Chapitre 44

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Je sers d'appât. Ce n'est pas après moi qu'ils en ont, c'est après Rafael. C'est lui qu'ils veulent. Ils savent qu'il va venir pour moi. Tout paraît maintenant évident. Pourquoi c'en seraient-ils pris à moi sans raison ? J'aurais dû me douter de ce qui allait se passer. Avec la façon dont je me comporte depuis le début, j'aurais déjà dû être remise à ma place.

C'est un guet-apens. Ils l'attirent ici pour... Je n'arrive même pas à imaginer ce qu'il va se passer quand Rafael va arriver ici.
Je n'ai soudain plus du tout envie qu'il vienne. Il faut qu'il réalise que ce n'est pas un enlèvement mais un piège. Pitié qu'il soit assez intelligent pour le voir arriver et ne pas venir seul.

Je me suis assoupie à nouveau, mais le claquement de la porte me fait sursauter. Cette fois-ci ce n'est pas un mais cinq hommes qui entrent. Je recule jusqu'à être adossée au mur de la pièce, les regardant un à un, toujours cagoulés.
— Qu'est-ce qu'il se passe ? Demandais-je paniquée.
Aucun ne répond. L'un d'eux charge une arme, je me mets à crier de peur.
Callate idiota ! s'exclame l'un d'entre eux.
Ses quatre amis tournent la tête en sa direction, tous deviennent immédiatement silencieux.
J'aimerais leur demander s'ils font partie des Requins. Aucun d'entre eux ne semble avoir de chaîne avec une dent de requin mais peut-être se trouvent-elles sous leurs vêtements. De toute façon je suis bien trop effrayée pour qu'un seul mot sorte de ma bouche.
— Il arrive, souffle l'un d'eux.
Mon cœur se met à palpiter plus fort.
— On fait comment s'il tire ?
Un autre répond qu'il ne devrait pas avoir d'arme sur lui si tout est suivi à la lettre.
Tout est suivi à la lettre ? De quoi ils parlent ? À quel moment Rafael se pointerait ici sans arme ?
— Tenez vous prêt quand même, dit un autre près de la porte.
J'entends un énorme bruit de claquement de porte et devine qu'il n'est plus très loin. Les hommes se tiennent prêts à l'attraper au moment où il mettra un pied ici. Dans un dernier espoir je me mets à hurler :
— Ne viens pas ! C'est un piège !
L'un des hommes se jette immédiatement sur moi pour me faire taire mais je mords sa main.
— Ne viens pas ! m'époumonais-je.
Je me retrouve avec un bâillon sur la bouche avant de pouvoir dire autre chose. L'homme s'y reprend à trois fois avant de réussir à faire tenir le tissu entre mes dents. Je regarde avec fierté l'endroit où je l'ai mordu, il saigne sous chaque marque de mes dents. Mais autre chose attire mon œil, à côté de mes marques de dents, un dessin que je ne connais que trop bien. C'est la queue d'un scorpion. J'écarquille les yeux et regarde l'homme qui réalise que je viens de voir son tatouage. Qu'est-ce que c'est que ce bordel ?
La porte de la pièce s'ouvre et quelqu'un entre en trombe, évidemment que Rafael ne m'a pas écouté. Il attrape l'un des hommes qu'il colle contre le mur, le menaçant en espagnol. Je crie pour attirer son attention, il tourne la tête et son visage se décompose en me voyant. Il s'agenouille près de moi et me promet qu'il va me sortir de là. Aucun des hommes ne réagit, pas même celui armé.
— Diego ! Hurle-t-il en se tournant vers les cinq hommes.
Mais personne ne vient.
— C'est quoi ce bordel ? Jure mon petit ami entre ses dents.
Il analyse rapidement la situation : Cinq hommes, un armé, contre lui tout seul. C'est perdu d'avance. Pourtant il ne se démonte pas et s'attaque à l'un d'eux, il enfonce son poing sur le visage de l'homme, en colère. Malheureusement, celui armé colle son flingue sur l'arrière de la tête de Rafael et lui dit de lâcher son coéquipier. Je hurle à travers mon bâillon. Mon petit ami relâche l'homme et lève les mains en l'air.
— À genoux, lance l'homme d'une voix étranglée.
Rafael serre la mâchoire, l'homme répète l'ordre. Rafael s'exécute, à genoux, les mains sur la tête il regarde le sol. Je pleure à chaudes larmes en suppliant le ciel de lui venir en aide.
Rafael tourne les yeux vers moi, il ne pleure pas, au contraire, il semble plus sur de lui que jamais. Il lève alors la tête, le flingue se trouve désormais sur le milieu de son front. D'un mouvement bien trop rapide pour moi, il a pris le canon en main et a désarmé l'homme en face de lui. Il pointe désormais l'arme sur son propriétaire.
— Quelqu'un bouge et je lui fais exploser son putain de crâne, hurle-t-il.
Les quatre hommes reculent tandis que celui visé reste collé au mur.
