrecia fume une cigarette devant les locaux vides. Je ne la vois que très rarement fumer, elle essaie d'arrêter.
— Souvent je ne sais pas, mais ça arrive.
Elle écrase sa cigarette et me demande si je peux venir demain.
— Oui, je viens dès que j'ai fini le travail à la boutique.
Elle monte dans sa voiture et démarre sur le champ. Quant à moi je sors mon portable, j'hésite à envoyer un message à Rafael. Je me demande s'il va bien. Qu'est-ce qu'il peut se passer de si sérieux pour qu'il ne vienne pas à l'association durant toute une semaine ? Je range mon portable, réalisant que ce ne sont pas mes affaires. Sur la route je réfléchis à toute cette histoire de gang, ce que Rafael m'a expliqué sur la descendance, l'héritage du gang qu'ils doivent poursuivre. Que se passe-t-il si quelqu'un refuse d'en faire partie ? Il a dit que son père était un membre des Scorpions, ça signifie qu'il ne l'est plus ? Alors rien n'est définitif, enfin, je crois.

Dusk 'till DawnOù les histoires vivent. Découvrez maintenant