41. Démasqué

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Tous les regards se tournent vers moi. C’est cependant dans les yeux d’acier d’Adrien que je me perds. Dans ses pupilles écarquillées, je lis du choc, du chagrin, puis de la colère. Bientôt seul ce dernier sentiment persiste, envahissant tout son regard d’une lueur sombre. 

J’ouvre la bouche pour essayer de trouver quelque chose à répliquer. Je sais bien qu’il est inutile de nier ou de chercher à travestir la vérité. Mais je veux essayer de m’expliquer. 

— Je…je… 

Mes pauvres bredouillements s’interrompent bien vite sous le regard incandescent d’Adrien. 

— Est-ce vrai ? 

La question de mon Conjoint s’abat sur moi, lourde comme du plomb. 

Je baisse la tête. Mentir est désormais inutile. 

— Oui… 

Un silence assourdissant s’installe. Les Anti-Civiques me fixent sans exception, mais je ne m’intéresse qu’à la réaction d’un seul d’entre eux. Adrien reste parfaitement immobile, le visage fermé. Son regard est froid comme de la glace. Les secondes s’écoulent à un rythme extrêmement lent. J’ai l’impression d’être paralysé. Mon coeur pulse douloureusement et je peine à respirer. 

Adrien saute brusquement sur ses pieds. Je lève le regard vers lui, terrifié. Il se penche et m’attrape le poignet. Ses doigts serrent ma chair si fort que je pousse un gémissement de douleur. D’une secousse, il m’entraîne plus loin, à l’écart de la foule. Les Anti-Civiques nous regardent partir sans faire le moindre geste pour nous arrêter. 

— Tu… tu me fais mal, je bredouille tandis que nous traversons les rues délabrées. 

Pour toute réponse, le jeune homme me broie encore davantage le poignet et je n’ose plus me plaindre. Nous marchons encore quelques mètres puis Adrien me balance soudain contre un mur à moitié écroulé. 

— Je te laisse trois secondes pour t’expliquer. 

Je masse mon poignet endolori en essayant de retenir les larmes qui débordent de mes yeux. 

— Je… Je vous ai entendus, une nuit. Toi et cet autre type, ce Roman. Vous… vous avez parlé de moi. Tu lui a dit que j’étais facile à manipuler… Et que… que tu me parviendrais pas à faire de moi un Anti-Civique comme toi… Alors je… j’ai fait ce que j’avais à faire ! Je suis allé voir les Gardiens de la paix et… et… 

— Et ? répète Adrien, de sa voix glaciale. 

Il sait ce que je vais dire mais semble vouloir l’entendre de ses propres oreilles. 

Les premières larmes commencent à couler le long de mes joues. J’essaie de parler mais ma gorge est nouée. Mon Conjoint continue à me fixer, le visage sans expression. 

— Je… je, je continue en sanglotant. Je suis allé voir les Gardiens de la paix et… et je leur ai révélé ce que j’avais entendu. Je… Je n’avais pas le choix ! 

— Pas le choix ? répète Adrien à voix basse. 

J'essuie mes larmes avec ma manche, mais mon visage est presque aussitôt à nouveau trempé. 

— Le… le S… Système dit que… 

Je sursaute lorsque mon Conjoint approche soudain d’un pas jusqu’à se trouver à moins d’un mètre de moi, menaçant. 

— Parce que pour toi les ordres du Système sont plus importants que l’homme qui partageait ta vie ? Je n’étais donc rien pour toi ? Tu n’avais pour moi aucune affection ? 

Le Conjoint (bxb) [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant