12. Catriona

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Le retour au château fut calme. Toutes les trois encore secouées par les évènements restèrent muettes, assises sur les banquettes de satin. La vieille dame observa Catriona qui regardait par la fenêtre, perdue dans ses pensées. Sa robe, qui était des plus délicieuses ce matin même, était réduite à un large bout de chiffon brunâtre plein de terre dans lequel manquait des bandes de tissus déchirées. Ses cheveux, en pagaille, sentaient mauvais et étaient remplis de nœuds, de brindilles et de poussière.

Quand Catriona reconnut l'étang qui longeait la route, une larme perla sur sa joue qu'elle chassa du revers de la main. Bien que sa dégaine laissait à désirer, elle restait forte. La Noble voulait prouver que cette journée ne l'avait pas atteinte moralement.

Le carrosse s'arrêta et les dames descendirent. Mairhead fut étonnée de voir son amie dans un tel état, mais elle n'eut pas le temps de la rejoindre que la jeune femme se précipita jusqu'à ses appartements, tête baissée. Sa demoiselle de compagnie la poursuivit en l'appelant, mais Catriona lui claqua la porte au nez.

La brune s'appuya contre le bois qui les séparait et tenta de reprendre une respiration normale, de se recentrer sur son objectif; intérioriser ses émotions à tout prix.

Elle espérait vivement que personne ne l'ait remarqué dans les couloirs, mais avec Mairhead qui braillait son nom, ce but était largement compromis.

Evrard Le Gall l'avait sauvée de ces brigands. Evrard, souffla-t-elle avec le besoin d'entendre ce prénom à voix haute, avant de se laisser tomber dans le divan en face de la cheminée.

Son regard se porta sur le feu dont les bûches incandescentes craquaient sous la chaleur. Elle ne l'oubliera pas. Retiens-toi, se chuchota-t-elle alors qu'une goutte d'eau salée créait un sillon dans la terre collée sur ses joues rougies par le traumatisme.

Et un torrent de larmes perça sa coquille, l'éviscéra d'un coup si fatal qu'elle n'arrivait plus à s'arrêter de pleurer. L'abandon de son but la rendait amère, mais les sanglots étaient tels que reprendre son souffle lui devint presque impossible. À ce moment-là, elle sut qu'elle ne pourrait plus les contrôler. Ses bras serraient si fort son ventre que des traces se formaient sous le tissu, tandis que ses jambes se repliaient d'instinct contre sa taille, voulant se rassurer rien qu'un petit peu.

Avec fracas, la porte s'ouvrit et fit sursauter Catriona qui détourna la tête pour que personne ne la voie.

— Excusez-moi de vous avoir fait peur, Mademoiselle, Mairhead m'a demandé de vous faire couler un bain, lança la servante d'un ton détaché.

Incapable de parler, elle acquiesça d'un signe de la tête, restant de dos.

— Tout va bien, Mademoiselle ?

Elle réunit toutes ses forces pour lui répondre, mais sa voix resta fébrile.

— Oui, oui, merci.

La domestique repartit chercher de l'eau chaude, tandis qu'une seconde entra. Elle s'approcha de Catriona et soupira bruyamment.

— Quelle journée, lui dit-elle en la scrutant de bas en haut. Venez, nous allons enlever cette guenille.

Catriona se leva et se laissa faire. Elle commença par enlever avec délicatesse un ruban après l'autre, puis le reste de la robe déchirée, jusqu'à ce que la jeune femme se retrouve nue. La brune vit de la cuve en métal recouverte d'une toile blanche émaner de la buée. La servante la prit par la main et l'aida à y entrer.

L'eau chaude, roulant par petites vagues sur sa peau, la calmait doucement, alors que les frottements circulaires de l'éponge dans son dos détendaient ses nerfs crispés.

Bandit HeartOù les histoires vivent. Découvrez maintenant