Un craquement me tire doucement de mon sommeil. Je ne sais pas s'il venait de mon rêve ou non, mais c'était assez perturbant pour me réveiller. Mes yeux mettent quelques secondes à s'acclimater à l'obscurité, Rafael à la jambe posée sur moi, son bras barrant mon ventre, il dort paisiblement. Il doit être très tard, où très tôt, le soleil n'est pas encore levé et la maison entière est plongée dans le noir, à tel point que l'unique source de lumière provient du voyant de mon portable en train de charger. Je décide de fermer les yeux à nouveau et reprendre mon rêve là où il en était. La respiration de Rafael me berce et je bascule tout doucement dans le sommeil... Un autre craquement. Cette fois-ci je n'ai pas rêvé, car je ne dormais pas. J'ouvre grand mes yeux, le cœur battant. On pourra dire ce que l'on veut sur les pressentiments, mais celui-ci me semble mauvais. Ce n'est pas juste un parquet capricieux : quelqu'un se trouve dans notre salon à quelques mètres de notre chambre.
— Rafael, soufflais-je le plus silencieusement possible.
Évidemment il en faut plus pour le réveiller. Je le secoue et repousse sa jambe tout en faisant le moins de bruit possible afin d'entendre les pas se rapprocher.
— Rafael ! M'empressais-je.
Je m'empare de mon téléphone et lui éclaire le visage.
— Hm ?
Il ouvre enfin les yeux, je m'empresse de lui faire part des bruits que j'ai entendu. Et alors que je m'attendais à ce qu'il me dise que j'ai rêvé, son regard s'ouvre entièrement, l'inquiétude pouvant se lire à travers de ceux-ci.
— Ne bouge pas.
Il se tire du lit en vitesse et reste silencieux. Il ouvre son tiroir et fixe quelques secondes ce qu'il contient. Il en sort une arme. Mon cœur s'arrête.
— Tu ne bouges pas, et au moindre problème tu appelles les Scorpions, dit-il en me jetant son téléphone.
Il s'approche de la penderie et me pose la batte sur le lit.
— En pleine tête, de toute tes forces, ne te retiens pas.
C'est un ordre, il sait que peu importe qui se trouve dans cet appartement, les choses vont mal tournées, je dois être prête.
Mon cœur bat si vite qu'il menace de sortir de ma poitrine, je regarde Rafael sortir de la chambre, silencieux. Je n'attends pas une seconde de plus et envoie un message d'SOS aux Scorpions. Dans le meilleur des cas ils viendront pour rien, dans le pire ... Je ne veux pas penser au pire.
En une fraction de secondes tout bascule, un énorme fracas éclate. Je n'ai aucune idée de ce qu'il s'est passé : une chose est sûre, je ne peux pas attendre patiemment dans ce lit. J'en sors et tiens fermement la batte de baseball. J'ai vu dans un film que l'un des points les plus importants dans le fait d'être piégé dans sa propre maison était le suivant : tu connais ton lieu de vie par cœur, pas ton agresseur. La nuit est ma meilleure amie. Je m'avance jusqu'à la porte entrouverte et contrôle ma respiration, si bien qu'elle devient imperceptible, j'ai besoin de repérer le moindre signe d'une présence. Les bruits continuent de venir du salon, des personnes se battent, je suis incapable de savoir combien ils sont, ni même si Rafael à le dessus. Une porte s'ouvre, celle de la nurserie, juste à côté de la nôtre. Ça va être mon tour. Un grand éclat résonne, je me mords les lèvres pour ne pas crier. Les craquements reviennent, je me place à côté de la porte, j'aurais le temps de frapper avant que la personne ne réalise que je ne suis plus dans le lit. Les pas s'approchent, pendant une seconde je prends conscience que ma vie est finie, une larme roule le long de ma joue. Puis, en moins d'une seconde, je réalise que ce n'est plus moi uniquement où même Rafael, mais que la vie de notre bébé est en jeu. Et comme toutes ces femmes que l'ont voit dans ces documentaires montrant le courage d'une mère protégeant son enfant, une montée d'adrénaline me prend : plus rien ne m'empêchera de protéger ma famille. La seule que j'ai. L'homme met un pas dans la chambre, il est prudent. Je prends une dernière inspiration et envoie la batte de toutes mes forces dans sa tête. La surprise m'aura servi, il tombe immédiatement, surpris par la violence du coup. Je l'ascèse immédiatement d'un deuxième coup, par prudence, il est assez sonné pour ne pas réagir. Les bruits de violence ne se calment pas, un coup de feu retentit, je mets ma main devant ma bouche et retiens un cri. L'arme de mon agresseur gis sur le sol, je l'attrape, avec un peu de chance elle est déjà chargée. Je marche le long du couloir, sans vraiment chercher à être silencieuse, avec le vacarme qu'il y a dans le salon, un éléphant semblerait discret. Je glisse l'arme sous mon t-shirt trop large, la tenant sous mon ventre pour la dissimuler tout en la tenant. De la bille remonte dans ma gorge, l'adrénaline n'est pas redescendue. Dans le salon, un corps gît sans vie, soulagée de voir ce corps vêtu de vêtements que je ne connais pas. Rafael tient son arme du bout du bras, un autre homme pointe la sienne sur lui de la même façon.
