Deux semaines que nous sommes rentrés de San Francisco. Rafael a raison, ils ont gagné du temps face aux Requins. Tout est paisible ces derniers temps. Et même si je sais que c'est le calme avant la tempête, je finis par imaginer que ça restera peut-être ainsi un long moment.
Je viens de quitter la boutique, je suis officiellement en week-end. Je suis supposée passer chercher des affaires et aller chez Rafael passer la nuit. À peine arrivé chez moi je reçois un message « amène une jolie robe, ou une tenue sympas » je fronce les sourcils, Rafael et moi ne sommes toujours pas publiquement un couple, je doute fort qu'il veuille m'emmener quelque part. Je ne cherche pas à comprendre et prends plusieurs tenues différentes, pour être sûre.
Comme chaque fois que je viens chez lui, il ne me laisse que rarement patienté devant la porte, pour éviter que qui que ce soit ne me voit entrer chez lui. Au début c'était presque vexant, mais je m'y suis fait. Je suis tout de même nostalgique de San Francisco, où nous pouvions nous balader main dans la main et manger ensemble en dehors de son appartement.
— Super, tu es à l'heure.
Il porte une chemise bleue marine et un pantalon noir, ses cheveux sont ordonnés et il est parfumé. Même pour travailler à l'association il n'est pas aussi classe.
— On est supposés allez quelque part ?
Je ne suis pas du genre à oublier quand on me dit quelque chose, je m'en souviendrais si Rafael et moi devions sortir ensemble quelque part. Mon petit ami pose ses mains sur mes épaules et m'embrasse.
— Ce n'était pas prévu mais c'est l'anniversaire de Paloma ce soir, et j'aimerais que tu viennes.
Je mets une petite seconde à me souvenir de qui est Paloma : sa belle-mère.
— Tu veux que je vienne avec toi ? Chez tes parents ?
Mon cœur accélère directement, je me mets à penser à un milliard de choses. Rafael sourit et passe une mèche de cheveux derrière mon oreille.
— Ce n'est pas comme si on venait de se rencontrer toi et moi, c'est important que tu rencontres mes parents.
Je suis flattée, je veux dire : On ne présente pas ses parents à n'importe qui, du moins j'imagine. Mais je n'ai jamais rencontré de parents de ma vie, en tant que petite amie du moins. Je connais ceux de William, mais pour eux je n'étais qu'une bonne amie. C'est ce que j'avais demandé à William de dire, ça m'importait peu qu'ils m'apprécient ou pas. Mais là c'est une tout autre histoire.
— Et s'ils ne m'aiment pas ?
Rafael prend mon menton et me force à le regarder.
— Il n'y a pas de raison, ils vont t'adorer.
La pression est grande, j'ai bien fait de prendre plusieurs tenues. Pour un garçon c'est simple, une chemise et le tour est joué. Et si je viens trop habillée ? Je monte à l'étage et étale tous mes vêtements sur le lit. Je dois prendre quelque chose qui ne soit pas trop vulgaire. Je dois aussi avoir l'air d'avoir fait un effort, donc pas quelque chose de simple. Mais je ne veux pas en faire trop non plus. J'essaie plusieurs combinaisons de vêtements différents. Rafael finit par monter me demander ce qui me prend autant de temps.
— Je n'arrive pas à me décider, dis-je simplement.
Il regarde les vêtements étalés sur le lit et pointe un chemisier de la même couleur que sa chemise.
— Celui avec les oiseaux blancs ?
Il hoche la tête. Je prends le chemisier et le jauge, il est bien sans trop en faire.
— En plus on sera assortis, plaisante-t-il.
Va pour le chemisier. Je l'enfile et ajuste mon pantalon avant de me placer devant le miroir.
— Un peu de maquillage et des boucles d'oreille et ça fera l'affaire.
J'ai passé trop de temps dans la salle de bain, à tel point que Rafael est passé chez le fleuriste sans moi en attendant que je finisse de me préparer. J'ai laissé mes cheveux détachés, je sais que c'est comme ça que Rafael les aime et je dois avouer que je commence à les apprécier comme ça aussi. La quatrième paire de boucles d'oreille plus tard, je suis enfin décidée. Ne reste que la touche de mascara.
— Oh mon Dieu, tu es enfin prête.
Rafael me regarde de haut en bas avant d'applaudir lentement.
— T'en fais trop.
Il regarde l'heure sur son portable.
— Ça ne t'aura pris qu'une heure et demie pour choisir des vêtements et les mettre.
Nous nous retrouvons à la voiture, le cadeau et le bouquet de fleurs posés sur le siège arrière. Je me regarde une dernière fois dans le miroir du pare-soleil.