— Diego ! Hurle à nouveau Rafael.
Je vois la colère, la noirceur dans les yeux de l'homme que j'aime. La phrase « J'ai changé depuis la mort de Javier » prend tout de suite tout son sens. Rafael n'a plus peur de la mort, il l'a trop côtoyé.
— Alors on veut jouer au plus malin, crache-t-il.
Le fameux Diego arrive enfin et nous regarde un à un, complètement désemparé.
— Raf, qu'est-ce que tu branles ? Lâche-t-il en voyant la scène.
— Donne moi mon flingue qu'on puisse les prendre un à un, siffle Rafael.
Diego répond qu'il n'a pas son flingue.
— Qu'est-ce que tu racontes ?
L'homme paraît complètement désemparé, ses yeux se posent alors sur moi. Il s'agenouille et vient me retirer mon bâillon et les liens que l'homme avait mis autour de mes poignets.
— C'est des Scorpions, dis-je immédiatement.
Le visage de Rafael s'assombrit d'autant plus. Il approche sa main de la cagoule de sa cible et la retire.
— Harrison ?
Il baisse immédiatement l'arme. Toute cette histoire n'a plus aucun sens. Les quatre autres hommes retirent leur cagoule à leur tour. Rafael les regarde un à un en crachant une suite de mots en espagnol.
— Ça ne devait pas aller si loin, râle Diego.
Je questionne l'homme du regard, de quoi est-ce qu'ils parlent ?
— Est-ce que l'un d'entre vous va me putain d'expliquer ce qu'il se passe avant que je ne décharge cet arme sur l'une de vos têtes s'agace Rafael.
Harrison se charge de répondre, en lui disant de se calmer.
— Cinq heures et trois minutes, dit-il en regardant sa montre.
Mon petit ami ne semble pas comprendre.
— Tu as mis cinq heures et trois minutes à la retrouver, sans aucun indice.
— T'as fait une putain de chasse au trésor avec la femme que j'aime où je rêve ?
Je ne sais pas si je suis supposée rire ou pleurer mais je n'aime pas du tout la tournure que les choses prennent.
— T'as agit El Dorado, t'as pas mis plus de deux minutes à comprendre, deux de plus à réfléchir et enfin deux autres pour monter un putain de plan qui t'as permis de la trouver.
— Je ne comprends toujours pas.
Alors Harrison explique : ils ont décidé de m'enlever. Tout était parfaitement réglé, certains Scorpions savaient, pour servir de taupe, d'autres n'avaient aucune idée de ce qu'il se passait. Ils ont mis le plan à exécution en sachant pertinemment que Rafael me trouverait, parce que c'est ce qu'ils voulaient prouver : qu'il était efficace.
— Mais dans quel but ? Répond Rafael complètement perdu.
— Tu dois être notre nouveau leader Sanchez, lui lance Harrison, on a besoin de quelqu'un comme toi aux commandes, on voulait que tu le réalises.
Rafael prend sa tête entre ses mains et répond que c'est beaucoup trop perché pour être réel.
— C'est ce qu'il fallait pour que tu réalises ! T'es né pour ça ! Tu dois le faire !
Rafael me montre du doigt :
— Sinon quoi ? Vous la descendez la prochaine fois ?
Il réalise qu'il n'a pas pris le temps de me demander comment j'allais et se précipite immédiatement vers moi en insultant les membres de son groupe.
— Vous êtes des putains de malades, des putains de foutus malades !
Il caresse ma joue.
— Ca va mon amour ? Putain je suis désolé.
Je lui réponds que tout va mieux maintenant.
— Quelqu'un t'as fait du mal ? Pourquoi tu ne portes pas tes vêtements ?
— C'est rien, je me suis vomi dessus.
Il se tourne à nouveau vers les autres.
— C'était vraiment nécessaire ? Vous ne pouviez pas simplement la kidnapper en lui disant la vérité et en la laissant dans un hôtel ?
Harrison répond que ça devait sembler réel.
— C'est le genre de trucs qui risque d'arriver Rafael, tu sais aujourd'hui que tu serais capable de la retrouver quoi qu'il en coûte.
Rafael lui répond qu'il aurait passé les prochaines semaines a écumer chaque bâtiment de cette ville pour me retrouver.
— Imagine à quel point ta logique, ton sens de la réflexion et ton sang froid pourrait servir en tant que leader !
Rafael tente de garder son calme, il plonge ses yeux sombres dans les miens et me murmure que tout est fini et qu'on rentre à la maison.
— Allez tous vous faîtes foutre, dit-il en se levant.
Il s'approche à nouveau d'Harrison.
— Et touchez encore un seul cheveux de Ruby et j'appuie sur la gâchette sans hésiter la prochaine fois.
Nous sortons de la pièce et nous retrouvons dans un bâtiment abandonné. Rafael me tient contre lui en me répétant à quel point il est désolé.

Dusk 'till DawnOù les histoires vivent. Découvrez maintenant