— Notre copain est très certainement en train de faire sa fête à ta femme
La lumière des éclairages extérieurs suffit à éclairer la pièce pour que je vois les deux hommes face à face.
— Ne sous-estime pas la femme d'un Scorpion, crache Rafael sûr de lui.
Je vois à son regard que la même dose d'adrénaline le traverse à cet instant. Une arme pointée sur lui et il ne cligne pas des yeux une fois. Il faut que j'agisse avant que l'homme ne se décide à appuyer sur la gâchette, ou pire que la victime de la chambre à coucher ne se réveille.
Si je pouvais les tenir 5 minutes de plus, les Scorpions auraient le temps de nous rejoindre. Mais nous n'avons pas 5 minutes.
— En parlant du loup, lance le tireur en croisant mon regard.
Rafael tourne la tête, il hurle un « Non » et profite de la seconde d'attention sur moi pour désarmer l'homme, lui donner un coup dans le genoux et lui tirer dans la nuque. Il tombe et commence à se vider de son sang, tout en grognant des injures. Alors que je pensais que le cauchemar se terminait, je sens quelque chose de dur dans mon dos. Quelque chose en bois appuie le long de ma colonne vertébrale.
— On a pas correctement fait les présentations ?
Mon sang se glace. Rafael pointe son arme sur l'homme, et sur moi par conséquent.
— Lâche ton arme où je lui fracasse le crâne avant que tu n'ais le temps de faire quoi que ce soit.
Il a raison, nous sommes trop proches tous les deux pour que Rafael puisse le viser sans risquer de me toucher, sans compter l'obscurité, qui pour le coup, ne nous aide pas. Je tiens l'arme fermement dans ma main, prête à agir, malheureusement je ne sais pas lequel de nous trois sera le plus rapide et je ne veux pas le savoir.
— Jette ton arme et mets toi à genoux, ordonne-t-il à mon fiancé.
Rafael serre la mâchoire, le regard meurtrier, il sait que s'il laisse tomber son arme nous sommes sans défense.
— Je vais te faire exploser le crâne, menace Rafael.
L'homme rit nerveusement, et approche sa bouche de mon oreille.
— Aussi hargneux l'un que l'autre.
Rafael ne baisse pas son arme, l'homme ne bouge pas d'un centimètre. Celui que j'imagine être un Requin donne un coup faible mais bien lancé dans ma jambe, pas assez pour vraiment me blesser mais assez pour me faire lâcher un cri de douleur.
— Mets-toi à genoux avant que je bute ta femme et ton gamin pas encore né ! Hurle l'homme.
Son ordre était si violent que j'ai sentis mes membres se mettre à trembler. Si Rafael ne coopère pas, l'homme n'hésitera pas à me faire du mal. Il n'a rien à perdre, il sait que c'est nous où lui. Il faut qu'il agisse vite. Je fais un petit signe de tête à Rafael pour qu'il comprenne qu'il faut qu'il l'écoute. Mon fiancé fronce les sourcils, je ne peux rien dire sans que l'homme ne m'entende et la pièce est trop sombre pour que Rafael puisse lire sur mes lèvres. Je lui fais à nouveau les gros yeux, l'homme hurle une seconde fois. Rafael abandonne et pose l'arme sur le sol et s'agenouille sans me lâcher du regard. Je ne flanche pas et il ne comprend pas pourquoi. Je n'ai pas lâché mon ventre et donc l'arme par la même occasion.
