Catriona s'était un peu calmée, mais son regard restait sombre et elle s'était enfermée dans un mutisme buté depuis plusieurs heures, malgré qu'il ait renoncé à l'attacher à la selle. Evrard trouvait que c'était bien plus divertissant quand elle l'injuriait. Il commençait à s'ennuyer. Pour un peu, il s'endormirait.
Mais comme il ne comptait pas redémarrer une nouvelle dispute, il décida de s'arrêter aux abords d'un petit ruisseau qui s'écoulait non loin de la route.
— On va se reposer quelques minutes, l'informa-t-il en mettant pied à terre. Je pense que cela vous fera du bien de vous dégourdir un peu les jambes.
Elle hocha la tête et descendit à son tour. La jeune noble s'agenouilla au bord du ruisseau et bu quelques gorgées d'eau claire dans sa main. Elle retira délicatement son bandage sous l'œil attentif d'Evrard. Sa plaie avait cessé de saigner, mais était toujours aussi vive et écarlate. Elle plongea le tissu dans l'eau clair et épongea doucement son cou pour nettoyer sa blessure en grimaçant légèrement.
¾ Restez ici, ordonna-t-il en lui tournant le dos. Je ne serais pas long.
Sans lui laisser le temps de répondre, il s'éloigna dans la forêt à la recherche des petits boutons blancs de l'achillée. C'était une mauvaise herbe très répandue, mais qui ne poussait pas beaucoup dans les bois, préférant des espaces plus découverts comme les prairies. Le Chevalier finit par trouver un espace dégagé au bord de la route, sur lequel une plante, solitaire, poussait. Il jugea rapidement qu'il n'y en avait pas beaucoup, mais qu'il allait devoir faire avec. Il la cueillit et revint vers Catriona qui l'observait d'un air circonspect.
— Qu'avez-vous cueilli cette fois-ci ? risqua-t-elle en avisant la fleur.
— Un remède.
Il s'assit à côté d'elle. Il déposa sa cueillette sur une pierre plate et la broya à l'aide d'un galet pêché au fond du ruisseau.
— Vous permettez ? interrogea-t-il.
Catriona acquiesça d'un signe de tête et dégagea sa longue chevelure brune de son cou. Du bout des doigts, Evrard appliqua la mixture sur sa coupure. Elle frissonna à son contact et ferma les yeux, appréciant visiblement de sentir ses mains sur sa peau. Le Chevalier dû résister à l'envie de se pencher sur sa nuque pour la parcourir de ses lèvres.
— C'est de l'achillée, expliqua-t-il pour se redonner contenance. Cela va vous aider à cicatriser plus vite.
— D'abord de la consoude, maintenant de l'achillée...d'où vous viennent toutes ces connaissances sur les plantes ? sourit-elle en plongeant son regard dans le sien.
Evrard lui rendit son sourire.
— Mon précepteur ne se contentait pas de m'éduquer au combat. C'était un homme de science qui s'est efforcé de m'apprendre tout ce qu'il savait. C'est très utile de connaître les plantes qui soignent...ou qui rendent malade. Et avec toutes les cicatrices que j'ai sur le corps, nul doute que je mets souvent ce talent à profit, ajouta-t-il en plaisantant.
— Je ne dois en avoir qu'une seule, marmonna-t-elle d'une voix songeuse.
Elle releva son jupon pour dévoiler son genou. Le Chevalier suivit le mouvement du tissu avec fascination, regrettant presque qu'il ne découvre pas d'avantage de peau. Sur son articulation, elle avait effectivement une fine cicatrice blafarde qui devait remonter à plusieurs années.
— Quand j'étais petite, je ne tenais pas en place, raconta-t-elle. C'est en courant dans la cour que j'ai trébuchée et que je me la suis faite. Ma mère m'a brutalement rabrouée et m'a envoyé dans ma chambre sans souper.

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Bandit Heart
Historical FictionAlors que l'avenir de la jeune Catriona Loveday est tracé, celui d'Evrard le Gall, ancien Chevalier sans le sou, est plus qu'incertain. Mais dès l'instant où la noble se retrouve entre les griffes de deux brutes, Evrard n'hésite pas à la secourir, a...