— J'aurai peut-être dû mettre du rouge à lèvres ?
Rafael fronce les sourcils.
— On va manger, tu n'as pas besoin de rouge à lèvres.
Il démarre. Je fais courir mes doigts sur mes genoux, angoissée. Il finit par poser sa main droite sur la mienne pour me stopper.
— Tu sais que Santiago t'aime déjà, t'as un point d'avance.
Je souris en réalisant qu'il a raison, je ne suis pas en terrain inconnu ce soir, en tout cas pas entièrement.
— Qu'est-ce que tes parents ont dit quand tu leurs a dit que je venais ?
Rafael ne répond pas directement, il reste même trop longtemps silencieux.
— Rafael, dis-moi que tu as prévenu tes parents de ma venue ?
Il grimace.
— Oui, en quelque sorte.
Mon cœur se remet à palpiter à tout rompre.
— En fait, je leur ai dit que je ne venais pas seul, ils doivent penser que Javier m'accompagne.
Je déglutis et prends ma tête entre mes mains.
— C'est une blague ?
Il garde les yeux fixés sur la route et moi je commence à réfléchir à la meilleure façon de me jeter de cette voiture sans trop me blesser.
— Ils vont être ravis que je ramène une fille, je crois qu'ils commençaient à croire que j'avais changé de bord à force d'amener Javier à tous nos repas familiaux.
Je regarde par la fenêtre de la voiture, reconnaissant la rue où ses parents vivent, il est trop tard pour faire demi-tour. Il se gare et se tourne vers moi.
— Fais-moi confiance.
Je ferme les yeux et prends une longue inspiration. Allez Ruby, tu peux y arriver.
La porte d'entrée s'ouvre, une femme apparaît. Elle ne semble pas encore avoir cinquante ans mais elle s'y approche. Elle a des cheveux châtains foncés attachés en un beau chignon élégant. Ses yeux bruns rappellent ceux de Santiago, ils sont un peu plus clairs que ceux de Rafael, elle a d'ailleurs exactement le même nez que lui son fils. Son regard tombe directement sur moi, oubliant de saluer Rafael.
— Bonjour, dis-je en sortant mon plus beau sourire, et joyeux anniversaire !
Elle répond de la même façon et me remercie avant de s'adresser à son beau-fils.
— Rafael, je ne savais pas que tu amenais une fille.
Elle lui prend le bouquet des mains.
— J'ai cru comprendre que Javier venait, ajoute-t-elle confuse.
Rafael s'essuie les pieds sur le tapis et entre dans l'entrée derrière sa belle-mère.
— C'est moi qui n'ai pas précisé, je voulais vous garder la surprise.
Je le suis de près, silencieuse.
— Guillermo, Rafael est là! Appelle Paloma.
Elle ne cesse de me lancer des petits sourires. Le père de Rafael apparaît alors, toujours ce regard sévère sur le visage. Les hommes de cette famille peuvent avoir vraiment l'air intimidants.
— Salut papa, je te présente Ruby.
Rafael passe son bras autour de ma taille. Paloma se tourne vers son mari, enjouée.
— C'est sa petite amie, se presse-t-elle de préciser en le devinant.
Monsieur Sanchez hoche la tête poliment et me souris.
— Enchanté Ruby, j'espère que Rafael ne t'as pas dit trop de mal de nous.
Il plaisante ? Le sourire qui s'affiche sur son visage m'indique que oui.
— Non ne vous inquiétez pas, je n'ai entendu que du bien.
Ok, je me relaxe, ils sont cools. Plus de raisons de stresser.
— On peut aller dans le salon se servir un verre, propose Paloma.
Rafael tend le paquet cadeau à son père et me prends la main. Leur maisons est simple mais très personnelle, il y a beaucoup de vieux meubles et des tas de photos, comme chez les Fuentes. Je n'ai pas le temps de m'attarder sur celles-ci car Rafael file directement jusqu'au salon.
— J'ai du jus de fruit, du rhum, du whisky...
Rafael accepte un verre de rhum, je me contente d'un jus de fruit, s'il boit, je conduis.
Nous sommes assis tous les quatre autour de la table basse à grignoter des olives et des roulés que Paloma a préparé en sirotant nos verres respectifs.
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Dusk 'till Dawn
RomanceRuby n'imaginait pas une seconde qu'en quittant San Francisco pour s'installer à San Diego, sa vie allait basculer. Tout semblait pourtant ordinaire : une chambre chez un couple de retraités, un petit boulot dans une boutique, quelques heures de sou...