— Fais glisser l'arme jusqu'à moi !
Rafael s'exécute. Il fait glisser son arme jusqu'à mes pieds. L'homme m'ordonne de la ramasser, je me baisse difficilement, essayant de garder mon arme dissimulée et prend l'objet que je donne à l'homme. J'aurais pu m'en servir mais soyons honnête, je n'ai aucune idée de comment charger une arme. Le flingue de l'autre homme gît au milieu de la flaque de sang, ni Rafael ni moi n'avons le temps d'aller la chercher sans risquer de nous faire tirer dessus. Sans arme, Rafael n'est plus à son avantage, il est à genoux et ne me lâche pas des yeux. L'homme me contourne et s'approche de mon fiancé. La victoire au bout des lèvres, il pointe son arme sur lui tout en récupérant l'autre dans la flaque de sang, sans même prendre la peine de regarder son collègue sans vie. L'homme est tourné de façon à ce que je le vois de profil, il tient son arme sur Rafael. Je ne remarque que deux choses sur notre agresseur : son arcade est ouverte et une énorme traînée de sang à coulé le long de sa joue. Deuxièmement : il m'est familier. Son crâne rasé et ses tatouages dans le cou ne trompent pas. Il est celui que j'ai vu il y a quelques mois de ça chez Juan. C'est lui qui pointe son arme sur l'homme que j'aime et c'est moi qui l'ai conduit d'une façon ou d'une autre à notre appartement, nos vies, notre mort. Je n'ai plus d'autre choix que d'agir.
L'homme regarde Rafael avec un sourire satisfait, il a gagné, il le tient à genoux.
— Le leader des Scorpions, à genoux devant moi, à supplier pour sa vie.
— Je ne supplie pas.
Il colle son flingue à la tempe de mon fiancé.
— Pour l'instant.
Rafael n'a pas détaché ses yeux de moi, il a peur, peur de mourir devant moi, peur que je sois la prochaine. Mais il ne le montre pas.
— Je vais faire sauter ton petit crâne et faire de même avec ta femme.
C'est le moment que je choisis pour sortir l'arme de mon t-shirt, je la prends pleinement en main et la place le long de ma cuisse. En tout discrétion pour ne pas perdre l'effet de surprise. Notre ennemie est de toute façon trop occupé à se délecter du fait d'avoir le chef du gang ennemi à sa merci qu'il ne remarque pas qu'en voulant s'attaquer au roi, la reine l'a mis en échec. Les traits de Rafael se détendent en voyant mon arme. Il essaie de garder un visage neutre, mais il comprend désormais que tout n'est pas fini.
— Je t'ai dit de ne pas sous-estimer la femme d'un Scorpion, répond enfin Rafael d'un air satisfait.
Je lève doucement l'arme que je tiens à bout de bras. Je ne connais rien à tout ça, mais je suis certaine d'une chose : je dois tenir fermement l'arme pour ne pas qu'elle m'échappe à cause de la violence du tire.
Les mots de Rafael viennent à peine de raisonner que je prends une grande inspiration et vise l'homme en pleine tête. Celui-ci la tourne et avant qu'il n'ait pu cligner des yeux, j'appuie sur la gâchette et tire, espérant de tout cœur que l'arme était bel et bien chargée.
Les secondes suivantes restent floues, l'arme était bien chargée, j'ai eu l'homme. Et même si je l'avais raté, Rafael a profité de la surprise du tire pour prendre la deuxième arme tombée des mains de l'homme. Notre agresseur git sur le sol, Rafael tire une seconde fois sans prendre le temps de vérifier si l'homme était en vie ou non. Aucune prise de risque.
— No te metas con mi familia, hijo de puta.
Mes oreilles bourdonnent, l'adrénaline à fait place à quelque chose d'autre, quelque chose de bien moins cool. Je m'écroule sur le sol, les yeux complètement brouillés. Je crois que je fais un malaise.
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Dusk 'till Dawn
RomanceRuby n'imaginait pas une seconde qu'en quittant San Francisco pour s'installer à San Diego, sa vie allait basculer. Tout semblait pourtant ordinaire : une chambre chez un couple de retraités, un petit boulot dans une boutique, quelques heures de sou...
