Marissa pose sa main sur ma cuisse et me répète que les choses vont s'arranger mais je n'en écoute pas un mot. Le bus s'arrête et nous descendons l'une après l'autre. Je n'arrive toujours pas à croire que William ait fait ça. Rafael m'a appelé, enfin, après huit jours de silence et cet abruti s'est permis de répondre et de dire des choses complètement fausses à mon petit ami. Je le déteste, et la brûlure encore lancinante de la paume de ma main ne me soulage pas assez, il méritait bien plus qu'une gifle.
— Il ne répond à aucun de mes coups de fils, dis-je en montrant mon portable.
Marissa essaie de relativiser, ce qui est très sympa de sa part. Mais je crois que pour le moment, je veux simplement me plaindre et me dire que les choses ne font que s'empirer.
— Il m'appelle au milieu de la nuit et tombe sur mon ex qui lui dit que je suis couchée ! Qu'est-ce que tu te serais dit à sa place ?
Mon amie se mordille la lèvre.
— Je me serais dit que tu étais retournée dans ses bras.
Je hoche la tête pour appuyer sa remarque.
— Et si ce même ex te balance que ta petite amie ne veut plus revenir et qu'il n'est pas nécessaire de rappeler qu'est-ce que tu te dirais ?
— Que ma petite amie ne veut plus revenir et qu'il n'est pas nécessaire de rappeler ? répond Marissa sans vraiment savoir si c'est une bonne réponse.
Nous montons à l'appartement, je m'étale sur le canapé, maudissant ce foutue William.
— Envoie lui un message ! Explique-lui ! Tente mon amie.
— Lui expliquer quoi ? Tu penses sincèrement qu'il va avaler cette histoire de soirée sans broncher ? Il faut que je lui parle de vive voix. Si ça avait été l'inverse, je ne me serais pas contenté d'un simple message.
Le problème c'est qu'il ne décroche pas son téléphone et que je vais finir par devenir folle si nous ne discutons pas. Ça ne devait pas se passer comme ça. Il devait m'appeler et je devais lui dire à quel point il me manque, à quel point... à quel point j'ai peur et surtout à quel point j'ai besoin de le voir. Je n'arrive pas à penser de façon claire à tout ça justement parce que je n'ai pas pu discuter avec Rafael. Je sais que ce qu'il a fait est impardonnable et je ne sais toujours pas comment je suis supposée vivre avec cette terrible scène qui ne fait que tourner en boucle dans ma tête. Tout ce que je sais c'est que les choses ne peuvent pas s'arranger en restant tous les deux silencieux de nos côtés respectifs.
— Laisse-lui un peu de temps, essaie de me convaincre Marissa, appelle-le demain.
Je soupire et essaie de prendre en compte le conseil de mon amie.
— Va prendre un bain, repose-toi, essaie de te vider la tête.
Je hoche la tête et me lève du canapé, Marissa rejoint la cuisine et fait couler le café qu'elle n'a pas eu le temps de prendre chez William à cause de la façon dont je l'ai réveillé pour partir. Freya et Justin doivent probablement encore profiter de la chambre d'amis sans se douter une seconde de notre départ. William, quant à lui, à compris que je ne voulais plus jamais entendre parler de lui, plus jamais.
L'épisode des Frères Scott vient de se terminer, Marissa tire le plaid sur elle et réalise qu'elle n'a toujours pas réglé ce fameux problème de chauffage.
— Je vais téléphoner à mon père, dit-elle en se levant du canapé.
Les parents de Marissa ne vivent qu'à une vingtaine de minute d'ici, elle a toujours eu tendance à les appeler au moindre souci. Et ils accourent à chaque fois.
— Ils seront là dans une demi-heure, dit-il en raccrochant, je vais aller chercher des pizzas pour qu'on mange tous les quatre. Tu en veux une en particulier ?
Je lui réponds que je prendrais une classique quatre fromages.
— Ça marche ! À tout à l'heure, dit-elle en s'emparant des clés de l'appartement.
La porte claque et je me trouve toute seule pour la première fois depuis mon arrivée. Je regarde mon portable, il n'est pas encore vingt heures, aucun signe de vie de Rafael. Mon portable se met soudainement à vibrer entre mes mains, mon cœur manque un battement, mais le prénom de Lucrecia apparaît. Je m'empresse de décrocher.
