Au petit matin, Evrard revint au campement avec un lapin fraichement attrapé. Il était satisfait de constater qu'il n'avait rien perdu de ses talents dans la confection de collets.
Il s'agenouilla devant le feu qu'il avait allumé pour les réchauffer de leur nuit glaciale, sortit son couteau de la ceinture et commença à le préparer avec des gestes méticuleux. Concentré sur sa tâche, il ne remarqua pas tout de suite que la jeune noble l'observait. Elle suivait chacun de ses gestes avec un regard ébahit.
— Vous n'avez jamais vu comment préparer un lapin ? se moqua-t-il doucement.
— Contrairement à vous, j'avais des domestiques pour préparer mes repas, répliqua-t-elle avec morgue.
— J'espère que vous en avez bien profité, car dorénavant, les choses vont changer pour vous.
Il releva la tête pour la regarder droit dans les yeux.
— A présent, vous ne devrez compter que sur vous-même. Dans notre situation, faire confiance à quiconque pourrait se révéler dangereux. Vous devez être capable de vous débrouiller et de vous défendre seule. Est-ce compris ?
— C'est limpide.
Il fronça les sourcils. Il se demanda si elle lui affirmait cela pour lui faire plaisir ou simplement pour qu'il lui fiche la paix.
— Est-ce que vous connaissez au moins les quelques règles élémentaires de survie ? demanda-t-il d'un ton qui se voulait patient.
— Lesquelles ?
— Savoir faire un feu, par exemple. Ou comment se construire un abri, confectionner des collets ou se repérer dans un environnement.
— Je ne sais rien de tout cela.
Evrard l'aurait parié. Mais cette réponse le contraria tout de même.
— Nous allons avoir beaucoup de travail... soupira-t-il. Approchez, je vais vous donner votre première leçon.
La jeune femme obéit de très mauvaise grâce. Apparemment, le voir écorcher et vider un lapin ne faisait pas partie des choses qu'elle souhaitait voir dans sa vie et il dû la rappeler à l'ordre plus d'une fois.
— Concentrez-vous, marmonna-t-il, agacé.
— Pourquoi me montrez-vous cette horreur ? protesta-t-elle. C'est à vous de remplir ces tâches. C'est vous l'homme.
Une fois de plus, il redressa la tête pour planter son regard dans le sien.
— Je peux vous prouver par d'autres moyens que je suis un homme, rétorqua-t-il avec un sourire suggestif.
— Je ne veux pas le savoir.
— Contrairement à ce que on vous inculte à la Cour, vous devez être capable de vous débrouiller seule.
— Vous êtes mon guide. Faites-le, ordonna-t-elle d'un ton sans réplique.
— Il se pourrait très bien que nos routes se séparent bien plus vite que vous ne le pensiez.
— Comptez-vous m'abandonner ? répliqua-t-elle.
— Et faillir à ma promesse ? Non, je ne vous abandonnerai pas, sauf si vous m'en donnez l'ordre.
Un silence s'installa quelques secondes entre eux, uniquement entrecoupés par les coups de couteaux qu'Evrard donnait à la chair du lapin.
— Pourquoi rejoindre l'Écosse ? demanda-t-il subitement.
Il ne se souvenait plus très bien de ses leçons de politique et ne connaissait pas la situation actuelle de ce pays. Tout ce dont il se rappelait, c'était que l'Écosse et l'Angleterre n'étaient pas amies. Sans compter les Normands et les Bourguignons qui ne cessaient de se mêler à leurs conflits.
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Bandit Heart
Historical FictionAlors que l'avenir de la jeune Catriona Loveday est tracé, celui d'Evrard le Gall, ancien Chevalier sans le sou, est plus qu'incertain. Mais dès l'instant où la noble se retrouve entre les griffes de deux brutes, Evrard n'hésite pas à la secourir, a...