Chapitre 2

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Chapitre 2

Kaïlie

Papa m'a conseillée de réaliser, en amont, le trajet jusqu'au lycée, afin que j'évite quelconque problème le jour-J qui a lieu dans quatre jours. Connaître la route m'empêchera aussi d'être trop stressée et de faire des bêtises. Sous l'emprise de l'angoisse, je suis capable de très vite paniquée et cela ne présage rien de bon. Étonnement, je n'y avais pas pensé, trop occupée à prendre des nouvelles de ma famille laissée dans le sud.

Je finis alors d'enfiler ma veste en jean sur mes épaules, le téléphone resté sur Google Maps, prête à faire feux. Je préviens Isabelle et papa de ma sortie et que si je ne suis pas rentrée dans deux heures, il faudra s'inquiéter, sur un ton d'ironie. Évidemment, même si je ne connais pas la grande ville qu'est Paris, je saurai me débrouiller. Elle est parfaitement desservie, en plus. Il y aura toujours une solution pour rentrer.

Je prends connaissance de l'endroit où se situe l'arrêt de bus qui m'arrêtera au lycée, mais je décide d'y aller à pied, pour connaitre le chemin. C'est bien de l'avoir en tête, au cas où il y aurait quoi que ce soit avec les bus. Après tout, on ne sait jamais et vaut mieux être trop prudente que pas assez.

J'ai les yeux plissés, rivés sur mon écran et tente de déchiffrer ce qu'il m'indique. Les graphiques ne sont pas du tout précis et j'ai du mal à savoir par quel chemin je dois passer. J'en viens même à me demander si j'ai pris la bonne route, car je me retrouve dans des endroits étroits.

Mais je fais confiance au service de mon GPS et continue malgré tout d'avancer, jusqu'à ce que j'arrive à une impasse. C'est alors que je comprends que le bon chemin était celui de gauche. Alors que je rebrousse chemin le souffle long, des voix m'interpellent dans mon dos.

— Je ne t'ai jamais demandé de la ramener, enfoiré !

Il ne faut que quelques secondes à mon cœur pour qu'il enchaîne les battements à m'en faire mal dans la poitrine. J'aurai dû me douter, que, comme dans chacune des villes, Paris a ses coins qu'il faut éviter, surtout en tant que femme. Alors que je devrais m'en aller, prenant mes jambes à mon cou, mon corps semble vouloir rester là. Je suis les différentes voix et un peu plus loin, à l'abri des regards et dans l'enfoncement, mes yeux grand ouverts découvre trois garçons debout, en train de violenter un de leur semblable, agonisant sur le sol.

Je masque ma bouche à l'aide de mes mains pour tenter de camoufler mon cris de surprise. Malgré la panique qui me gagne, je m'accroupie derrière une grande poubelle, qui doit sûrement appartenir à un des HLM qui m'entourent. L'odeur des détritus est nauséabonde mais cela m'importe peu et je l'oublie vite. Un de mes genoux se pose sur le sol pour retenir mon corps qui se penche sur le côté, pour tenter d'y voir un peu plus clair. Ils sont tous les trois en jogging et une sacoche leur sert d'accessoire. Je baisse les yeux sur leurs baskets TN et je comprends. C'est sans doute un règlement de compte entre une bande de petits foireux. Cela arrive souvent, malheureusement. Je roule des yeux, sans m'empêcher d'éprouver de l'empathie pour la personne au sol, que j'entends geindre. Mais alors que je me concentre sur celui-ci, je remarque qu'il sort du lot. Il porte une chemise en lin blanche et un bermuda bleu marine. Quant à ses chaussures, il s'agit de simple basket au blanc impeccable. Il ne me faut pas plus de temps pour assimiler ce qu'il se passe. Ils s'en prennent à quelqu'un qui n'est pas l'un d'entre eux. Je me sens nauséeuse et je ne supporte plus regarder la scène qui m'est infligé. J'aurai pu partir. J'aurai dû partir. Mais je suis comme clouée dans ce sol qui sent l'urine.

Les mecs continuent de le violenter de différentes manières et j'ai des haut-le-cœur qui me secoue l'estomac. Je dois faire quelque chose, au risque d'assister à un crime.

Love will save meOù les histoires vivent. Découvrez maintenant