— Ruby ! s'exclame-t-elle.
Je suis contente d'entendre sa voix.
— Désolée de ne pas avoir décroché la dernière fois ...
— Qu'est-ce que t'as foutue ?
Je réalise alors que Rafael lui a très certainement parlé du coup de la conversation qu'il a eu avec William.
— Ecoute, c'est juste un immense malentendu.
Mon amie se racle la gorge.
— Rafael ne semble pas être au courant, il est venu chez moi ce matin, il était furieux comme jamais.
Je presse mes paupières.
— Je sais, je sais. Mais c'est vraiment loin d'être ce qu'il s'est imaginé. J'ai essayé de l'appeler mais il ne décroche pas.
— Je sais, il a laissé son téléphone chez moi, soupire-t-elle.
Je pouvais toujours essayer de le joindre.
— Il a dit que tu ne voulais pas revenir, c'est vrai ?
Je reste silencieuse, bien trop longtemps.
— Je ne sais pas, si je veux revenir, c'est juste que...
J'ai peur de ne plus jamais retrouver l'endroit que j'ai quitté.
— Ruby, dit mon amie de la voix la plus calme possible, je sais que je ne devrais pas dire ça, mais s'il y a bien quelqu'un qui peut te comprendre actuellement c'est moi.
Toutes deux éperdument amoureuse du mauvais garçon.
Lucrecia prit une longue inspiration.
— Si tu as un doute, si tu veux abandonner cette vie, celle qui n'est pas la tienne. Si tu veux revenir à celle que tu étais, celle que tu voulais être avant tout ça. Fais-le, fais-le parce que ta vie n'appartient qu'à toi et un matin tu te réveilleras pleine de colère et de rancœur envers la terre entière parce que tu auras eu l'impression de vivre la vie de quelqu'un que tu n'es pas, que tu ne veux plus.
Je resserre la mâchoire.
— Rafael le comprendra mieux que quiconque, lui non-plus n'a jamais voulu de tout ça.
Je bloque ma respiration pour ne pas que Lucrecia entende les sanglots menaçant de pointer leurs nez.
— Prends le temps qu'il faut pour y réfléchir d'accord ? Mais sache que peu importe le choix que tu prendras, il n'y en aura pas de mauvais.
Je renifle trop bruyamment et la remercie. Elle me souhaite bonne soirée et raccroche pour rejoindre son mari qui vient de rentrer du travail. Je reste assise dans le canapé, les genoux ramenés à la poitrine, le regard complètement vide. William l'a dit, Lucrecia aussi. J'ai le choix de faire demi-tour, je peux revenir en arrière, je peux changer d'avis tant qu'il en est encore temps. Rafael ne m'a jamais retenue, il savait qu'on se retrouverait dans cette situation tôt ou tard. Il ne l'a jamais caché et je lui en ai voulu de penser que je voudrais partir, que je l'abandonnerais. Mais je crois que si, là tout de suite on me donnait le choix de partir sans lui faire de mal. J'y réfléchirais sérieusement. Des larmes dévalent mes joues, le cœur serré à l'idée même de ne simplement plus revoir Rafael, de ne plus le tenir dans mes bras, ne plus sentir son odeur, ne plus voir son petit grain de beauté filer dans les plis de son œil chaque fois qu'il sourit, ne plus l'entendre me dire qu'il m'aime, ne plus le tenir contre moi. La porte de l'appartement s'ouvre, Marissa pose les boîtes de pizza sur la table.
— L'odeur me donne l'eau à la bouche, j'espère que mes parents ne vont pas tarder.
Je m'essuie les yeux et essaie de reprendre mon calme, mais c'est trop tard, mon amie s'agenouille près du canapé.
— Qu'est-ce qu'il se passe ?
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Dusk 'till Dawn
RomanceRuby n'imaginait pas une seconde qu'en quittant San Francisco pour s'installer à San Diego, sa vie allait basculer. Tout semblait pourtant ordinaire : une chambre chez un couple de retraités, un petit boulot dans une boutique, quelques heures de sou...
